Sommes-nous à l’ère de l’athéisme ou du réveil religieux ?

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Entretien avec le père Thomas D. Williams

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ROME, Vendredi 6 mars 2009 (ZENIT.org) – La notion de sainteté peut sembler rébarbative à l’homme moderne, mais c’est en réalité l’aventure la plus passionnante de l’existence humaine, déclare le père Williams, théologien et écrivain, bien connu aux Etats-Unis.

Le père Thomas D. Williams, L.C. professeur de théologie à l’Université Regina Apostolorum à Rome, pose la question dans son nouveau livre « Les fondamentaux de la vie chrétienne. Comment devenir le chrétien que vous voudriez être » (cf. http://www.logos-beatitudes.com/logos/livre.asp?ref=EDB0176)

Dans cet entretien avec Zenit, il analyse l’état de la religion et de la spiritualité dans notre société occidentale.

Q – De nombreux livres ont paru récemment avançant des arguments convaincants en faveur de l’athéisme et de la fin de la religion. Dans le même temps, beaucoup semblent se tourner résolument vers la foi religieuse. Où en sommes-nous ? A l’ère de l’athéisme ou d’un nouveau réveil religieux ?

P. Williams – Ce qui apparaît très clairement, c’est un regain d’intérêt pour toutes les choses spirituelles, qu’il s’agisse de théories proposant de démystifier la religion, une spiritualité « lite » ou une exploration plus poussée de la foi chrétienne.

 
Dans certaines régions du monde, la catégorie des livres de spiritualité est chez les éditeurs un secteur florissant. Il semble que beaucoup en aient assez de courir après un succès purement matériel et qu’ils souhaitent approfondir des questions plus importantes de la vie. Que signifie tout ce que je vis ? Pourquoi suis-je là ? Où vais-je ?

Q – Croyez-vous que des livres comme « Pour en finir avec Dieu » et « Qu’est-ce que l’évolution? » de Richard Dawkins, le « Traité d’athéologie » de Michel Onfroy et « L’esprit de l’athéisme – Introduction à une spiritualité sans Dieu » d’André Comte Sponville, constituent une menace sérieuse pour le christianisme ?

P. Williams – Pas vraiment – vous savez, le christianisme a eu affaire à de sérieux adversaires dans le passé – mais il est clair qu’ils peuvent apporter trouble et confusion à de nombreux chrétiens, particulièrement ceux qui n’ont pas été catéchisés.
En réalité, les théories athéistes que ces auteurs proposent ont déjà plusieurs siècles d’existence, et refont surface à chaque génération. Ceux qui les rencontrent pour la première fois les trouvent nouvelles, mais elles pourraient tout aussi bien avoir été sorties de textes de Voltaire, Auguste Comte ou un certain nombre d’écrivains du siècle des Lumières.

La nouvelle menace que représentent des livres comme ceux de Dawkins réside dans le fait qu’ils semblent plausibles à cause de leur vernis « scientifique », qui ajoute du cachet – à défaut de substance – à leurs arguments.

Q – Les livres de Dawkins traitent-ils honnêtement de la nature de la religion ?

P. Williams – Bien évidemment non. C’est comme si on considérait « le Da Vinci Code » comme une enquête honnête sur l’histoire du christianisme.

Dawkins est un généticien darwinien. On serait en droit d’attendre d’un scientifique qu’il soit objectif, impartial et sérieux au plan intellectuel. Malheureusement, avec des auteurs comme Dawkins, ce n’est pas le cas. Il évite délibérément toute preuve qui contredirait ses théories et son intention déclarée est de voir ses lecteurs se rallier à la croisade athée. Il écrit comme un prosélyte, pas comme un scientifique.

Q – Vous travaillez également comme analyste et commentateur pour CBS News. Comment percevez-vous l’attention accordée à la foi religieuse par les media ?

P. Williams – D’une certaine manière, les media ont compris l’intérêt grandissant de leur public pour la religion. Ils offrent donc occasionnellement des histoires qui touchent à la foi chrétienne et à l’Eglise.

Il est vrai que les media laïcs insistent beaucoup trop sur les scandales que traverse l’Eglise, mais ils réalisent également que beaucoup de gens s’intéressent à la foi et la spiritualité pour eux-mêmes.

Q – Dans les dernières années de sa vie, le pape Jean Paul II a inlassablement affirmé que le troisième millénaire ouvrirait la voie à un nouveau « printemps de la foi ». Etait-ce simplement l’expression de son optimisme naturel, ou perçoit-on déjà de vrais signes de ce printemps annoncé ?

P. Williams – Les paroles du Saint-Père révélaient une analyse sérieuse de l’état de notre société à la suite des tragédies du XX° siècle.

Rappelez-vous, le premier signe du printemps, c’est la fin de l’hiver. Avant de voir les petits boutons roses et d’entendre les gazouillis des petits oiseaux, on constate que la neige toute blanche devient un tas de gadoue brunâtre. Le vrai début du printemps, c’est lorsque l’hiver perd son emprise sur la nature…

On voit très bien le parallèle avec le communisme marxiste, le nazisme et le fascisme, autant qu’avec des versions plus subtiles de matérialisme idéologique promettant un paradis sur terre. Pendant longtemps, beaucoup ont mis leur espoir dans ces idéologies. Et cependant, l’une après l’autre, elles sont tombées, sans avoir manqué d’engendrer des souffrances humaines inouïes jusque-là. C’est parce que ces expériences sociales ont vu leur fin que les gens ont compris qu’il leur fallait chercher ailleurs pour trouver un sens et la solution aux problèmes du monde.

 
Q – Cela signifierait-il que nous pouvons croire que juste après viendra un été spirituel ?

 
P. Williams – Cela dépendra. Si nous profitons de l’occasion du moment, oui. Rappelez-vous que le printemps n’est pas un temps d’accomplissement, mais d’espérance et de promesse. C’est avant tout un temps de labeur. La terre labourée peut accueillir tout aussi bien des mauvaises herbes que de la bonne semence. Quelque chose poussera, mais rien ne garantit que ce sera des fleurs et de bonnes plantes. Le printemps ouvre une fenêtre de possibilités, c’est un moment particulièrement favorable pour semer de la bonne graine lorsque la terre a été labourée et préparée dans ce but. Si nous en profitons bien, c’est toute l’humanité qui en récoltera les fruits.

Q – Dans votre dernier livre « Les fondamentaux de la vie chrétienne », vous semblez vouloir tirer parti de ce temps. Que proposez-vous ?

P. Williams – Ce livre est un guide pour tous ceux qui souhaitent progresser dans la vie spirituelle. Beaucoup se rendent compte qu’il ne suffit pas d’être chrétien de nom. La vie chrétienne est essentiellement dynamique et doit être en constante croissance.

Malheureusement, notre formation spirituelle est à la traîne entre notre formation intellectuelle et notre formation professionnelle. Nous avons besoin d’outils pour grandir spirituellement de la même façon que nous grandissons au plan social et intellectuel.

Même si nous avons honnêtement mené une vie de prière et de vertu, le Christ nous invite sans cesse à grandir davantage, et nous propose de nouveaux défis. L’ouvrage est là pour aider les chrétiens à comprendre plus clairement où se diriger dans leur vie spirituelle et comment y parvenir.

Q – En un mot, quel est le but de la vie spirituelle ?

 
P. Williams – Le but de la vie spirituelle, c’est la sainteté et l’union à Dieu. Malheureusement l’idée même de la sainteté semble étrange – sinon repoussante – à notre époque moderne. Je commence le livre en dénouant les fausses conceptions sur la sain
teté, expliquant ce qu’elle n’est pas, avant de dire ce qu’elle est.

La sainteté peut paraître ennuyeuse, inatteignable, parfois fanatique. C’est en réalité, l’aventure la plus passionnante de l’existence humaine. Nous avons parfois tendance à croire que nous savons tout sur la vie spirituelle chrétienne, mais nous n’en voyons en fait qu’une caricature. Elle est plus riche, bien plus riche et bien plus passionnante qu’on ne l’imagine.

La sainteté ne consiste pas à rechercher à nous perfectionner – essayant de faire le tri de nos fautes, et comme d’engranger du crédit spiritual. Il s’agit plutôt de nous oublier nous-mêmes, de découvrir à quel point Dieu nous aime, intensément, passionnément, et de répondre en l’aimant et en aimant notre prochain.

Q – Et Dieu dans tout ça ?

P. Williams – Là aussi nous devons balayer toutes les fausses idées qui courent. La volonté de Dieu n’est pas simplement un projet qu’il aurait sur notre vie, à la manière d’un père bien pensant mais oppressant qui ne souhaite qu’une chose, c’est que sa fille devienne avocate.

La volonté de Dieu est simplement un autre nom pour désigner l’amour de Dieu pour nous. C’est parce qu’il nous aime qu’il ne veut que de bonnes choses – les meilleures – pour nous. Chacun de nous a été créé pour une mission spécifique, et ce n’est qu’en répondant à cette mission que nous trouvons la vraie joie. Dieu nous demande un certain nombre de choses, non parce qu’il en a besoin lui-même, mais parce que nous en avons besoin.

Q – Que doivent alors faire les chrétiens ?

P. Williams – Par-dessus tout, il faut courage et confiance. Il nous faut du courage pour nous embarquer dans une vie de foi, sans savoir où elle nous conduit. Il nous faut du courage pour accepter les défis auxquels notre foi chrétienne nous confronte. Il nous faut du courage pour laisser derrière nous nos vieilles sécurités et nos trésors, et mettre notre confiance en Dieu et en ses promesses.

Et il nous faut avoir confiance. C’est peut-être là le plus grand défi auquel sont confrontés les chrétiens d’aujourd’hui. On se sent si souvent trahi par ses plus proches qu’on est plutôt tenté de s’appuyer sur sa propre ingéniosité et créativité.

Mais Dieu demande notre confiance. Il veut que nous croyions en lui, il veut que nous sachions qu’il ne nous laissera jamais tomber. Seul celui qui fait confiance de cette façon trouvera la force d’accepter les magnifiques exigences de la vie chrétienne.

Ce n’est que lorsque nous prendrons vraiment conscience que Dieu est Amour, que nous apprendrons à lui faire confiance de façon inconditionnelle et que nous le suivrons partout où il nous conduira.

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ZENIT Staff

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