Sécurité routière : un défi évangélique

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Déclaration de la Commission sociale des évêques de France

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CITE DU VATICAN, Mercredi 7 avril 2004 (ZENIT.org) – Nous republions, à l’occasion de la Journée mondiale de la sécurité routière 2004 promue par l’ONU cette déclaration des évêques de France (cf. www.cef.fr) de 2002 qui n’a rien perdu de don actualité.

Motos, motos, cyclomoteurs, vélos, les véhicules jouent aujourd’hui un rôle central dans la vie quotidienne des citoyens. Leur usage est source de plaisir, de confort. Ils sont des outils indispensables dans le travail ou la recherche d’un emploi. Ils réduisent les distances entre les hommes, facilitent la vie pratique, permettent les voyages, offrent à beaucoup une liberté accrue. Le progrès technique a permis, grâce à une meilleure qualité des véhicules, une plus grande sécurité, un meilleur respect de l’environnement. Mais ces magnifiques outils, remis entre nos mains, ne doivent pas devenir des instruments de mort.

Or, selon les psychologues, les conducteurs utilisent souvent leur véhicule de façon irresponsable, voire dangereuse. La voiture, le camion, la moto deviennent l’expression de la puissance, de l’intolérance, de l’exhibition, quelquefois même de la violence. Le conducteur peut manifester des sentiments et des attitudes qu’il n’adopte pas dans la vie habituelle. Le budget qu’il consacre à son véhicule est souvent sans rapport avec les capacités financières familiales. C’est une question d’image de soi et d’honorabilité sociale.

Les accidents de la circulation provoquent 8 000 morts par an sur les routes de France : c’est la première cause de décès des moins de 25 ans. Ils entraînent également 150 000 blessés dont 12 000 seront à tout jamais invalides et dépendants. Qui mesurera les souffrances des familles frappées par ces malheurs ?

Cette insécurité routière est un scandale qui doit provoquer la réflexion de tous les conducteurs de véhicules et les inciter à une conversion de leurs comportements. Par le nombre de victimes des accidents de la route, la France se trouve parmi les pays les plus mal classés au niveau européen. Nos voisins le savent. Ils ne comprennent pas. C’est une bien triste « exception culturelle ».

Responsabilité

Il ne suffit pas d’avoir le permis de conduire. Il faut savoir conduire pour avoir le droit de prendre la route. Il faut être en état de conduire et respecter les limitations de vitesse. La fatigue ou l’alcool, l’excitation ou la somnolence, les médicaments ou les drogues peuvent interdire le départ.

Il y a une responsabilité de tous engagée dans ce domaine. Interdire le volant à quelqu’un est une atteinte à la liberté d’un proche, d’un client ou d’un voisin. C’est donc une responsabilité délicate à exercer. Pourtant on ne peut laisser personne prendre des risques inconsidérés par rapport à lui-même et par rapport aux autres.

Les éducateurs, parents, prêtres, enseignants, entraîneurs sportifs, journalistes, et tant d’autres qui modèlent la culture des jeunes, se doivent d’attacher une importance capitale à ces questions. Trop souvent leur comportement, observable par les jeunes, est en contradiction avec les discours de prudence, de responsabilité, de relation aux autres, par ailleurs développés comme si chacun se comportait en complice. On admire souvent la vitesse, la prise de risque, l’audace et la transgression plus que la prudence, l’attention aux autres et le respect de la loi !

Solidarité

La solidarité avec les victimes, et les famille des victimes, est difficilement mise en œuvre. C’est vrai au niveau institutionnel. C’est même souvent vrai au niveau familial ou dans le cercle des amis. Les victimes ou leurs proches ont besoin d’écoute, de contacts humains, d’aide matérielle et juridique.

Il ne faut pas oublier le sentiment de culpabilité des personnes en cause qui complique presque toujours l’épreuve. La victime et l’agresseur ne sont pas face à face. Il est important d’aider chacun à faire la clarté sur la situation réelle et de permettre aux protagonistes de se rencontrer, de se parler, de reconnaître les torts commis. Alors, ils pourront faire l’expérience libératrice du pardon !

Le système des assurances est indispensable et c’est un devoir d’y avoir recours. Mais on sera attentif aux dérives qui mènent parfois à une déresponsabilisation des personnes. On ne saurait tout régler par des compensations financières.

L’Etat investit des sommes considérables pour la sécurité. C’est son devoir. Lui reviennent, en effet, outre la responsabilité de l’équipement routier, le contrôle des règles de conduite et l’éducation des conducteurs. Il doit imposer le bien commun aux intérêts particuliers.

C’est à l’Etat également de définir une politique de la route pour demain. L’automobile pourrait nous enfermer dans sa logique et conduire notre société jusqu’à la paralysie… ce qui serait un comble.

A chacun d’être responsable et solidaire

Chacun d’entre nous, depuis l’adolescent sur sa mobylette jusqu’au conducteur d’un âge avancé au volant de sa voiture, est responsable de lui-même et des autres. Piétons et fervents des rollers sont eux-mêmes invités à la prudence. Nul ne peut se contenter de rejeter la responsabilité sur le prochain. Chacun est responsable de sa conduite. Cela réclame une véritable ascèse, un combat spirituel. Chacun est responsable des autres : sa famille, ses passagers, les passants, les autres chauffeurs. Cela demande davantage : l’amour d’autrui.

« Tu ne tueras point » : ce commandement des origines garde aujourd’hui toute son actualité, y compris sur la route. Mais l’Evangile nous donne d’entendre un appel du Christ qui va plus loin encore, celui de la conversion de nos mentalités. Il s’agit d’adopter, dans ce domaine comme en d’autres, des attitudes inspirées par la charité ! La route ne se prend pas, elle se partage. Elle est un lieu de rencontre des autres. Elle doit laisser la place aux plus faibles, pour qu’ils soient respectés et libres d’en profiter dans un espace social digne de ce nom. Se mettre à l’école de l’Evangile suppose donc maîtrise de soi, entraide, conscience de ses responsabilités. La route devient alors le lieu de l’expression de la fraternité.
Le 29 octobre 2002

Olivier de BERRANGER,
évêque de Saint-Denis, Président de la Commission sociale des évêques de France,
Philippe BARBARIN,
archevêque de Lyon, Président du Comité épiscopal pour la Santé,
André LACRAMPE,
évêque d’Ajaccio, Président du Comité épiscopal socio-caritatif,
Jean BONFILS,
évêque de Nice, Président du Comité épiscopal socio-économique et politique,
Hervé RENAUDIN,
évêque de Pontoise, Président du Comité épiscopal Justice et société,
Jacques NOYER,
évêque d’Amiens, Président du Comité épiscopal Loisirs, fêtes et voyages

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ZENIT Staff

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