Saints Pierre et Paul : Homélie de Benoît XVI (Messe du 29 juin)

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ROME, Vendredi 9 juillet 2010 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte de l’homélie que le pape Benoît XVI a prononcé le mardi 29 juin, solennité des saints Pierre et Paul, en la basilique Saint-Pierre à Rome. Au cours de cette messe, il a remis le pallium à 38 nouveaux archevêques métropolitains.

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MESSE ET IMPOSITION DU PALLIUM AUX NOUVEAUX ARCHEVÊQUES MÉTROPOLITAINS

  HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI

Basilique Vaticane
Mardi 29 juin 2010

Livret de la Célébration: 1, 2, 3
Images de la célébration

  

Chers frères et sœurs!

Dans leur grande richesse, les textes bibliques de cette Liturgie eucharistique de la solennité des saints apôtres Pierre et Paul, soulignent un thème qui l’on pourrait résumer ainsi: Dieu est proche de ses fidèles serviteurs et les libère de tous les maux, et libère l’Eglise des puissances négatives. C’est le thème de la liberté de l’Eglise, qui présente un aspect historique et un autre plus profondément spirituel.

Cette thématique traverse toute la liturgie de la Parole d’aujourd’hui. La première et la deuxième lecture parlent respectivement de saint Pierre et de saint Paul en soulignant précisément l’action libératrice de Dieu à leur égard. Le texte des Actes des Apôtres en particulier décrit avec une abondance de détails l’intervention de l’ange du Seigneur, qui libère Pierre de ses chaînes et le conduit hors de la prison de Jérusalem où l’avait fait enfermer, sous étroite surveillance, le roi Hérode (cf. Ac 12, 1-11). Paul en revanche, en écrivant à Timothée alors qu’il sent désormais s’approcher la fin de sa vie terrestre, en fait un bilan conclusif dont il ressort que le Seigneur a toujours été proche de lui, l’a libéré de tant de dangers et le libérera encore en l’introduisant dans son Royaume éternel (cf. 2 Tm 4, 6-8.17-18). Le thème est renforcé par le Psaume responsorial (Ps 33), et trouve un développement particulier également dans le passage évangélique de la confession de Pierre, là où le Christ promet que les puissances des enfers ne prévaudront pas sur l’Eglise (cf. Mt 16, 18).

En observant bien on remarque, dans cette thématique, une certaine progression. Dans la première Lecture nous est raconté un épisode spécifique qui montre l’intervention du Seigneur pour libérer Pierre de la prison; dans la deuxième, Paul, sur la base de son extraordinaire expérience apostolique, se dit convaincu que le Seigneur, qui l’a déjà libéré «de la gueule du lion», le libérera «de toute entreprise perverse» en lui ouvrant les portes du Ciel; dans l’Evangile en revanche on ne parle plus individuellement des apôtres, mais de l’Eglise dans son ensemble et de sa sécurité vis-à-vis des forces du mal, entendues au sens large et profond. De cette manière nous voyons que la promesse de Jésus – «les puissances des enfers ne prévaudront» pas sur l’Eglise – comprend à la fois les expériences historiques de persécutions subies par Pierre et Paul et par les autres témoins de l’Evangile, mais va au-delà, en voulant assurer la protection surtout contre les menaces d’ordre spirituel; selon ce que Paul lui-même écrit dans la Lettre aux Ephésiens: «Car ce n’est pas contre des adversaires de sang et de chair que nous avons à lutter, mais contre les Principautés, contre les Puissances, contre les Régisseurs de ce monde de ténèbres, contre les esprits du mal qui habitent les espaces célestes» (Ep 6, 12).

En effet, si nous pensons aux deux millénaires d’histoire de l’Eglise, nous pouvons observer que – comme l’avait pré-annoncé le Seigneur Jésus (cf. Mt 10, 16-33) – les épreuves n’ont jamais été épargnées aux chrétiens, qui à certaines périodes et dans certains lieux ont pris la forme de véritables persécutions. Mais celles-ci, malgré les souffrances qu’elles provoquent, ne constituent pas le danger le plus grand pour l’Eglise. Le plus grand dommage, en effet, elle le subit de ce qui pollue la foi et la vie chrétienne de ses membres et de ses communautés, en touchant à l’intégrité du Corps mystique, en affaiblissant sa capacité prophétique et de témoignage, en voilant la beauté de son visage. Cette réalité est déjà attestée dans la correspondance paulinienne. La Première Lettre aux Corinthiens, par exemple, répond précisément à certains problèmes de division, d’incohérence, d’infidélité à l’Evangile qui menacent sérieusement l’Eglise. Mais la Seconde Lettre à Timothée aussi – dont nous avons écouté un passage – parle des dangers des «derniers jours», en les identifiant comme des attitudes négatives qui appartiennent au monde et qui peuvent contaminer la communauté chrétienne: égoïsme, vanité, orgueil, cupidité, etc. (cf. 3, 1-5). La conclusion de l’Apôtre est rassurante: les hommes qui font le mal – écrit-il – «n’iront pas plus loin, car leur folie sera démasquée aux yeux de tous» (3, 9). Il existe donc une garantie de liberté assurée par Dieu à l’Eglise, une liberté à la fois vis-à-vis des liens matériels qui essaient d’en empêcher ou d’en contraindre la mission, et des maux spirituels et moraux, qui peuvent en entacher l’authenticité et la crédibilité.

Le thème de la liberté de l’Eglise, garantie par le Christ à Pierre, a aussi une relation spécifique avec le rite de l’imposition du pallium, que nous renouvelons aujourd’hui pour trente-huit archevêques métropolitains, auxquels j’adresse mes plus cordiales salutations, en les étendant avec affection à toux ceux qui ont souhaité les accompagner dans ce pèlerinage. La communion avec Pierre et ses successeurs, en effet, est la garantie de la liberté des pasteurs de l’Eglise ainsi que des communautés qui leur sont confiées. Elle l’est sur les deux plans mis en lumière dans les réflexions précédentes. Sur le plan historique, l’union avec le Siège apostolique assure aux Eglises particulières et aux conférences épiscopales la liberté par rapport aux pouvoirs locaux, nationaux ou supranationaux, qui peuvent dans certains cas faire obstacle à la mission de l’Eglise. En outre, et plus essentiellement, le ministère pétrinien est une garantie de liberté au sens de la pleine adhésion à la vérité, à la tradition authentique, pour que le peuple de Dieu soit préservé des erreurs portant sur la foi et la morale. Le fait, par conséquent, que chaque année, les nouveaux archevêques métropolitains viennent à Rome recevoir le pallium des mains du Pape doit être compris dans sa signification propre, comme un geste de communion, et le thème de la liberté de l’Eglise nous en offre une clé de lecture particulièrement importante. Cela apparaît avec évidence dans le cas d’Eglises marquées par des persécutions ou bien soumises à des ingérences politiques ou à d’autres épreuves difficiles. Mais cela n’est pas moins grave dans le cas de communautés qui souffrent de l’influence de doctrines fallacieuses, ou de tendances idéologiques et pratiques contraires à l’Evangile. Le pallium devient donc, en ce sens, un gage de liberté, tout comme le «joug» de Jésus, qu’Il invite à prendre, chacun sur nos propres épaules (cf. Mt 11, 29-30). De même, le commandement du Christ – bien qu’exigeant – est «aisé et léger» et, au lieu de peser sur celui qui le porte, il le soulage, tout comme le lien avec le Siège apostolique – bien qu’il crée un engagement – soutient le pasteur et la portion d’Eglise confiée à ses soins, en les rendant plus libres et plus forts.

Je voudrais tirer une dernière indication de la Parole de Dieu, en particulier de la promesse du Christ que les puissances des enfers ne prévaudront pas s
ur son Eglise. Ces paroles peuvent avoir aussi une valeur œcuménique significative, du moment que, comme je le suggérais plus haut, l’un des effets propres de l’action du Malin est précisément la division au sein de la communauté ecclésiale. Les divisions, en effet, sont des symptômes de la force du péché, qui continue d’agir dans les membres de l’Eglise même après la rédemption. Mais la parole du Christ est claire: «Non praevalebunt – elles ne prévaudront pas» (Mt 16, 18). L’unité de l’Eglise est enracinée dans son union avec le Christ, et la cause de la pleine unité des chrétiens – qui reste toujours à rechercher et à renouveler, de génération en génération – trouve également un soutien dans la prière et dans sa promesse. Dans la lutte contre l’esprit du mal, Dieu nous a donné en Jésus l’«Avocat» de la défense et, après sa Pâque, «un autre Paraclet» (cf. Jn 14, 16), l’Esprit Saint, qui demeure avec nous pour toujours et conduit l’Eglise vers la plénitude de la vérité (cf. Jn 14, 16; 16, 13), qui est aussi la plénitude de la charité et de l’unité. Avec ces sentiments de confiance et d’espérance, je suis heureux de saluer la délégation du patriarcat de Constantinople, qui selon la belle tradition des visites réciproques, participe aux célébrations des saints patrons de Rome. Nous rendons ensemble grâce à Dieu pour les progrès dans les relations œcuméniques entre catholiques et orthodoxes, et nous renouvelons l’engagement de répondre généreusement à la grâce de Dieu, qui nous conduit vers la pleine communion.

Chers amis, je salue cordialement chacun de vous: Messieurs les cardinaux, mes frères dans l’épiscopat, Messieurs les ambassadeurs et les autorités civiles, en particulier le maire de Rome, les prêtres, les religieux et les fidèles laïcs. Je vous remercie de votre présence. Puissent les saints apôtres Pierre et Paul vous faire aimer toujours plus la sainte Eglise, corps mystique du Christ Seigneur et messager d’unité et de paix pour tous les hommes. Qu’ils fassent aussi que vous offriez avec joie pour sa sainteté et pour sa mission les difficultés et les souffrances supportées par fidélité à l’Evangile. Que la Vierge Marie, Reine des apôtres et Mère de l’Eglise, veille toujours sur vous, en particulier sur le ministère des archevêques métropolitains. Puissiez-vous avec son secours céleste vivre et agir toujours dans la liberté que le Christ nous a obtenue. Amen.

© Copyright 2010 – Libreria Editrice Vaticana

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ZENIT Staff

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