« Quels obstacles au témoignage commun des chrétiens en Russie? » (II)

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Réponse du cardinal Martino

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ROME, Dimanche 4 décembre 2005 (ZENIT.org) – « Quels obstacles y a-t-il au témoignage commun des chrétiens en Russie? » « L’obstacle le plus grave – si triste que ce soit de le constater – dans la majeure partie des cas, c’est nous! », répond le cardinal Renato Raffaele Martino, président du conseil pontifical Justice et Paix, qui s’explique dans les colonnes de l’hebdomadaire catholique russe « Svet Evangelia » (« Lumière de l’Evangile »), dans un entretien accordé à Victor Khroul, le 1er décembre, avant de quitter Moscou, où il a présenté le « Compendium » de l’enseignement social de l’Eglise. Nous publions ci-dessous la deuxième partie de cet entretien. (La première partie a été publiée le vendredi 2 décembre).

Svet Evangelia – Quels sont les principaux résultats de cette rencontre? Pourquoi ni le président de la conférence des évêques catholiques de Russie, ni l’Ordinaire n’ont été invités à y prendre part, alors que le directeur de la « Caritas » de Russie y a été invité?

Card. Martino : Comme je l’ai déjà dit, nous sommes au début d’une nouvelle et – je l’espère – longue phase de cheminement commun. Il me semble que le premier résultat et le plus important consiste dans le fait que se soit exprimé un intérêt réciproque à la poursuite de ce chemin ensemble. Il me semble que cela n’est pas rien, et je crois que d’autres pas successifs ne se feront pas attendre.
Je suis un peu surpris de la note de ressentiment qu’il me semble percevoir dans votre question. Excusez-moi si je me trompe. Il me semble que nous devrions être tous contents des résultats positifs atteints, et qu’il serait étrange de faire dépendre uniquement d’exigences protocolaires. Il me semble que le nombre des participants de cette première et – je le répète – assez féconde rencontre, ait été le meilleur du point de vue des problématiques en question, et du niveau de leurs traitements, en me référant à ce « distinguo » entre les différents niveaux auquel j’ai fait allusion auparavant. Je voudrais enfin rappeler que l’archevêque Kondrusiewicz n’était pas à Moscou, et qu’il a chargé le P. Aleksander Petshik de le représenter.

Svet Evangelia – Quel type de vulgarisation de l’enseignement social de l’Eglise pensez-vous le meilleur en Russie? Est-ce que cela vaut la peine de prendre en compte la Doctrine sociale orthodoxe publiée en 2000?

Card. Martino : L’un des objectifs de ma visite en Russie était justement de contribuer à faire connaître l’enseignement social catholique. Il est maintenant très important que de nombreuses personnes intéressées par ces problématiques puissent mieux le connaître en en lisant un abrégé grâce au « Compendium » traduit en Russe. Nous sommes heureux que ceux qui sont intéressés puissent et veuillent utiliser l’expérience de l’Eglise catholique pour résoudre les problèmes sociaux d’aujourd’hui dans un esprit chrétien. Mais ce n’est qu’un des instruments. L’autre, comme je l’ai dit auparavant, consiste dans le fait de traduire la doctrine sociale de l’Eglise dans la vie des fidèles, des communautés catholiques, parce que « l’on ne peut pas cacher une ville située sur une colline ». Ce second instrument est celui que vous avez à votre position, vous, les catholiques de Russie. Seule votre vie, seul votre travail peuvent créer des formes concrètes de témoignage.

Svet Evangelia – Bien que l’archevêque Kondrusiewicz soit membre du conseil pontifical Justice et Paix, il n’a pas d’institution « Justice et Paix » en Russie (en tant que commission nationale ou locale). Considérez-vous une activité de ce genre comme nécessaire? Avec quoi, raisonnablement, commencer?

Card. Martino : Je crois qu’ici, en Russie, tout type d’activité qui réponde aux besoins de l’Eglise et de la société pourra être utile et efficace, et trouver une excellente forme de réalisation, y compris en tenant compte des intérêts de la collaboration inter-confesionnelle. C’est seulement la première fois que je me rends en Russie, et il m’est difficile de donner des conseils pratiques. Mais je crois que la doctrine de l’Eglise assumée entièrement et en union avec la charité évangélique, peut suggérer la meilleure voie à suivre dans ce dessein.

Svet Evangelia – Est-ce que les prêtres catholiques vont dans les hôpitaux, les prisons, les forces militaires, de police, et d’autres institutions sociales en Russie, où les catholiques pourraient avoir besoin de leurs soins pastoraux? Nous avons un petit nombre de chapelles dans les prisons, et les prêtres, nommés chapelains par les évêques, ont des difficultés à entrer dans les prisons. Quel moyen a-t-on pour résoudre des problèmes de ce type?

Card. Martino : Des problèmes tels que celui de la visite des prisons, les régiments militaires, etc., par des prêtres catholiques, ne peuvent être mesurés que dans le contexte général des relations existantes. Des cas singuliers d’échec évident pourront se produire, même à l’avenir, mais il serait erroné de fonder les perspectives de nos relations uniquement sur eux. Et justement à ce propos, l’activité de la commission mixte que j’ai mentionnée auparavant pourrait être utile. Peut-être les catholiques de Russie ne sont-ils pas nombreux au point de rendre nécessaire, par exemple, l’institution d’églises pour eux dans les prisons. Et probablement une dizaine d’aumôniers militaires pourrait suffire pour travailler dans les plaines russes, si immenses soient-elles. Mais, je le répète, il me semble qu’il conviendrait de résoudre les cas particuliers à partir de la législation en vigueur dans le pays, et des relations personnelles construites et développées partout, localement, dans une esprit d’amour chrétien. On ne peut pas créer une atmosphère de sympathie et de confiance par un acte normatif : il faut y consacrer toute sa vie.

Svet Evangelia – Quelle impression d’ensemble avez-vous, à l’issue de votre première visite en Russie?

Card. Martino : Les impressions que j’en retire sont nombreuses, et il est difficile de les nommer toutes, d’autant plus que cette première visite en Russie est la réalisation d’un désir profond que j’avais depuis longtemps. Ce sont des impressions très positives et j’espère pouvoir réjouir aussi grâce à elles sa Sainteté le pape Benoît XVI, qui accorde une attention de premier ordre aux thèmes de la réconciliation et de la coopération chrétienne dans son ministère de Primat de l’Eglise catholique.

Svet Evangelia – Nous serions heureux de transmettre à nos lecteurs tout ce que Votre Eminence voudra leur dire (ou leur écrire) en ce temps de l’Avent, avant Noël (un manuscrit serait plus que bienvenu, nous le reproduirions en facsimilé)…

Card. Martino : Je veux saisir cette occasion pour faire présenter aux lecteurs de « Svet Evangelia » mes vœux pour la fête de Noël, proche désormais, en souhaitant que le temps de préparation à cet événement stupéfiant et joyeux porte de nombreux fruits spirituels. La doctrine sociale de l’Eglise dont nous avons parlé longuement ces derniers jours n’existe pas en elle-même. Mais elle s’incarne continuellement dans des expressions d’amour, de compassion et de justice, et il dépend de nous que ces paroles de transforment en vie, en contribuant à la réalisation de la paix, de l’amour, et du salut pour le monde, dont nous, chrétiens, avons la responsabilité.

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ZENIT Staff

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