Prisons : « la réconciliation est la fin ultime de la peine »

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Congrès de la Commission internationale pour la pastorale catholique dans les prisons

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ROME, Jeudi 29 janvier 2009 (ZENIT.org) – Dans une solide réflexion, envoyée au congrès de la Commission internationale pour la pastorale catholique dans les prisons (ICCPPC), en cours ces jours-ci à Budapest, Mgr Giampaolo Crepaldi explique le rapport qui existe entre le monde  carcéral, l’Eglise catholique et le respect des droits de l’homme. 

Le secrétaire du Conseil pontifical justice et paix rappelle que « la chrétienté a vu passer, au fil des siècles, tant d’initiatives charitables à l’égard des prisonniers » et que le magistère, par son enseignement, a souvent « apporté son éclairage pour dénouer certains problèmes dramatiques du monde carcéral, à commencer par celui des emprisonnements arbitraires, et ceux des camps de concentration et des travaux forcés, jusqu’à la pratique inhumaine de la torture et la question des droits inhérents aux personnes arrêtées ».  

L’Eglise catholique a pratiqué la charité chrétienne dans le monde carcéral tout comme elle a éclairé de ses enseignements moraux la voie de la justice. 

Au-delà de la faute commise par le prisonnier, l’évêque de Bisarcio souligne que le Magistère reconnaît la dignité de la personne même si celle-ci est coupable. 

« Au plan existentiel, en effet, la détention prive la personne de certains de ses droits extérieurs, mais n’ôte en rien sa dignité humaine qui, de par sa nature, lui est intrinsèque », explique-t-il 

Selon le magistère, « l’homme, chaque homme, est aimé de Dieu qui l’a créé et l’a sauvé du mal ». Même si le prisonnier, « au plan même de son existence, a dérapé, rencontrant quelque obstacle, qui doit de toute façon lui être reconnu, et dont le tort produit doit être réparé selon les exigences de la justice, le prisonnier n’est pas ‘perdu’, bien au contraire il doit être ‘récupéré’ ».   

Citant un passage de l’encyclique du pape Benoît XVI Deus caritas est, Mgr Crepaldi rappelle que la charité perfectionne la justice, car « sans la charité la justice même ne peut être appliquée de manière vraiment juste et ceux qui connaissent le monde carcéral savent que même la peine ne peut être édictée de façon juste, voire humaine ».

Concernant le degré de peine infligée au prisonnier, Mgr Crepaldi reconnaît que « le premier objectif de la peine est de réparer le désordre produit selon des critères de proportionnalité », mais le magistère récent à élargi sa vision sur d’importantes questions, prônant « la récupération du coupable, l’absence du caractère central de la détention comme forme traditionnelle de la peine, le devoir rééducateur de la peine et une justice qui soit aussi réconciliation ».

« De cette manière-là, ajoute-t-il, le schéma d’attribution de la peine, sans être nié, a élargi ses horizons dans une vision beaucoup plus humaine ». 

Sur ce point, le Compendium de la Doctrine sociale de l’Eglise, précise que l’Etat a la double tâche de « réprimer les comportements qui portent atteinte aux droits de l’homme et aux règles fondamentales d’une coexistence civile » et de « remédier, par le biais du système des peines, au désordre causé par l’action délictueuse ».  

Reprenant ainsi les propos soulignés au paragraphe 2266 du Catéchisme de l’Eglise catholique, l’Eglise entend orienter la réflexion sur la recomposition des relations humaines et sociales, sur le rétablissement de la concorde et de la paix, sur le retour à une situation de partage à l’intérieur même des règles plutôt qu’à une situation d’opposition et de lutte en dehors des règles ».  

Ceci demande que le détenu soit considéré non comme un objet passif auquel on imposerait une souffrance comme une fin en soi, mais comme un interlocuteur au dialogue, à l’intérieur d’une relation visant à une réparation.

Pour Mgr Crepaldi, « la peine est infligée sans recherche de ‘récupération’ du sujet par rapport à son vécu social initial. Il y a comme une sorte de réciprocité dans la volonté de lui nuire. A la souffrance subie par la société, correspond la souffrance que doit subir le coupable ».  

Au contraire, le concept de réparation renvoie à « un rapport qualitatif et beaucoup plus ‘personnel’. Ce que l’on demande au coupable est bien plus que de ne pas supporter passivement sa peine. On lui demande de collaborer pour réparer le délit qu’il a commis, en reconstruisant la situation initiale d’équilibre que son comportement illégal a brisé ».

Mais la réparation n’est pas le dernier degré à atteindre dans la relation avec le détenu ; celle-ci peut en effet connaître un développement ultérieur dans la réconciliation : celui qui a enfreint la loi et commis un délit ne se limite pas agir personnellement pour le réparer, mais il re-rentre dans la société, pleinement réconcilié et capable de vivre des relations sociales de solidarité et de réciprocité.

« On pourrait dire, poursuit Mgr Crepaldi dans sa réflexion, que si l’attribution de la peine et la réparation de la faute renvoient essentiellement au passé, la réconciliation, elle, regarde en avant. On ne tend pas à oublier l’action délictueuse mais à la sublimer par le biais d’une expérience de réconciliation radicale. A noter également, que le coupable n’est pas le seul engagé dans cette réconciliation mais toute la société, alors que l’attribution de la peine et la réparation se focalisent surtout sur le comportement du coupable ».  

Aussi la réconciliation est-elle la vraie fin ultime de la peine. Jean Paul II dans son message pour la journée mondiale de la paix 2002 a d’ailleurs écrit que « la capacité de pardonner est à la base de tout projet d’une société à venir plus juste et plus solidaire ».  

A ce propos, le cardinal Renato Raffaele Martino, lors de la clôture du séminaire sur les droits de l’homme des détenus, organisé en mars 2005 par le Conseil pontifical justice et paix, avait affirmé : « les détenus sont ‘dans’ la prison, mais l’espérance chrétienne invite chacun à regarder au-delà de la prison ». 

Antonio Gaspari

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ZENIT Staff

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