Présentation de la Lettre de Benoît XVI aux catholiques d’Irlande

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Benoît XVI dit « I am sorry », souligne le P. Lombardi

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ROME, Dimanche 21 mars 2010 (ZENIT.org) – Benoît XVI dit « I am sorry », souligne le P. Lombardi en réponse à une interpellation : « chacun peut lire ce qu’il veut » dans cette lettre, mais le pape dit cela, a-t-il fait observer. Il fait remarquer que c’est un fait sans précédent que le pape écrive personnellement une telle lettre.

Le P. Lombardi a en effet présenté la lettre de Benoît XVI au cours d’une rencontre avec la presse, samedi matin, au Vatican.

L’émotion du pape et son réalisme

Il rappelle que Benoît XVI a demandé mercredi aux Irlandais de « lire » sa lettre, en leur annonçant qu’il la signerait le jour de la Saint-Joseph.

Il en souligne le « style simple », l’« émotion », le caractère « concret ». Le pape, explique-t-il, s’exprime en termes « forts » comme son « effarement » devant la révélation des abus sexuels sur mineurs de la part de membres du clergé, sa « honte », ses « remords », des « actes criminels », et il ne masque pas sa réprobation devant la façon dont l’Eglise a parfois géré les cas en Irlande.

Surtout, dit le P. Lombardi, le pape s’adresse directement « aux victimes », puis « aux coupables » : Benoît XVI ne cherche pas « d’excuses » aux comportements, il est « honnête », « sincère ». Il dit les « responsabilités dans l’Eglise », conscient des « souffrances » endurées. Il ne cherche pas à expliquer la « problématique » « ailleurs », mais aborde les questions avec « vérité » et dit sa « douleur » pour les ravages faits par ces « crimes ».

Prise au sérieux des rapports

Le P. Lombardi a souligné combien le pape a « pris au sérieux » les deux rapports irlandais, Ryan et Murphy, dont on sent affleurer les remarques ici ou là dans la lettre. Benoît XVI, ajoute le P. Lombardi a « très bien reçu » le rapport Murphy dans toute son « analyse » et même ses accusations sur la « gestion inadéquate » des problèmes de la part de « l’autorité de l’Eglise locale ».

Rappelons que le « Murphy Commission Report », publié le 20 mai 2009 par le Département pour la justice du gouvernement irlandais, révèle que l’archidiocèse de Dublin et d’autres autorités de l’Eglise ont couvert des abus et maltraitances commis sur des enfants par des prêtres dans des établissements catholiques irlandais. L’archidiocèse de Dublin aurait ainsi dissimulé plus de 300 cas d’abus commis par plus de 40 prêtres sur une durée de près de 30 ans.

Discernement des candidats

Le directeur de la salle de presse du Saint-Siège relève aussi le « réalisme » de Benoît XVI qui voit dans l’étape présente « un pas » sur un « long chemin », un « long processus ». Des pas « positifs » ont été faits, mais « beaucoup plus reste à faire ».

Par ailleurs le pape rappelle l’histoire et la « dignité » de l’Eglise d’Irlande et le « bien » qu’elle a fait dans l’Eglise universelle :  il y voit une ressource, un point d’appui pour « retrouver » cette dignité, au service de tous.

Le pape aborde ensuite la question des « causes », dont des erreurs de discernement dans les séminaires ou les noviciats, et en cela, également, souligne le P. Lombardi, le pape accueille les remarques du rapport Murphy. Il fait état des « consultations », « rencontres », séances de travail qui ont précédé et accompagné la rédaction de cette lettre.

Le cœur de la lettre

Mais pour le P. Lombardi, le « cœur » de cette Lettre, ce sont les paragraphes 5 et 6 dans lesquels le pape s’adresse aux victimes. Il dit sa « douleur », il rappelle qu’il a déjà par le passé rencontré des victimes et qu’il est prêt à le refaire. Le P. Lombardi souligne à ce propos que, tant à Washington qu’à Sydney ou au Vatican, ces rencontres n’ont jamais été annoncées à l’avance et n’ont pas fait – et ne feront pas – l’objet d’une médiatisation.

Sur ces paragraphes, il n’y a « rien à ajouter », commente le P. Lombardi : c’est « intense », « fort », « précis ». Le pape évoque ceux qui se sont sentis « perdus » parce qu’après avoir eu le courage de parler, ils n’ont pas été écoutés : les rapports ont en effet mis en cause la gestion de la part des évêques. Personne n’est « venu les aider ». Là, le pape demande « humblement » que les Irlandais lisent ce qu’il dit.

Puis vient le passage où Benoît XVI s’adresse aux coupables (§ 7) : un des « points forts », où le pape leur demande de reconnaître leurs péchés (devant Dieu), leurs « crimes » (devant la justice), en vérité, et sans « désespérer ».

Coopération avec les autorités civiles

Le P. Lombardi attire aussi l’attention sur le § 11 intitulé « A mes frères évêques » et sur cette « claire attribution de responsabilité ». En effet, le pape reconnaît les « responsabilités des autorités ecclésiastiques », les « graves erreurs de jugement », une « reconnaissance franche, sans excuses ». Le pape leur demande deux choses, ainsi qu’aux supérieurs religieux :  le « respect des normes ecclésiastiques » et la « coopération avec les autorités civiles ».

Un point sur lequel le P. Lombardi insiste et qui serait peut-être passé plus inaperçu, c’est l’importance que le pape demande aux évêques de donner aux laïcs dans l’Eglise. Le P. Lombardi souligne le problème d’une « surévaluation du rôle du prêtre ».

Le jésuite italien a ensuite annoncé la décision de Benoît XVI de mettre en place une « visite apostolique », le « visiteur » étant chargé « d’enquêter sur le terrain pour l’Eglise » lorsque le « gouvernement local » n’est pas suffisant, c’est une « personne de confiance » dont le travail doit permettre d’envisager des « mesures ultérieures ». « Tout » est encore à préciser, ajoute-t-il, mais il est juste que l’Eglise puisse s’appuyer sur son propre rapport.

Il signale aussi les « initiatives pastorales » demandées par le pape, dont une « mission » destinées à qui a autorité dans l’Eglise, et la pénitence des vendredis.

Le P. Lombardi a également annoncé une page nouvelle du site du Vatican qui regroupe maintenant toutes les informations sur les cas de pédophilie et les textes du magistère à ce propos.

L’importance d’une « culture juridique »

Au cours de l’échange avec la presse, le P. Lombardi a souligné que certaines des « considérations » de cette lettre, prévue pour l’Irlande avant que d’autres cas soient signalés dans d’autres pays, pourront cependant être « utiles » aux autres.

Pour ce qui est des détails des procédures ecclésiastiques, qui ne font pas l’objet de cette lettre, il a renvoyé plusieurs fois à l’interview donné par le P. Charles Scicluna à ce sujet (cf. Zenit du 14 mars 2010) mais aussi à la déclaration du président de la conférence des évêques d’Allemagne, Mgr Robert Zollitsch (cf. Zenit du 12 mars 2010).

Et à la question : Croyez-vous que la lumière que fait l’Eglise sur ces scandales va inciter la société à lever le voile de ce « grave problème de société » de la pédophilie qui implique « à 80 ou 90 % des cas les familles » ? Le P. Lombardi répond, en insistant que le fait que l’Eglise ne veut « en aucun cas se décharger sur d’autres de ses responsabilités » et que les faits sont « d’autant plus graves que l’Eglise représente une autorité morale ».

A propos du paragraphe (§ 4) où Benoît XVI évoque « le programme de renouveau proposé par le Concile Vatican II », qui a parfois été « mal interprété », le P. Lombardi signale
une certaine « sous-évaluation du droit », le manque, au lendemain du concile d’une « culture juridique dans l’Eglise ».

Anita S. Bourdin

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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