Philippines : La campagne électorale élude les vrais problèmes

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Les évêques catholiques secouent la présidentielle

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ROME, Lundi 22 février 2010 (ZENIT.org) – Aux Philippines, les responsables de l’Eglise catholique déplorent que les candidats à l’élection présidentielle n’abordent pas les vrais problèmes du pays, rapporte « Eglises d’Asie » (EDA), l’agence des Missions étrangères de Paris (MEP).  

Que ce soit à l’occasion de rencontres œcuméniques ou lors de messages lus pour le mercredi des cendres, différents responsables de l’Eglise catholique ont déploré l’absence d’intérêt pour les véritables problèmes des Philippines dont font preuve les principaux candidats à l’élection présidentielle, qui aura lieu le 10 mai prochain.  

Mgr Deogracias Iniguez est l’évêque du diocèse de Kalookan, ville de la conurbation urbaine de Manille. Il est aussi le secrétaire de la « Plateforme œcuménique pour la paix aux Philippines » (PEPP), une initiative née en 2002 pour aider à faire émerger des solutions aux conflits qui émaillent la vie politique et sociale des Philippines et dans laquelle le gouvernement norvégien intervient comme facilitateur. Le 18 février, dans le sud philippin, à Davao City, où le PEPP tenait son congrès annuel, Mgr Iniguez a dénoncé l’indifférence du personnel politique philippin à la question de la paix dans le pays. « La paix devrait être le souci numéro un de la présidente », a-t-il affirmé, soulignant combien il était nécessaire que les divers conflits armés de plus ou moins basse intensité qui émaillent la vie des Philippins trouvent des réponses globales, impliquant tous les acteurs concernés, notamment sur le terrain.   

Plus directe dans son propos, Ofel Cantor, membre du secrétariat de la PEPP, a mis en cause les trois principaux candidats à l’élection présidentielle : le candidat de l’administration sortante, Gilbert Teodoro Jr., ainsi que ses deux grands rivaux, Benigno Aquino III et Manuel Villar Jr. « Ils sont venus à Davao ; ils ont rencontré les responsables des Eglises, mais ils se sont montrés plus intéressés à aller à la pêche aux voix qu’à se pencher sur l’élaboration d’un plan de paix », a-t-elle expliqué, précisant que lorsque les membres du PEPP ont demandé à être entendus par les candidats pour les interroger sur ce qu’ils avaient à dire au sujet des différents mouvements armés qui sont actifs dans le pays, notamment dans le sud philippin, la réponse fournie par les staffs de campagne des hommes politiques a été : « Ils n’ont pas le temps de vous parler à propos des programmes de paix ».  

La PEPP, dont la devise est : « L’audace de l’espérance », souhaiterait pourtant que le personnel politique apporte des réponses aux problèmes posés par ces mouvements, notamment l’insurrection communiste. Mgr Iniguez a précisé à l’agence Ucanews (1) que la question musulmane était loin d’être réglée mais qu’elle faisait l’objet de l’attention soutenue de Manille, le gouvernement ayant repris les négociations avec le MILF (Front moro de libération islamique). En revanche, la rébellion communiste, lancée en 1969 par la Nouvelle armée du peuple (NPA), branche armée du Parti communiste des Philippines (CPP), d’obédience maoïste, demeure active sans pour autant mobiliser l’attention du gouvernement. En 1986, la présidente Corazon Aquino avait initié des pourparlers, notamment avec le Front démocratique national (NDF), organisation liée au CPP. A plusieurs reprises, des évêques et des prêtres catholiques avaient servi de médiateurs dans les négociations et, en 1998, un accord avait même été passé au sujet des droits de l’homme, les deux parties s’engageant à les respecter dans les heurts armés les opposant. Malgré de nouveaux contacts en 2004 en vue de négocier des réformes socio-économiques, les pourparlers ont été rompus. Depuis 1969, on estime que les combats liés à l’insurrection communiste ont fait 40 000 morts.  

A Manille, à l’occasion du mercredi des cendres, le cardinal Gaudencio Rosales avait choisi de ne pas interpeller directement les responsables politiques du pays, mais, en cette période pré-électorale, le propos du message qu’il a rendu public était très certainement politique. Il a dénoncé le scandale de la faim aux Philippines. Citant le discours du pape Benoît XVI au Sommet mondial pour la sécurité alimentaire, à Rome en 2009, (« La faim est le signe le plus cruel et le plus concret de la pauvreté »), le cardinal a appelé les catholiques de son archidiocèse à jeûner pour contribuer à nourrir les enfants souffrant de dénutrition ou de malnutrition aux Philippines.  

Les études disponibles indiquent qu’au dernier trimestre de l’année 2009, un quart des foyers philippins ont connu la faim, à un moment ou à un autre. « Cela coûte 10 pesos (16 centimes d’euros) par jour ou 2 400 pesos (38 euros) par an de nourrir un enfant qui a faim », a déclaré le cardinal, qui a recommandé que les sommes épargnées par les catholiques durant le temps du Carême soient consacrées à l’alimentation des plus pauvres. « Nous vous demandons d’aider  Hapag-Asa (‘la table de l’espérance’) pour nourrir les enfants de nos paroisses qui ont faim ou sont mal nourris. » Hapag-Asa, créée en juillet 2005 par le cardinal Rosales et treize autres évêques philippins dans le but d’aider les plus pauvres à nourrir leurs enfants, a aidé 500 000 enfants ces quatre dernières années.  

(1)   Ucanews, 18 février 2010.  
 

©  Les dépêches d’Eglises d’Asie peuvent être reproduites, intégralement comme partiellement, à la seule condition de citer la source.

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ZENIT Staff

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