Œcuménisme : La « petite révolution » de Jean XXIII, par le card. Poupard

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Rencontre promue par Sant’Egidio : « Le courage d’un humanisme de paix »

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ROME, Vendredi 16 septembre 2005 (ZENIT.org) – Le cardinal Poupard a expliqué ses trois expériences en matière de promotion de l’unité des chrétiens, entre Catholiques et Orthodoxes, dans son intervention du 12 septembre (ci-dessous, texte intégral, dans les « Documents ») à Lyon, lors de la rencontre promue par Sant’Egidio : « Le courage d’un humanisme de paix » (cf. www.santegidio.org).

La « petite révolution » de Jean XXIII
« Jean XXIII a eu le génie, non seulement d’ouvrir les fenêtres du Vatican, comme il disait, pour faire entrer un peu d’air frais, mais aussi les portes, pour rencontrer les frères séparés. Au lendemain d’une de ses rencontres, de la confidence imagée de Jean XXIII. Il parlait volontiers de lui à la troisième personne, et répétait : « Giovanni, tu te rends compte, tu vas le recevoir, ce chef d’Eglise, et qu’est-ce que tu vas faire ? Tu as beau être le Pape. Tu ne peux quand même pas changer le Credo. Qu’est-ce que tu vas dire ? Et puis le Monseigneur a ouvert la porte. Qu’est-ce que je pouvais faire ? Nous nous sommes embrassés. Car avant d’être séparés, nous sommes frères ».

« C’est cela la petite révolution grammaticale de Jean XXIII, concluait le « ministre » de la Culture de Jean-Paul II. Dans l’expression séculaire « Frères séparés », le substantif reprenait le pas sur l’adjectif. Nous avions tellement conscience d’être séparés ! Nous avions oublié que nous étions frères. Le génie chrétien de Jean XXIII a été de nous faire redécouvrir qu’être frères est le premier et le plus important.

Une purification de la mémoire
Et d’expliquer : « Nous sommes frères, et dans toutes les familles nous avons des problèmes qui engendrent des brouilles et entraînent des séparations. Chacun a sa version plus ou moins légitime, et les mémoires ne coïncident pas. Il est donc nécessaire de pratiquer ce que les anciens grecs appelaient la catharsis, la purification de la mémoire ».

« Comme l’a dit le Pape Benoît XVI au début de son pontificat, continuait le cardinal français, les paroles, c’est bien, mais les gestes, c’est mieux. Les déclarations ont leur importance, mais les gestes y ajoutent une portée symbolique. Le 7 décembre 1965, veille de la clôture du Concile, Paul VI a levé la mémoire des excommunications et envoyé une délégation au Phanar, avec le Cardinal Joseph Martin, qui était Archevêque de Rouen. Que de fois celui-ci m’a ensuite répété : « Quelle grâce ! ». Rome reprenait le chemin de Constantinople, et Constantinople, le chemin de Rome. »

Pour le cardinal Poupard : « Cette rencontre libératrice était devenue possible, parce que chacun avait fait la moitié du chemin en allant à Jérusalem. Après deux millénaires, le successeur de Pierre, devenu Evêque de Rome, éprouvait le besoin de revenir aux origines de l’Eglise indivise, en Terre Sainte. Je garde toujours dans la mémoire du cœur la rencontre bouleversante entre Paul VI et le Patriarche Athénagoras à Jérusalem, l’un et l’autre anxieux du chemin à parcourir pour recomposer la pleine unité de l’Eglise du Christ, le Christ pour le monde, et le monde à Dieu ».

Le cardinal a ensuite évoqué son expérience en tant que recteur de l’Institut catholique de Paris. Il disait ensuite : « Et j’en viens à la troisième expérience, celle du Conseil Pontifical de la Culture, qui me donne de conjoindre les visites aux responsables, Moscou que j’évoquais à l’instant, Monseigneur Christodoulos à Athènes en 1998, le Patriarche Theoktist à Bucarest, en 2002, le Patriarche Bartolomeos au Phanar, en 2003, Son Eminence le Métropolite Filaret à Minsk, en décembre 2004 ».

Le cardinal résumait les leçons de ces trois expériences en ces termes :

« – La première, l’œcuménisme du cœur, pour moi demeure toujours première, non seulement chronologiquement, puisque c’est le Bienheureux Jean XXIII qui me l’a apprise voici quarante cinq ans : mieux se connaître, pour nous reconnaître frères.

« – La seconde, que j’ai pratiquée dans un cadre universitaire à Paris : nous connaître théologiquement, pour approfondir notre découverte de l’autre, et par là prendre conscience de notre identité propre de disciples du Christ.

« – La troisième, que je pratique depuis vingt cinq ans : le dialogue des cultures sous le signe du Christ. Au Symposium que j’avais organisé à la demande de Jean-Paul II en préparation du Synode des Evêques pour l’Europe, en 1999, j’avais choisi pour thème : « Le Christ, source d’une nouvelle culture pour l’Europe ». Et j’avais demandé à Ghelian Mikhaïlovith Prochorov, Professeur à l’Institut de Littérature russe et Membre de l’Académie des Sciences de Saint Pétersbourg de nous aider à « repenser la vie de l’homme dans la Cité ». Son intervention : « Pour nous, Européens, l’anamnèse du Christ, c’est l’anamnèse de l’éternité dans notre vie. Seule l’anamnèse du Christ est un antidote à la vision libérale-communiste ». Cette expression paradoxale en dit long, et nous fait réfléchir » (…).

Le cardinal Poupard concluait en disant : « C’est ma conviction : ce n’est plus le temps de disperser, mais de recueillir ».

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ZENIT Staff

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