Message du cardinal Walter Kasper prononcé aux obsèques de frère Roger

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ROME, Mardi 23 août 2005 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le message que le cardinal Walter Kasper, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’Unité des chrétiens, a prononcé au début de la messe de funérailles du fondateur et prieur de la Communauté de Taizé, le Frère Roger Schutz.

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Eminences, Excellences, Chers Frères de la Communauté de Taizé, Frères et Sœurs, Nous tous sommes sous l’impression de la mort de Frère Roger, un des grands maîtres spirituels et aussi père spirituel de notre temps. Mais tout de même notre deuil se transforme en espérance.

L’abandon à la volonté de Dieu et l’humble don de soi étaient devenus chez Frère Roger une source de paix intérieure, d’espérance et même de bonheur. Qui aurait pensé que cet humble don de soi allait un jour se conclure dans de telles circonstances ? Et pourtant, même et surtout en ce moment, nous pouvons redire les paroles que Frère Roger aimait répéter : « Toi qui nous aimes, ton pardon et ta présence en nous font naître la clarté de la louange ».

Par le témoignage de ses amis et de ses serviteurs, Dieu ne cesse de conduire son Église et de lui préparer un avenir. Par sa présence, sa parole et son exemple, Frère Roger a porté un rayonnement d’amour et d’espérance autour de lui, bien au-delà des frontières et des divisions de ce monde. Homme de communion, il nourrissait en son cœur et en sa prière un profond désir de réconciliation et de rencontre. Avec les Frères de communauté de Taizé, il voulait déposer un ferment d’unité dans l’Église et dans le monde.

La première fracture qui faisait mal à Frère Roger touchait les divisions entre chrétiens. Depuis sa jeunesse, il s’est uni à la prière du Christ ‘‘que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi’’ (Jean 17,21). Il voulait vivre la foi de l’Église indivise, sans rompre avec quiconque, dans une grande fraternité. Il croyait avant tout à l’œcuménisme de la sainteté, cette sainteté qui change le fond de l’âme et qui seule conduit vers la pleine communion.

Oui : le printemps de l’œcuménisme a fleuri sur la colline de Taizé, dans cette Église de la Réconciliation, où des membres de différentes traditions chrétiennes se rencontrent dans le respect et le dialogue, dans la prière et le partage fraternel, inspirés par la présence et par l’exemple de Frère Roger.

La deuxième fracture qui faisait mal à Frère Roger touchait la division entre peuples et nations, entre pays riches et pays pauvres. Toute forme d’injustice ou d’abandon l’attristait profondément. Il voulait que des Frères de la communauté aillent vivre en plusieurs pays avec les plus pauvres, en petites fraternités, comme un simple signe d’amour et de communion. Ce simple témoignage lui était très cher, comme une prophétie en miniature du Royaume de Dieu, comme un germe d’amitié et de réconciliation dans un monde harcelé par l’indifférence. Pour Frère Roger, il y avait pleine continuité entre l’amour de Dieu et l’amour des hommes, entre la prière et l’engagement, entre l’action et la contemplation. Frère Roger était un contemplatif, un homme de prière, que le Seigneur avait appelé au silence et à la solitude de la vie monastique. Pourtant il a voulu ouvrir son cœur de moine et la communauté de Taizé aux jeunes du monde entier, à leur recherche et à leur espérance, à leur joie et à leur souffrance, à leur cheminement dans la vie et dans la foi.

Voici les dernières lignes de son dernier livre, publié il y a un mois seulement : « Pour ma part, j’irais jusqu’au bout du monde, si je le pouvais, pour dire et redire ma confiance dans les jeunes générations ». Plus qu’un guide ou un maître spirituel, Frère Roger a été pour beaucoup comme un père, comme un reflet du Père éternel et de l’universalité de son amour. En ce moment, nous ne sommes pas réunis dans cette église pour raconter une vie, mais pour louer et prier Dieu. Reconnaissants pour tout ce que l’Église du Christ et l’humanité ont reçu de la vie de Frère Roger et de son témoignage, nous le confions aujourd’hui à l’amour éternel de Dieu.

Seigneur, donne à ton serviteur de voir « le ciel ouvert et Jésus debout à la droite du Père » (Actes 7 ; 55), ce Jésus qu’il a tant aimé et cherché pendant toute sa vie. Donne-lui, dans le Saint-Esprit, d’entrer dans la communion des saints et la liturgie parfaite du ciel, cette communion en Dieu dans laquelle chaque jour il a désiré vivre, chanter et prier. Donne-lui de contempler le visage du Père éternel dans toute sa beauté, ce visage dans lequel tout regard d’amour trouve son accomplissement et sur lequel brille la vie sans fin, et donne-nous la grâce de continuer selon son exemple et avec espérance sur la voie de la réconciliation, de la communion et de la paix, comme anticipation de ton Royaume éternel.

[Texte original en français distribué par la Communauté de Taizé]

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ZENIT Staff

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