Madagascar : "Ne vendez pas la patrie"

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Message des évêques aux gouvernants

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« Ne foulez pas aux pieds la souveraineté nationale. Ne vendez pas la patrie », écrivent les évêques de Madagascar aux candidats aux hommes politiques, en les exhortant à avoir « toujours le souci du bien commun ».

A l’issue de l’Assemblée générale des évêques pour la clôture de l’Année de la foi et le Jubilé du 75ème anniversaire de la Traduction de la Bible catholique Malagasy, les évêques publient un message à la Nation.

Ils évoquent notamment le deuxième tour des élections présidentielles, qui auront lieu le 20 décembre prochain et s’adressent aux candidats.

« N’utilisez pas le peuple comme de simples moyens pour accéder à des postes. Parvenus à vos aspirations, le peuple devient le dernier de vos soucis », dénoncent les évêques, qui encouragent à « lutter contre l’esprit d’exclusion et d’indifférence », « assainir le monde de la justice et de la sécurité civile », « protéger les richesses nationales et voir comment les distribuer selon la justice ».  

Message des évêques

“Seigneur!… Tu as les Paroles de la vie éternelle.” Jn. 6,68

La Paix du Seigneur soit avec vous.

Nous arrivons au terme de l’année de la foi et nous célébrons aussi, le 75ème anniversaire de la Bible Catholique. Rendons grâce à Dieu pour tant de grâces. Le pape François ne cesse de nous exhorter et de nous accompagner pour une nouvelle vie, avec comme priorité la famille et l’éducation des jeunes en vue de la construction d’une Eglise pauvre pour les pauvres et pour tous les hommes. Nous, évêques, sommes fiers  et reconnaissants pour les efforts consentis par beaucoup de militants, pour résister aux épreuves et aux tentations de la vie quotidienne et de la foi. Continuons avec courage à suivre le bon chemin en écoutant toujours l’appel de Dieu à faire Sa volonté.

Parmi les événements qui ont marqué la vie de la Nation, il y a eu les élections… Les efforts que nous avons accomplis pour leur réalisation sont louables et portent espoir pour l’avenir.

L’environnement actuel

•             Les écarts entre les niveaux de vie dans le monde ne cessent de s’accroître. Les riches et leurs complices adorent de nouveau le veau d’or, souligne le pape François. On est abasourdi par les assassinats et le terrorisme qui se multiplient partout.

•             Ces phénomènes se sont manifestés aussi chez nous d’une façon particulière durant ce premier tour de l’élection présidentielle. A cause du pouvoir de l’argent et des richesses, durant les campagnes, ont abondé hélas les calomnies, les exclusions tribalistes et l’achat des votes a connu une grande ampleur. Les gens pauvres de la campagne étaient effarés devant cette affluence démesurée de voitures de belles et puissantes 4X4, les déploiements d’hélicoptères et de multiples appareils sophistiqués …. Devant tout cela, plus d’un a souligné que l’argent existait bel et bien mais  n’a pas été utilisé pour le bien de la population !

•             Le peuple est divisé en deux catégories : les riches et les démunis sombrant dans l’extrême pauvreté. L’insécurité se développe et le peuple n’est plus protégé, on va donc vers un Etat de non droit et vers un Etat où seuls les plus forts ont le droit avec eux.

Et pourquoi en sommes-nous arrivés là ?

•             Certes, la mondialisation s’impose de façon inévitable. Et la mise en place de la « théorie du genre » un peu partout chez nous est plus qu’inquiétante. On prône l’égalité mais c’est l’essence même de la personne humaine, créature faite à l’image de Dieu qu’on veut proscrire. C’est la vie morale qui est dégradée jusqu’à vouloir éliminer la vie.

•             On a foulé aux pieds les valeurs Malgaches en niant le vrai « fihavanana », qui se fonde sur l’histoire de la Nation, de la culture et de l’économie et on en vient au fait que l’argent règne partout, jusqu’ à ce que l’on en arrive à des trafics d’organes et d’ossements.

•             Beaucoup s’accrochent au pouvoir et n’acceptent pas  l’alternance. Au lieu de servir le pays pour la paix, on se partage la patrie en l’exploitant au maximum. Tous les moyens sont bons et on vient à utiliser même la religion pour accéder à un poste politique.

•             De plus, il est bon de noter aussi l’attitude très ambigüe de la Communauté Internationale qui profite de notre faiblesse : notre « fihavanana » n’est qu’une réalité détériorée, aussi n’est-il plus possible entre malagasy de se concerter dans le dialogue  fraternel pour résoudre les problèmes… « Cherchez à vivre en paix, occupez-vous de vos œuvres, travaillez de vos mains… » (I Thes 4, 11)

Malgré tout, nous aspirons à une vie nouvelle car sinon nous aboutirons à un suicide collectif et nous détruirons notre patrie si nous laissons continuer cette situation.

Nous nous tournons vers vous, candidats à tous les niveaux : Présidents, députés….

•             Ne foulez pas aux pieds la souveraineté nationale. Ne vendez pas la patrie. Que le vrai « fihavanana » soit votre premier souci.

•             Oui, ayez toujours le souci du bien commun. N’utilisez pas le peuple comme de simples moyens pour accéder à des postes. Parvenus à vos aspirations, le peuple devient le dernier de vos soucis. Souvent oubliant les différentes promesses, vous ne pensez qu’à vos proches, aux membres de votre parti ou de leur famille ou de votre région. Ce sont ces derniers qui tirent tous les profits.

•             Parmi les priorités des priorités : guérir les diverses blessures causées par les différentes crises successives ». Vous devez mettre en place de façon urgente l’état de droit, unique source de paix et de développement dans la justice. Par votre exemple surtout, vous devez lutter contre l’esprit d’exclusion et d’indifférence. Votre premier devoir est d’éduquer le peuple à la responsabilité citoyenne.

•             Pour que la confiance revienne, Il est urgent également d’assainir le monde de la justice et de la sécurité civile.

•             C’est votre obligation de protéger les richesses nationales et voir comment les distribuer selon la justice pour faire épanouir l’homme et tout homme, afin que le peuple malagasy puisse vivre dans la paix.

Nous  sommes avec vous et nous nous tournons vers vous, Peuple Malagasy, vous qui avez le vrai pouvoir :

•             Sachons qu’il y a une vraie reconstruction de la nation et nous devons arriver à mettre en place le véritable fihavanana fondé sur un amour vrai et sans hypocrisie. Les us et coutumes sont multiples (dialectes, proverbes, us…) mais ces différences sont de véritables richesses si nous savons les respecter et nous en servir pour détruire l’exclusion.

•             Ayons l’audace de défendre et de respecter la vie et la vérité en ne nous laissant pas entraîner dans les mouvements irréfléchis comme le tribunal populaire, le vandalisme et la corruption. Nous avons le devoir de protéger et de bien soigner l’environnement qui est bien abîmé, nous le constatons et nous en subissons dans notre vie quotidienne les conséquences néfastes. Regardons autour de nous et dans plusieurs régions : la saison de pluie n’est plus stable… les abeilles et les petits insectes générateurs ont disparu. Cela a déséquilibré la nature.

“C’est le jour de conversion ….”.

Nous avons un devoir impérieux à remplir : donnons-nous la main pour bâtir l’avenir. Ne nous laissons pas séduire par ce qui est éphémère et ne rejetons pas la sagesse des Anc
êtres ; ne soyons pas émerveillés par les publicités, qui pourraient nous éloigner de la foi. Continuons toujours la prière pour la Paix.

Nous allons célébrer le Christ-Roi et nous allons clôturer l’Année de la Foi. Tout au long de cette année de grâce, les temps de conversion, d’approfondissement, de célébration et de manifestation que nous avons vécus étaient à la fois, appel et envoi. Les papes Jean XXIII (Concile Vatican II) et Jean Paul II (Catéchisme de l’Eglise Catholique et JMJ) qui vont être canonisés le 27 Avril 2014 sont des dons de Dieu pour nous. Réveillons en nous les saints héritages reçus à travers leurs exhortations sur la famille et envers les jeunes pour qu’ils soient audacieux à accueillir Jésus ami fidèle qui conduit à la vraie vie. Nous allons cheminer ensemble pour participer dès maintenant à tous les approfondissements à partir du questionnaire préparatoire (lineamenta)  au prochain synode extraordinaire sur la famille. Ne nous laissons pas diviser, mais faisons nôtre de nouveau au fond de notre cœur cette parole de St Pierre et qu’ensemble nous avancions encore plus : “Seigneur!… Tu as les Paroles de la vie éternelle”. (Jn 6,68).

Nous vous bénissons.

Antananarivo le 17 novembre 2013

Célébration du 75ème anniversaire de la Bible Catholique.

Clôture de l’Année de la Foi.

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ZENIT Staff

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