Lucien Botovasoa, père de famille, instituteur et bienheureux ? (III et fin)

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Du martyre à Africae Munus, par Mgr Benjamin Ramaroson

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Propos recueillis par Anita Bourdin

ROME, vendredi 8 juin 2012 (ZENIT.org) –  « Roi, tu mourras chrétien ; ce sera très dur pour toi, mais ne crains pas, je serai là à côté de toi et tu seras baptisé » : une prophétie faite au roi malgache Tsimihono par Lucien Botovasoa (1908-1947), père de famille, « martyr de la foi et de la charité » dont le procès diocésain pourrait être clos à la fin de l’année. Il était Tertiaire franciscain.

Mgr Benjamin Ramaroson, évêque de Farafangana, à Madagascar, évoque pour les lecteurs de Zenit ce fils de sa terre. Voici la troisième et dernière partie de notre entretien avec l’évêque malgache.

Zenit – Excellence, quel sont les témoins de la vie du futur bienheureux encore en vie aujourd’hui?

Mgr Benjamin Ramaroson – De sa famille, il y a encore son frère André Mahazo et sa sœur qui sont encore vivant, de ses enfants également. Il y a aussi ces anciens très nombreux qui ont voulu témoigner des vertus de leur maître. En tout il y a plus de 40 personnes qui ont connu le Serviteur qui sont encore vivantes mais comme elles étaient trop jeunes au moment des évènements, elles se souviennent très peu du martyr mais de l’homme voici ce qu’on peut retenir de leur déclaration :  tous trouvent en lui à la fois un témoin de la réconciliation et de ce fait toujours proche de ceux qui luttent pour la justice et la paix, , et un maître qui fait entrer, par la foi, dans le mystère de Dieu, et conduit à la sainteté dans la vie de famille à travers l’oraison, la pénitence, l’apostolat, les mouvements catholiques…

Sa figure ne cesse d’attirer de nouveaux fidèles : ce sont eux qui demandent la béatification ?

Ayant su l’histoire édifiante de Lucien Botovasoa qui tout de suite après son martyre a dépassé les frontières du diocèse. Le Premier Evêque, Mgr Camille Chilouet a demandé au P. Louis Deguise de commencer les études sur la brève vie du Serviteur de Dieu. Malheureusement le décès rapide de Mgr Chilouet n’a pas permis au Père d’approfondir ses investigations. Ensuite le contexte du martyre de Lucien Botovasoa n’a pas poussé ses successeurs à continuer. En effet parler de la rébellion de 1947 a été, pendant des années, un sujet « tabou ». Par contre, sans que je le demande, beaucoup de circonstances se sont précipitées et ont contribué pour ne pas dire m’ont poussé à reprendre le processus. En tout cas tout cela est providentiel en cette année où le diocèse entre dans son deuxième cinquantenaire. L’image de Lucien Botovasoa est vraiment édifiante, pour chaque baptisé, prêtres, consacrés, laïcs…. C’est pour cela que le diocèse n’a pas hésité de donner le nom du Centre de formation des catéchistes – le Centre polyvalent Lucien Botovasoa –  dans le but de donner aux catéchistes un modèle dans leur vocation et dans leur mission de « sel et lumière dans le monde »

Ce qui est merveilleux dans tout cela c’est que le lieu de la mise à mort presque tout suite après le martyre de Lucien fut acquis par sa famille, protégé et entretenu. Une procession descendait de l’église chaque année au 1ernovembre pour y prier à sa mémoire, jusqu’à ces dernières années. Ce lieu est unique en son genre : aucune autre des 260 victimes de l’insurrection de Vohipeno ne reçoit cet honneur. Lui seul fut tué à cet endroit et la mémoire collective a conservé la trace du lieu exact de sa décapitation : à égale distance entre les deux arbres qui se trouvaient là. Une petite croix de bois y fut plantée depuis les origines et a été remplacée régulièrement. Elle était et est toujours entourée d’un enclos fait d’une plante sacrée nommée hasina (littéralement : sainteté), qui sert dans les rituels malgaches à donner les bénédictions.

Pourquoi une chapelle ?

En 2010, les chefs des maisons claniques demandent qu’on bâtisse une chapelle sur le lieu du martyre. Ils souhaitent que le lieu devienne un lieu de réconciliation et de communion. Beaucoup de pèlerins affluent et prient en ce lieu

Comment avance la cause de béatification où en est-elle ? Quelles sont les prochaines étapes ?

Pour nous ce qui nous fait rendre grâce est que les vertus du Serviteur de Dieu sont connues partout à travers l’île et maintenant à l’étranger. Beaucoup demandent des livres pour le connaître un peu plus. C’est l’étape principale pour nous. La Conférence à travers la lettre de son Président nous encourage à aller de l’avant. Maintenant l’étape est presque finie. Comme l’Instruction Sanctorum Mater it de la Congrégation pour les causes des saints rappelle, l’étape diocésaine est très importante dans toutes les démarches, nous ne sommes pas pressés conclure. Ce sera vers la fin de l’année. Nous profitons aussi de l’année de la foi car Lucien est martyr de la foi et de la charité.

Comment les bienheureux peuvent aider à célébrer cette année de la foi ?

Sans savoir que cette année débute l’année de la foi avec la célébration du jubilé d’or du commencement du Concile, avec l’ouverture du procès diocésain de la cause du Serviteur de Dieu, nous cheminons vers un synode dont le thème est : « Je suis Chrétien… Quel  en est le sens dans la vie quotidienne » ? La vie de Lucien Martyr de la Foi et de la Charité sera prise comme modèle. Ce sera aussi alors l’occasion de mieux connaître les autres bienheureux notamment Victoire Rasoamanrivo. Il ne faut pas oublier aussi Jacques Berthieu qui va être canonisé le 21 octobre prochain pendant le synode sur la « nouvelle évangélisation ».

Vous avez participé au synode pour l’Afrique. Quel lien voyez vous entre la vie de Lucien et l’exhortation apostolique de Benoît XVI, qui a recueilli les travaux des évêques : « Africae Munus » ?

Vu la situation en Afrique et plus particulièrement à Madagascar, Lucien Botovasoa peut être considéré comme parmi les témoins et modèles dont relève deux fois le Pape aux n° 34 : « Pour réussir une véritable réconciliation, et mettre en œuvre la spiritualité de communion par la réconciliation, l’Église a besoin de témoins qui soient profondément enracinés dans le Christ et qui se nourrissent de sa Parole et des sacrements. Ainsi, tendus vers la sainteté, ces témoins sont capables de s’investir dans l’œuvre de communion de la Famille de Dieu en communiquant au monde, au besoin jusqu’au martyre, l’esprit de réconciliation, de justice et de paix, à l’exemple du Christ » et au n° 158 : Pour de telles célébrations, il sera utile de suivre le conseil des Pères synodaux : « Que la mémoire des grands témoins qui ont donné leur vie au service de l’Évangile et du bien commun ou pour la défense de la vérité et des droits humains soit gardée et fidèlement rappelée ». À cet égard, les saints sont les véritables étoiles de notre vie, eux « qui ont su vivre dans la droiture. Ils sont des lumières d’espérance. Certes, Jésus-Christ est la lumière par antonomase, le soleil qui se lève sur toutes les ténèbres de l’histoire. Mais pour arriver jusqu’à lui nous avons besoin aussi de lumières proches – de personnes qui donnent une lumière en la tirant de sa lumière et qui offrent ainsi une orientation pour notre traversée »

(Les deux premiers volets de cet entretien ont été publiés les mercredi 6 et jeudi 7 juin 2012.)

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ZENIT Staff

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