Vitrail © Centre spirituel Manrèse

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Lettre du pape François aux jeunes : «Ce qui te rendra heureux»

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Entretien avec Mme Elisabeth Moreau de Saint-Martin

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Mariée, mère et grand mère, Mme Elisabeth Moreau de Saint-Martin accompagne depuis de nombreuses années des retraites au Centre Spirituel jésuite de Manrèse, près de Paris (France). A son programme par exemple, parmi une variété de possibilités, une retraite de « choix de vie » prévue pour discerner sa vocation.
Elle est particulièrement bien placée pour évoquer les chapitres 8 et 9 du document « Christus vivit », la lettre du pape François aux jeunes du monde, qui noue la gerbe du synode des évêques d’octobre 2018 sur « les jeunes, la foi et le discernement des vocations ». Il y est justement question de « vocation » et de « discernement », de ce qui « te rendra heureux ».
Dans sa lettre aux jeunes, le pape François consacre le chapitre 8 à la vocation et le chapitre 9 au discernement nécessaire pour identifier sa vocation personnelle. Qu’est-ce que le pape appelle « vocation » au sens large ?
Il est normal que les jeunes cherchent leur place dans la vie. Le pape, bien sûr, situe cette recherche dans la relation à Dieu, au Christ Jésus. Il appelle vocation l’appel que Dieu fait à chaque être humain, appel à la vie, appel à l’amitié avec lui, appel à la sainteté. « L’homme est créé pour louer, respecter et servir Dieu » disait S. Ignace de Loyola.
Le pape s’arrête plus longuement sur l’appel de Dieu à l’amitié avec lui. C’est « ce que Jésus désire de chaque jeune » avant tout . Découvrir qu’on est aimé de Dieu et l’accepter est le premier pas, un pas fondamental. C’est accepter d’entrer dans une « histoire d’amour ». Laisser cette histoire « se tisser avec nos histoires » nous permettra de grandir dans cette amitié.
Voilà la vocation fondamentale, l’ancrage de tout le reste.
Le pape parle d’être « pour les autres ». Qu’est-ce que cela signifie ?
Il précise au fur et à mesure sa pensée.
Appelés à entrer dans une histoire d’amour avec Dieu, nous devenons capables d’entendre un autre appel du Seigneur : « entrer dans son œuvre créatrice », c’est-à-dire « apporter notre contribution au bien commun », chacun « à partir des capacités que nous avons reçues ». Cela a à voir avec le service des autres et cela fait intégralement partie de nous-même. Cela concerne ce que nous avons à faire mais aussi le sens que nous lui donnons. Il ne s’agit pas seulement d’une somme d’actions mais ce qui nous permet d’utiliser tout ce que nous sommes, de grandir, de ce qui correspond à ce que nous sommes, de donner « sens, orientation » à toute notre vie, pour Dieu, pour les autres et pour nous-même: « cela fera fleurir notre être » comme dit le pape.
Cela se réalise le plus souvent en fondant une famille et par le travail professionnel, et le pape développe ces deux thèmes, mais il demande de ne pas exclure d’emblée la possibilité du sacerdoce ou de la vie religieuse. Si Dieu y appelle quelqu’un, il l’y comblera. Or « la rapidité et l’anxiété de nombreuses stimulations aujourd’hui » risquent de nous faire passer à côté, car il y a peu de place pour le silence intérieur où on regarde Jésus et on l’écoute. Réfléchir, prier, mieux regarder le monde permet de reconnaître sa vocation, quelle qu’elle soit. Sans silence et solitude, on ne peut trouver le fond de soi-même où parle notre vrai désir.
Pour reconnaître notre vocation, il est nécessaire de « discerner » : c’est le sujet du chapitre 9…
Dans tout ce qui survient, le discernement « inclut la raison et la prudence, et les dépasse parce qu’il s’agit d’entrevoir le mystère du projet unique et inimitable que Dieu a pour chacun. » Pour cela, il faut apprendre peu à peu à « reconnaître l’oeuvre de Dieu » dans ma vie et dans la vie.
Rechercher ce « sens de mon existence que Dieu connaît mieux que moi » suppose « que ma vie soit orientée vers Dieu. »
Discerner pour reconnaître sa vocation suppose « des espaces de solitude et de silence parce qu’il s’agit d’une décision très personnelle que d’autres ne peuvent pas prendre pour quelqu’un ». Il faut « le silence de la prière attentive ». Ce silence « n’est pas isolement », car il s’agit « d’écouter le Seigneur, les autres et la réalité ». Comment s’unifie ma vie à l’écoute, à la fois, de Dieu, des autres et du monde, c’est cela qui me rendra heureux. Il est nécessaire d’écouter « et de renoncer à son point de vue partiel » : « l’appel de Dieu brise des sécurités mais il conduit à une vie meilleure. »
Discerner suppose de se poser quelles questions ?
Le pape François dit de ne pas commencer par se demander où l’on gagnerait plus d’argent, ou plus de notoriété, ou se demander par quel moyen on pourra faire plus plaisir à quelqu’un. Ce ne sont pas les bonnes questions. Il faut changer d’attitude et se demander : « Est-ce que je me connais moi-même ? (…) Est-ce que je sais ce qui rend mon cœur heureux ou triste ? Quelles sont mes forces et mes faiblesse ? » Alors arrivent d’autres questions: comment puis-je servir, être utile ? Qu’est-ce que je pourrais offrir à la société ? Puis, de façon réaliste, je me demande si j’ai les capacités pour ce service ou si je pourrais les développer…
Mais tout cela non par rapport à moi-même : me demander « Pour qui suis-je ? »
Le discernement suppose donc tout un travail sur soi-même, dans le réalisme du contexte dans lequel on est.
Reconnaître que nous cherchons à répondre à l’appel d’un Ami, Jésus. Cet ami nous offre un cadeau qui « te fera vivre ta vie à plein et te transformera en une personne utile pour les autres. » « Ce sera sûrement quelque chose qui te réjouira au plus profond de toi. Non parce que c’est un charisme rare mais parce qu’il sera à ta juste mesure, à la mesure de ta vie entière. »
« Ce sera un don exigeant (…) et pour en profiter, tu dois mettre beaucoup en jeu, tu dois risquer. » Mais cela fera grandir. Le pape prévient que ce ne sera pas facile mais pris dans « une amitié qui jamais ne se brise. »
Pour pouvoir discerner, on a besoin d’être écouté par quelqu’un formé à cela, quelqu’un qui nous aide à entendre vers quoi « incline notre coeur ». Des personnes, prêtres, religieux, laïcs, sont formés pour cela, pour aider à prendre les moyens de discerner sa vocation, quelle qu’elle soit.
La date de publication est-elle importante ?
Très discrètement, juste par le lieu et la date de la signature de cette lettre, le Pape François renvoie à Marie, Marie de l’Annonciation à qui fut adressé un appel et qui a su répondre « oui ».
 
 
 
 
 
 

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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