Les embryons congelés ? Pas d’issue « morale », déplore le Vatican

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Position de l’Instruction « Dignitatis personae » à ce sujet

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ROME, Vendredi 12 décembre 2008 (ZENIT.org) – Il n’y a pas «  d’issue « morale » à la question des embryons congelés, déplore le Vatican, qui pour cette raison s’est toujours opposé à la congélation des embryons humains.

« La cryoconservation est incompatible avec le respect dû aux embryons humains » réaffirme le document Dignitas personae (DP) sur des questions de bioéthique, publié ce vendredi par la Congrégation vaticane pour la doctrine de la foi.

Jean-Paul II avait demandé aux médecins de renoncer à cette pratique qui revient à commettre « l’irréparable ».

Et pour cette raison le Vatican ne peut rien « conseiller » ni la destruction, la décongélation, ni « l’adoption » avec réimplantation, etc.

A ce sujet, la conférence de presse de présentation de l’Instruction « La dignité de la personne » (DP), au Vatican ce matin a apporté un éclairage à plusieurs voix.

L’adoption, exclue

Mgr Luis Ladaria, secrétaire de la Congrégation pour la doctrine de la foi a fait observer à propos d’une éventuelle « adoption » que de fait on arrive à une fécondation qui n’est plus « naturelle ». Ce qui manque pour que l’acte soit bon moralement c’est « la relation du couple, du mariage », et cela ne peut donc être « admis ».

Cette solution ne respecte donc pas le principe énoncé par l’Instruction, à savoir : « Le mariage et la famille constituent le contexte authentique où la vie humaine trouve son origine. En son sein, la vie provient d’un acte qui exprime l’amour réciproque entre l’homme et la femme. Une procréation réellement responsable vis-à-vis de l’enfant qui va naître doit être le fruit du mariage » (§ 6). Pourtant, Mgr Ladaria admet que « la discussion reste ouverte ».

Pour le prof. Maria Luisa Di Pietro, professeur associé de bioéthique à l’université du Sacré Cœur, à Rome, et présidente de l’Association « Scienza & Vita », en effet « le débat reste ouvert ». Mais elle ajoute que la discussion devra s’inspirer des principes énoncés par l’Instruction.

Congélation, décongélation, survie

De plus, du point de vue scientifique, elle fait observer que pour qu’il y ait « adoption prénatale » des embryons humains surnuméraires congelés, il faut qu’ils survivent à cette congélation. Or, on obtient seulement une fourchette entre 50% et 80% de survie. Deuxième étape : il faut que les embryons survivent aussi à la décongélation, or, entre  20% et  50% ne survivent pas. Enfin, fait-elle observer, la décongélation opère des dommages dans l’embryon.

« Je doute, dit-elle qu’une femme accepte l’implantation d’un embryon » dans ces conditions. De plus, cela induirait, fait-elle observer, « une course à la sélection, ajoutant une injustice à l’injustice ».

C’est, souligne-t-elle, « un des motifs qui dicte la prudence » et fait que la congrégation s’exprime de façon négative à ce sujet.

Que dit donc le document ? Au n.18, on explique comment on en vient à la congélation d’embryons humains : « Une des méthodes utilisées pour améliorer le taux de réussite des techniques de procréation in vitro est la multiplication du nombre de traitements successifs ».

Le mécanisme qui conduit à la congélation

Or, « pour ne pas répéter les prélèvements d’ovocytes chez la femme, on opère un prélèvement unique de nombreux ovocytes que l’on féconde in vitro, et l’on conserve congelés une partie importante des embryons ainsi obtenus, en prévision d’un deuxième cycle de traitement, en cas d’échec du premier essai, ou pour les cas où les parents désireraient une autre grossesse ».

Et de préciser : « Parfois, on procède aussi à la congélation des embryons destinés au premier transfert, car la stimulation hormonale du cycle féminin produit des effets qui amènent à attendre la normalisation des conditions physiologiques avant de procéder au transfert des embryons dans l’utérus ».

La congrégation affirme sans ambages : « La cryoconservation est incompatible avec le respect dû aux embryons humains » et cette affirmation est motivée.

Tout d’abord, à la fois parce que la « cryoconservation » (conservation par le froid), c’est-à-dire une technique de refroidissement à de très basses températures dans le but d’obtenir une longue conservation, « présuppose » la production d’embryons « in vitro », et parce qu’elle expose les embryons « à de graves dangers de mort ou à des altérations de leur intégrité physique, ainsi que le montre le pourcentage élevé qui ne survit pas à la technique de congélation et de décongélation ».

Nous venons de citer les pourcentages donnés par Mme Di Pietro auxquels la congrégation fait allusion.

De plus, ajoute l’Instruction romaine, la « cryoconservation » prive les embryons, « au moins temporairement, de l’accueil maternel et du développement dans la gestation et les place dans une situation qui les expose à des atteintes et manipulations ultérieures ».

Le désir de réparer une injustice

L’Instruction constate par ailleurs que « la majorité des embryons non utilisés demeurent « orphelins » : les parents ne les réclament pas, et parfois on perd la trace de ces parents ».

D’où, « l’existence des banques de plusieurs milliers d’embryons congelés dans presque tous les pays où est pratiquée la fécondation in vitro ».

C’est alors que « l’on se demande ce qu’il faut en faire ». La congrégation analyse les différentes attitudes.

« Certains, fait observer l’instruction, se posent cette question, sans en saisir la portée éthique, motivés uniquement par la nécessité de respecter la loi qui exige après un certain temps de vider les centres de cryoconservation de ces embryons, en attendant de les remplir à nouveau ».

« D’autres au contraire, conscients de la grave injustice commise, se demandent comment répondre au devoir de réparer cette injustice », constate l’instruction.

Tout d’abord, pour ce qui est d’une attitude utilitariste, « les propositions d’utiliser ces embryons pour la recherche ou de les destiner à des fins thérapeutiques sont clairement inacceptables, parce qu’on les utilise comme un simple ‘matériel biologique’ ce qui implique leur destruction ».

Ensuite, « la proposition de décongeler ces embryons et, sans les réactiver, les utiliser pour la recherche comme si c’étaient de simples cadavres, est aussi inadmissible en raison d’un problème insurmontable du point de vue de la coopération au mal et du scandale », affirme le texte.

Une troisième suggestion est également inacceptable pour le document : « De même, la proposition de mettre ces embryons à la disposition pour des couples infertiles, comme ‘thérapie de l’infertilité’ n’est pas acceptable du point de vue éthique pour les mêmes raisons que celles qui rendent illicites tant la procréation artificielle hétérologue que toutes les formes de maternité de substitution. Cette pratique comporterait de plus plusieurs autres problèmes sur le plan médical, psychologique et juridique ».

L’irréparable

Mais alors, pourquoi pas l’« adoption prénatale » ? « Cette solution, louable dans ses intentions pour que soit respectée et défendue la vie humaine, présente cependant un certain nombre de problèmes qui ne diffèrent pas de ceux qui ont déjà été énumérés plus haut », répond l’Instruction.

Le diagnostic moral tombe : « l’irréparable » a été commis et l’on n’entrevoit « aucune issue moralement licite ».

« En définitive, explique l’instruction, il faut constater que les milliers d’embryons en état d’abandon tradui
sent une situation d’injustice qui est, de fait, irréparable. C’est pourquoi Jean-Paul II a lancé un appel à la conscience des responsables du monde scientifique et de façon particulière aux médecins pour que soit arrêtée la production d’embryons humains, en tenant compte du fait que l’on n’aperçoit aucune issue moralement licite pour le destin humain des milliers et des milliers d’embryons ‘congelés’, qui sont et restent toujours les détenteurs des droits essentiels, et qu’il faut donc sauvegarder juridiquement comme des personnes humaines » (Discours de Jean-Paul II, 24 mai 1996).

« Mais que conseillez-vous ? » a insisté un journaliste lors de la conférence de presse de présentation du document. Mgr Sgreccia, président émérite de l’Académie pontificale pour la Vie, a affirmé que « la congélation ne doit pas être faite ».

Il a réaffirmé que l’existence des embryons congelés constitue « un des faits qui n’ont pas de remède », et donc il faut s’abstenir de « commettre une autre erreur tout de suite », c’est « pire qu’une voie sans issue », les seules choses que l’on entrevoit sont « illicites », que ce soit la réimplantation dans des utérus différents ou leur suppression, etc : « autant de choses à condamner ». « Pour faire une bonne œuvre – en sauver un – on ne peut pas employer n’importe quel moyen », a souligné Mgr Sgreccia.

On oppose parfois l’objection d’un « mal mineur » pour « en sauver un certain nombre », a repris la presse.

Le P. Federico Lombardi est intervenu en disant que justement « parce que c’est une voie sans issue », l’Eglise a condamné dès le début la pratique de la congélation d’embryons humains et elle est donc dans l’impossibilité d’indiquer une « voie licite » pour sortir de ce qui est humainement une « impasse ».

Anita S. Bourdin

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ZENIT Staff

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