Lectio divina de Benoît XVI pour ses séminaristes (II/II)

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Le véritable optimisme sait que « l’Eglise est l’avenir »

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Le véritable optimisme, c’est celui qui sait que « l’Eglise est l’avenir », qu’elle « renaît toujours de nouveau « , que le christianisme « commence toujours de nouveau », souligne Benoît XVI devant ses séminaristes.

Le pape a en effet rencontré des séminaristes de son diocèse de Rome, le 8 février 2013, lors d’une visite au grand séminaire du Latran, à la veille de la fête de Notre Dame de la Confiance, sainte patronne du séminaire (cf. Zenit des 8 et 11 février 2013).

Quelque 190 séminaristes du monde entier – le séminaire « romain » étant « universel » – en soutanes noires, attendaient le pape dans la chapelle du séminaire, dans une atmosphère détendue, aux accents de fébrilité.

A son arrivée, le pape a été accueilli par le cardinal Agostino Vallini qui est son vicaire pour le diocèse de Rome, et par le recteur, don Concetto Occhipinti.

Le pape a ensuite donné une lectio divina sur le texte de la première Lettre de saint Pierre apôtre (1 P, 1,3-5), pour les séminaristes du grand et du petit séminaire de Rome, du vénérable Collège Capranica, du collège diocésain « Redemptoris Mater » et du séminaire de Notre Dame du Divin Amour.

La première partie de cette lectio a été publiée lundi dernier, 11 février 2013.

Lectio divina de Benoît XVI au Latran (2)

Elus : un mot qui exprime le privilège et l’humilité en même temps. Mais, comme je l’ai dit, le terme « élus » est suivi de parepidemois : « dispersés », « étrangers ». En tant que chrétiens, nous sommes dispersés et nous sommes des étrangers : nous voyons qu’aujourd’hui, dans notre monde, les chrétiens sont le groupe le plus persécuté parce que non conforme, parce qu’il est un stimulant, parce qu’il va contre les tendances de l’égoïsme, du matérialisme et de tout cela.

Les chrétiens ne sont certainement pas que des étrangers ; nous sommes aussi des nations chrétiennes, nous sommes fiers d’avoir contribué à la formation de la culture ; il y a un patriotisme sain, une joie saine d’appartenir à une nation qui a une grande histoire de culture et de foi. Mais, comme chrétiens, toutefois, justement aujourd’hui, nous sommes aussi des étrangers. Sur les lieux de travail, les chrétiens sont une minorité, ils se trouvent en position d’étrangers ; il est étonnant que l’on puisse encore aujourd’hui croire et vivre comme cela. Ceci fait aussi partie de notre vie : c’est la façon d’être avec le Christ crucifié ; le fait d’être des étrangers, qui ne vivent pas de la même manière que tout le monde, mais qui vivent – ou au moins cherchent à vivre – selon sa Parole, de manière très différente de ce que tout le monde dit. Et ceci est justement caractéristique des chrétiens. Tout le monde dit : « Mais tout le monde fait comme cela, pourquoi pas moi ? ». Non, pas moi, parce que je veux vivre selon Dieu. Saint Augustin a dit une fois : « Les chrétiens sont ceux qui n’ont pas leurs racines en bas comme les arbres, mais qui ont leurs racines en haut, et qui vivent cette gravitation  et non pas la gravitation naturelle vers le bas ». Prions le Seigneur de nous aider à accepter cette mission de vivre comme des personnes dispersées, comme une minorité, dans un certain sens ; de vivre comme des étrangers et pourtant d’être responsables des autres et, justement ainsi, en donnant force au bien dans notre monde.

Nous arrivons enfin aux trois versets de ce jour. Je voudrais seulement souligner, ou disons interpréter un peu, autant que je le peux, trois expressions : l’expression engendrés de nouveau, le mot héritage et l’expression gardés par la foiEngendrés de nouveau –anaghennesas, dit le texte grec – veut dire qu’être chrétien n’est pas simplement une décision de ma volonté, une idée à moi ; je vois que c’est un groupe qui me plait, je deviens membre de ce groupe, je partage leurs objectifs, etc. Non, être chrétien, ce n’est pas entrer dans un groupe pour faire quelque chose, ce n’est pas un acte seulement de ma volonté, pas d’abord de ma volonté, de ma raison : c’est un acte de Dieu. L’expression Engendrés de nouveau ne concerne pas seulement la sphère de la volonté, de la pensée, mais la sphère de l’être. Je suis né à nouveau : cela veut dire que devenir chrétien est avant tout passif ; je ne peux pas me faire chrétien, mais quelqu’un me fait renaître, je suis « fait » de nouveau par le Seigneur dans la profondeur de mon être. Et j’entre dans ce processus de renaissance, je me laisse transformer, renouveler, régénérer. Ceci me semble très important : comme chrétien, je ne me fais pas seulement une idée à moi que je partage avec quelques autres, et s’ils ne me plaisent plus, je peux partir. Non, cela concerne vraiment la profondeur de l’être, cela veut dire que devenir chrétien commence par une action de  Dieu, surtout son action, et moi, je me laisse former et transformer.

Il me semble qu’il y a là matière à réflexion, justement en cette année où nous réfléchissons sur les sacrements de l’initiation chrétienne, il faut méditer cela : cette dimension active et passive profonde de cette régénération, du devenir de toute une vie chrétienne, du fait de me laisser transformer par sa Parole, pour la communion de l’Eglise, pour la vie de l’Eglise, pour les signes avec lesquels le Seigneur travaille en moi, travaille ave moi et par moi. Et renaître, être engendré de nouveau, indique aussi que j’entre ainsi dans une nouvelle famille : Dieu, mon Père, l’Eglise, ma Mère, les autres chrétiens, mes frères et sœurs. Etre engendrés de nouveau, se laisser régénérer implique donc aussi de se laisser volontairement insérer dans cette famille, de vivre pour Dieu le Père et par Dieu le Père, de vivre de la communion avec le Christ, son Fils, qui m’engendre de nouveau par sa résurrection, comme le dit la Lettre (cf. P 1,3), vivre avec l’Eglise en me laissant former par l’Eglise dans tellement de sens, sur tant de chemins, et être ouvert à mes frères, reconnaître réellement dans les autres mes frères, qui sont comme moi engendrés de nouveau, transformés, renouvelés ; l’un porte la responsabilité de l’autre. Une responsabilité qui nous vient du baptême qui est le processus de toute une vie.

Le second mot : héritage. C’est un mot très important dans l’Ancien Testament, où il est dit à Abraham que sa postérité héritera de la terre, et voici la promesse qui a toujours été faite pour les siens : Vous possèderez la terre, vous serez les héritiers de votre terre. Dans le Nouveau Testament, ce mot est devenu un mot pour nous : nous sommes les héritiers, non pas d’un pays déterminé mais de la terre de Dieu, de l’avenir de Dieu. L’héritage est quelque chose qui appartient à l’avenir, et ainsi ce mot dit surtout que, comme chrétiens, nous avons l’avenir : l’avenir est à nous, l’avenir est de Dieu. Et ainsi étant chrétiens, nous savons que l’avenir est à nous et que l’arbre de l’Eglise n’est pas un arbre mourant, mais un arbre qui recommence toujours à pousser. L’avenir est à nous. Naturellement, il y a un faux optimisme et un faux pessimisme. Un faux pessimisme qui dit : le temps du christianisme est fini. Non, il recommence ! Le faux optimisme était celui d’après le Concile, quand les couvents fermaient, les séminaires fermaient et on disait : mais… ce n’est rien, tout va bien… Non ! Tout ne va pas bien. Il y a aussi des chutes graves, dangereuses et nous devons reconnaître avec un sain réalisme que comme cela, ça ne va pas, ça ne va pas là où l’on fait des erreurs. Mais nous devons aussi être sûrs, en même temps, que si, ici ou là, l’Eglise meurt à cause des péchés des hommes, à cause de leur absence de foi, en m
ême temps, elle naît de nouveau. L’avenir appartient réellement à Dieu ; c’est la grande certitude de notre vie, le grand, le véritable optimisme que nous connaissons. L’Eglise est l’arbre de Dieu qui vit éternellement et qui porte en lui l’éternité et le véritable héritage : la vie éternelle.

Et enfin, gardés par la foi. Le texte du Nouveau Testament, de la Lettre de saint Pierre, utilise ici un mot rare, phrouroumenoi, qui veut dire qu’il y a « les gardiens », et la foi est comme « le gardien » qui garde l’intégrité de mon être, de ma foi. Ce mot interprète surtout les « gardiens » des portes d’une ville, où ils se tiennent et gardent la ville, pour qu’elle ne soit pas envahie par des puissances destructrices. Ainsi la foi est « gardienne » de mon être, de ma vie, de mon héritage. Nous devons être reconnaissants pour cette vigilance de la foi qui nous protège, nous aide, nous guide, nous donne la sécurité : Dieu ne me laisse pas tomber de ses mains. Gardés par la foi : je conclus. Quand je parle de la foi, je dois toujours penser à cette femme syro-phénicienne, malade et qui, au milieu de la foule, trouve un accès à Jésus, le touche pour être guérie, et elle est guérie. Le Seigneur dit : « Qui m’a touché ? ». On lui dit : « Mais Seigneur, tout le monde te touche, comment peux-tu demander : qui m’a touché ? » (cf. Mc 7,24-30). Mais le Seigneur sait : il y a une manière de le toucher, superficielle, extérieure, qui n’a réellement rien à faire avec une véritable rencontre avec lui. Et il y a une manière de le toucher profondément. Et cette femme l’a touché vraiment ; elle l’a touché non seulement avec la main, mais avec le cœur, et ainsi elle a reçu la force du Christ qui guérit, en le touchant réellement de l’intérieur, par la foi. Voilà la foi : toucher le Christ avec la main de la foi, avec notre cœur, et entrer ainsi dans la force de sa vie, dans la force du Seigneur, qui guérit. Demandons au Seigneur de pouvoir le toucher toujours plus de cette façon, pour être guéris. Prions-le de ne pas nous laisser tomber, et afin que la foi aussi nous tienne par la main et qu’elle nous garde ainsi pour la vraie vie. Amen.

Le Saint-Père s’est ensuite arrêté au séminaire pour le dîner. Puis il est rentré au Vatican.

© Libreria Editrice Vaticana

Traduction de Zenit: Hélène Ginabat


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ZENIT Staff

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