Le travail est un droit, non une variable de marché

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Assemblée plénière du Conseil pontifical Justice et paix

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Le droit au travail « ne peut pas être considéré comme une variable qui dépendrait des marchés financiers et monétaires » : « c’est un bien fondamental lié à la dignité, à la fondation d’une famille, à la réalisation du bien commun et de la paix », déclare le pape François ce 2 octobre 2014.

Le pape a reçu les participants à l’assemblée plénière du Conseil pontifical Justice et Paix ce jeudi matin, dans la salle Clémentine du Vatican.

Dénonçant « l’exploitation du déséquilibre international dans les coûts du travail » en profitant de la main-d’œuvre à bas prix, le pape a souligné le « problème de la création de mécanismes de protection des droits du travail, et de l’environnement, en présence d’une idéologie consumériste croissante qui ne montre pas un sens de la responsabilité à l’égard de la ville et de la création ».

Il a demandé de « garder à l’esprit une vive préoccupation pour les pauvres et la justice sociale » : « Cela exige d’une part de profondes réformes qui prévoient la redistribution de la richesse produite et l’universalisation des marchés libres au service des familles, et de l’autre la redistribution de la souveraineté, sur le plan national comme au plan supranational. »

Pour le cinquième anniversaire de la promulgation de l’encyclique « Caritas in veritate » (2009), il a rendu hommage à son « extrême actualité » : « un amour plein de vérité est en effet la base sur laquelle construire cette paix, particulièrement désirée et nécessaire aujourd’hui pour le bien de tous. Il permet de dépasser les fanatismes dangereux, les conflits pour la possession des ressources, les migrations aux dimensions bibliques, les plaies persistantes de la faim et de la pauvreté, la traite des personnes, les injustices et les disparités sociales et économiques, les déséquilibres dans l’accès aux biens collectifs. »

A.K.

Discours du pape François

Messieurs les cardinaux,
Chers frères évêques et prêtres,
Frères et sœurs,

Je vous salue tous avec affection et je remercie le cardinal Peter Turkson pour les paroles par lesquelles il a introduit cette rencontre. Votre assemblée plénière coïncide avec le cinquième anniversaire de la promulgation de l’encyclique « Caritas in veritate » : un document fondamental pour l’évangélisation du domaine social, qui offre de précieuses indications sur la présence des catholiques dans la société, dans les institutions, dans l’économie, la finance et la politique. « Caritas in veritate » a attiré l’attention sur les bénéfices mais aussi sur les dangers de la mondialisation, quand elle n’est pas orientée vers le biens des peuples. Si la mondialisation a sensiblement augmenté la richesse accumulée par l’ensemble et par certains États en particulier, elle a aussi accentué les écarts entre les différents groupes sociaux, créant des inégalités et de nouvelles pauvretés même dans les pays considérés comme plus riches.

Un des aspects du système économique actuel est l’exploitation du déséquilibre international dans les coûts du travail ; celui-ci s’appuie sur des milliards de personnes qui vivent avec moins de deux dollars par jour. Un tel déséquilibre non seulement ne respecte pas la dignité de ceux qui alimentent la main-d’œuvre à bas prix, mais détruit des sources de travail dans les régions où il est encouragé. Cela soulève le problème de la création de mécanismes de protection des droits du travail, et de l’environnement, en présence d’une idéologie consumériste croissante qui ne montre pas un sens de la responsabilité à l’égard de la ville et de la création.

La croissance des inégalités et des pauvretés met en danger la démocratie inclusive et participative, qui présuppose toujours une économie et un marché qui n’excluent pas et qui sont équitables. Il s’agit alors de vaincre les causes structurelles des inégalités et des pauvretés. Dans l’exhortation apostolique « Evangelii gaudium », j’ai voulu indiquer des instruments fondamentaux pour l’inclusion sociale des plus démunis, comme l’instruction, l’accès aux soins de santé et le travail pour tous (cf. n.192).

En d’autres termes, l’État de droit social ne doit pas être démantelé, en particulier le droit au travail qui est fondamental. Il ne peut pas être considéré comme une variable qui dépendrait des marchés financiers et monétaires. C’est un bien fondamental lié à la dignité (cf. ibid.), à la fondation d’une famille, à la réalisation du bien commun et de la paix. L’instruction et le travail, l’accès au bien-être pour tous (cf. ibid. 205), sont des éléments clés, que ce soit pour le développement et pour la juste distribution des biens, pour l’accès à la justice sociale, pour faire partie de la société (cf. ibid. 53) et participer librement et dans un esprit responsable à la vie politique comprise comme gestion de la « res publica ». Des visions qui prétendent augmenter la rentabilité, au prix de la restriction d’un marché du travail qui crée de nouveaux exclus, ne sont pas conformes à une économie au service de l’homme et du bien commun, à une démocratie inclusive et participative.

Un autre problème émerge des déséquilibres permanents entre les secteurs économiques, entre les niveaux de rémunération, entre les banques commerciales et les banques de spéculation, entre les institutions et les problèmes mondiaux : il est nécessaire de garder à l’esprit une vive préoccupation pour les pauvres et la justice sociale (cf. Evangelii gaudium, 201). Cela exige d’une part de profondes réformes qui prévoient la redistribution de la richesse produite et l’universalisation des marchés libres au service des familles, et de l’autre la redistribution de la souveraineté, sur le plan national comme au plan supranational.

L’encyclique « Caritas in veritate » nous a aussi stimulés à regarder la question sociale actuelle comme une question liée à l’environnement. En particulier, elle a rappelé le lien entre écologie environnementale et écologie humaine, entre la première et l’éthique de la vie.

Le principe de « Caritas in veritate » est d’une extrême actualité. Un amour plein de vérité est en effet la base sur laquelle construire cette paix, particulièrement désirée et nécessaire aujourd’hui pour le bien de tous. Il permet de dépasser les fanatismes dangereux, les conflits pour la possession des ressources, les migrations aux dimensions bibliques, les plaies persistantes de la faim et de la pauvreté, la traite des personnes, les injustices et les disparités sociales et économiques, les déséquilibres dans l’accès aux biens collectifs.

Chers frères et sœurs, l’Église est toujours en chemin, à la recherche de nouvelles voies pour l’annonce de l’Évangile y compris dans le secteur social. Je vous remercie pour votre engagement dans ce domaine et, en vous confiant à la maternelle intercession de la bienheureuse Vierge Marie, je vous demande de prier pour moi et vous bénis de tout cœur. Merci.

Traduction de Zenit, Constance Roques

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Francis NULL

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