« Le royaume de Dieu vous sera enlevé » : Médiation du prédicateur de la Maison pontificale

Commentaire de l’Evangile du dimanche 2 octobre

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ROME, Vendredi 30 septembre 2005 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le commentaire de l’Evangile de ce dimanche (Mt 21, 33-43) que proposait cette semaine le père Raniero Cantalamessa OFM Cap, prédicateur de la Maison pontificale, dans l’hebdomadaire catholique italien « Famiglia cristiana ».

XXVII Dimanche du temps ordinaire (Année A) – 2 octobre 2005
« Le royaume de Dieu vous sera enlevé »

Evangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 21,33-43.

« Écoutez une autre parabole : Un homme était propriétaire d’un domaine ; il planta une vigne, l’entoura d’une clôture, y creusa un pressoir et y bâtit une tour de garde. Puis il la donna en fermage à des vignerons, et partit en voyage.
Quand arriva le moment de la vendange, il envoya ses serviteurs auprès des vignerons pour se faire remettre le produit de la vigne.
Mais les vignerons se saisirent des serviteurs, frappèrent l’un, tuèrent l’autre, lapidèrent le troisième.
De nouveau, le propriétaire envoya d’autres serviteurs plus nombreux que les premiers ; mais ils furent traités de la même façon.
Finalement, il leur envoya son fils, en se disant : ‘Ils respecteront mon fils.’
Mais, voyant le fils, les vignerons se dirent entre eux : ‘Voici l’héritier : allons-y ! tuons-le, nous aurons l’héritage !’
Ils se saisirent de lui, le jetèrent hors de la vigne et le tuèrent.
Eh bien, quand le maître de la vigne viendra, que fera-t-il à ces vignerons ? »
On lui répond : « Ces misérables, il les fera périr misérablement. Il donnera la vigne en fermage à d’autres vignerons, qui en remettront le produit en temps voulu. »
Jésus leur dit : « N’avez-vous jamais lu dans les Écritures : La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre angulaire. C’est là l’oeuvre du Seigneur, une merveille sous nos yeux !
Aussi, je vous le dis : Le royaume de Dieu vous sera enlevé pour être donné à un peuple qui lui fera produire son fruit.

© AELF

La parabole des vignerons infidèles, surtout dans sa conclusion (« Le royaume de Dieu vous sera enlevé pour être donné à un peuple qui lui fera produire son fruit »), évoque le thème du fameux « refus d’Israël ». Une interprétation simpliste et triomphaliste de cette page et d’autres pages semblables de l’Evangile, a contribué à créer le climat de condamnation des juifs, avec les conséquences dramatiques que nous connaissons. Nous ne devons pas abandonner les certitudes de foi qui nous viennent de l’Evangile, mais il suffit de peu pour constater combien notre comportement en a souvent déformé l’esprit authentique.

Dans ces terribles paroles du Christ c’est d’abord l’extraordinaire amour de Dieu et non une froide condamnation qui s’exprime à l’égard d’Israël. Jésus pleure lorsqu’il parle de l’avenir de Jérusalem ! Il s’agit en outre d’un rejet pédagogique non définitif. Dans l’Ancien Testament aussi il y avait eu des refus de Dieu. L’un d’eux est décrit par Isaïe, dans la première lecture, avec cette même image de la « vigne » (« Et maintenant, que je vous apprenne ce que je vais faire à ma vigne ! en ôter la haie pour qu’on vienne la brouter, en briser la clôture pour qu’on la piétine » 5,5) mais ceci n’a pas empêché Dieu de continuer à aimer Israël et à veiller sur lui.

Saint Paul nous assure que même ce dernier refus, annoncé par Jésus, ne sera pas définitif. Il permettra en réalité aux païens d’entrer dans le royaume (cf. Rm 11, 11.15). Il va plus loin encore : par la foi d’Abraham – qui constitue les prémices et la racine – tout le peuple juif est saint, même si certaines branches ont défailli (cf. Rm 11, 16). L’Apôtre des gentils, retenu à tort comme responsable de la fracture entre Israël et l’Eglise, nous suggère le comportement juste,
face au peuple juif. Non pas une auto-assurance et une vanité stupide (« nous sommes désormais le nouvel Israël, nous sommes les élus ! »), mais crainte et tremblement devant le mystère insondable de l’action divine (« que celui qui se flatte d’être debout prenne garde de tomber ! »), et plus encore amour pour Israël qui est la racine et le tronc sur lesquels nous sommes greffés. Paul affirme être disposé à rester séparé du Christ si cela pouvait profiter à ses frères (cf. Rm 9, 1-3). Si les chrétiens dans le passé avaient cherché à avoir ces sentiments en parlant des juifs, le cours de l’histoire aurait été différent.

Si les juifs parviennent un jour (comme l’espère Paul) à un jugement plus positif sur Jésus, cela sera le fruit d’un processus interne, l’aboutissement d’une recherche propre (ce qui est en partie en train d’advenir). Ce n’est pas à nous, chrétiens, d’essayer de les convertir. Nous avons perdu le droit de le faire à cause de la manière dont cela a été fait dans le passé. Les blessures devront d’abord être guéries à travers le dialogue et la réconciliation.
Je ne vois pas comment un chrétien qui aime vraiment Israël pourrait ne pas désirer que celui-ci parvienne un jour à découvrir Jésus que l’Evangile définit « gloire de son peuple, Israël » (Lc 2, 32). Je ne crois pas que cela soit du prosélytisme.

Mais pour le moment, le plus important est d’ôter les obstacles que nous avons mis à cette réconciliation, la « mauvaise image » que nous leur avons donnée de Jésus. Ceci vaut aussi pour les obstacles présents dans le langage : combien de fois le mot « juif » prend un sens péjoratif, ou négatif dans notre manière de parler. Les relations entre les chrétiens et les juifs se sont améliorées après le Concile Vatican II. Le décret sur l’œcuménisme a reconnu à Israël un statut à part, parmi les religions. Pour nous chrétiens, le judaïsme n’est pas « une autre religion » ; il fait partie intégrante de notre religion. Nous adorons le même « Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob » qui pour nous est aussi « le Dieu de Jésus-Christ ».

[Texte original en italien publié dans « Famiglia cristiana » – Traduction réalisée par Zenit]

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ZENIT Staff

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