Le dialogue interreligieux en 2012: bilan du card. Tauran

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Un dialogue en vue du bien commun

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Le voyage du pape Benoît XVI a été l’événement marquant de l’année 2012, fait observer le cardinal Jean-Louis Tauran, président du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, dans un entretien publié dans L’Osservatore Romano en italien du 4 décembre. Des propos recueillis par Mario Ponzi, traduits pour Zenit par Océane Le Gall.

Pour le cardinal bordelais, la question qui a le plus occupé le dicastère cette année est « le dialogue avec les musulmans ». « Malheureusement, dit-il,certaines minorités dévoyées, qui instrumentalisent la religion pour justifier l’usage de la violence, ou cherchent à imposer à tout le monde, sans distinction, la loi islamique, même par la force, sont un danger pour les sociétés, mais pour le monde entier aussi, et elles mettent en difficulté le dialogue entre les religions. Il suffit de penser, à ce propos, au sort de communautés chrétiennes dans des pays comme le Pakistan ou le Nigéria. Rien ni personne ne saurait justifier de tels excès. Hélas, le poids de l’intégrisme risque de faire oublier la dimension religieuse et spirituelle de l’Islam ».

Le voyage « hors du commun » au Liban

Evoquant le voyage de Benoît XVI au Liban (14-16 septembre 2012), il n’hésite pas: « Il s’agissait indubitablement d’un événement hors du commun. L’instauration d’un climat particulièrement cordial, favorisé par les chefs religieux musulmans du pays, a permis au pape de réaffirmer l’engagement de l’Eglise catholique à poursuivre un dialogue respectueux et sans ambigüités. De plus — un fait vraiment extraordinaire — ses interlocuteurs musulmans ont reconnu sans aucun mal que les chrétiens au Moyen Orient, en particulier ceux du Liban, sont une richesse ».

Il insiste sur la façon dont Benoît XVI entend le dialogue: « Pour nous le magistère lumineux de Benoît XVI  reste un phare. Au cours de l’audience à la Curie romaine du 21 décembre dernier, par exemple, le pape a tenu un discours pour ainsi dire programmatique sur le rapport entre dialogue et vérité, et entre annonce et conversion ».

Le cardinal Tauran évoque un autre événement impostant dans ce domaine: « Parmi les expériences les plus significatives des mois passés, on ne peut faire l’impasse sur le King Abdullah bin Abdulaziz International Centre for Interreligious and Intercultural Dialogue, inauguré à Vienne le 26 novembre dernier. Un centre qui, bien que voulu et financé pendant quelques années par l’Arabie Saoudite, représente une bien plus grande organisation internationale non gouvernementale — fondée donc par l’Arabie Saoudite, mais avec l’Autriche et l’Espagne — où le Saint-Siège est présent en qualité d’observateur fondateur« .

« Cet organisme constitue un bon canal de dialogue qui, nous le souhaitons, pourra promouvoir une meilleure connaissance réciproque entre les croyants, mais sera aussi un espace approprié pour dénoncer des situations où la liberté de conscience et de religion n’est pas respectée et protégée correctement », préc ise le cardinal Tauran.

Le dialogue, en vue du bien commun

Pour ce qui est de ses propres voyages, le cardinal Tauran retient sa visite « particulièrement significative » au Nigeria (23-31 mars 2012). Il témoigne: « J’ai pu constater que les nigérians veulent rester ensemble, malgré les diversités entre le nord et le sud. Je garde un souvenir ému de ma visite à une école technique, située dans une région à majorité musulmane. Gérée par un prêtre catholique, celle-ci accueille une trentaine de jeunes gens qui travaillent le bois. L’ambiance et les relations entre eux ont été pour moi la preuve que le dialogue interreligieux contribue aussi au bien commun. Ces jeunes montrent que malgré le caractère dramatique de certaines situations, il est possible de vivre et de travailler ensemble! »

« Malheureusement, ajoute-t-il, on a vu d’autres situations moins encourageantes. Je pense, par exemple, à l’Egypte, un pays en pleine mutation. Cette année encore le dialogue avec Al Azhar s’est interrompu sur décision de nos partenaires musulmans. En ce qui nous concerne, nous continuons à dire que nos portes restent ouvertes à un dialogue sincère et respectueux ».

Et de définir ces deux qualificatifs: « Il faut toujours avoir à l’esprit la haute dimension spirituelle de chaque religion. La chose la plus importante est d’éviter que les aspects sociologiques ou politiques nous fassent oublier cette dimension. Je me rends compte que beaucoup de catholiques, malgré leur désir de dialogue avec d’autres croyants, on tendance à se décourager devant ce qui se passe autour d’eux. Difficile, par exemple, d’oublier que toutes les cinq minutes un chrétien est tué pour sa foi. Il faut naturellement dénoncer sans détours une telle barbarie. Cela dit, ce genre de situation peut stimuler les croyants à approfondir leurs propres convictions et à témoigner, au milieu de tant de violence, que toutes les religions favorisent la fraternité. En ce sens-là, les religions sont une ressource pour le bien commun ».

Au programme de l’Année de la foi

C’est ce qui motive le dialogue dans lequel l’Eglise s’est engagée: « L’Eglise catholique, pour sa part, reste active dans le dialogue entre les religions; avec les musulmans comme avec les fidèles des religions orientales et traditionnelles. Les visites ad limina des évêques, qui viennent volontiers partager avec nous leurs initiatives, sont une autre preuve du sérieux de notre engagement ».

Enfin, le dialogue interreligieux fait aussi partie de la mise en oeuvre de l’Année de la foi, fait observer le cardinal Tauran: « Durant cette Année de la foi nous serons tous engagés à redonner de la vigueur à notre foi chrétienne, de manière à mieux connaître son contenu et proposer, par la parole et le geste, le message de Jésus Christ. Et puisque nous sommes au début d’une nouvelle année, donc au moment des vœux, je fais mien celui du pape à la curie romaine, en redisant les paroles de Jésus: «Venez et vous verrez!». Nous prierons le Seigneur afin que l’Eglise, malgré ses pauvretés, soit de plus en reconnue comme étant sa demeure. Nous le prierons afin que nous puissions dire toujours mieux et de manière toujours plus convaincante que « nous avons trouvé Celui que le  monde entier attend, Jésus-Christ, vrai Fils de Dieu et vrai homme ». »

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ZENIT Staff

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