« Le Christ destin de l’homme », par Mgr Jean Laffitte

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Vingt ans d’expérience pastorale, de réflexion et de contemplation

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Anita Bourdin

ROME, vendredi 16 mars 2012 (ZENIT.org) – « Le Fils éternel révèle à chacun le secret de son être créé » : une telle affirmation constitue également, pourrait-on dire, le « secret » de Mgr Jean Laffitte, qui résume plus de vingt ans d’expérience pastorale, de réflexion intellectuelle et de contemplation du mystère du Christ, rassemblés dans un nouveau livre.

Le secrétaire du Conseil pontifical pour la Famille publie en effet en français chez Mame une « somme » de quelque 600 pages qui feront aimer la morale !

L’auteur l’a présentée devant quelque 160 personnes à Paris, aux Bernardins, le 14 mars, entouré du P. Olivier Bonnewijn, professeur de théologie dogmatique et morale à l’Institut d’Études Théologiques de Bruxelles, et par Jean-Marie Meyer, professeur agrégé qui enseigne la philosophie générale et l’éthique, membre du Conseil pontifical pour la famille. La chaîne de télévision catholique française KTO  diffusera cette présentation et le débat qui a suivi à plusieurs reprises à partir du 17 avril.

Ce volume élégant dans sa jaquette à l’effet de toile gris perle s’intitule : « Le Christ, destin de l’homme ». Et, comme le dit le sous-titre, elle propose des « itinéraires d’anthropologie filiale ».

Le mot est lâché : « filiale ». C’est cela qui fait aimer la morale, une morale du bonheur de l’homme, voulu par un Dieu bon, un Père. Une morale où la liberté est orientée par le « Fils » : tout baptisé est invité à entrer dans cette filiation – explique l’auteur dans sa présentation -, invité à se reconnaître « fils dans le Fils, choisi et aimé de toute éternité, et destiné à vivre éternellement de l’amour du Père. Dieu nous attend. Le Père nous attend ».

Ce n’est un hasard si la couverture ouvre une fenêtre sur ce beau Christ catalan, un Christ souffrant, royal, de la royauté de l’amour divin – comme symbolisé par le filet d’or du cadre -, humble.

Un théologien de la famille

Le théologien qui reste à chaque pas un pasteur, se mesure avec les drames, voire les tragédies, du monde moderne, sans « tricher ». Une attitude que Mgr Laffitte confie à Zenit avoir apprise en famille – douze enfants, c’est un principe de réalité solide – : « Mes parents ne trichaient pas » avec la vie, explique Mgr Laffitte, également auteur d’un best seller traduit en plus de sept langues : « Le choix de la Famille », publié à l’automne dernier sous forme d’entretien avec Pierre et Véronique Sanchez, aux éditions de l’Echelle de Jacob. Et qui a rendez-vous avec les familles du monde à la VIIe Rencontre, à Milan, fin mai début juin.

Car Mgr Laffitte, qui continue d’enseigner à l’Institut Jean-Paul II pour les études sur le mariage et la famille, à l’Université pontificale du Latran, est peut-être d’abord connu comme un théologien de la famille. Mais dans « Le Christ, destin de l’homme », l’itinéraire traverse aussi les situations concrètes de la vie humaine, en société, de la conception à sa mort « naturelle » pour reprendre une expression devenue classique. Pas seulement. Le destin humain est considéré dans le temps et l’éternité.

Les notes éclairent la table des matières de sa dimension pastorale « inculturée »: tel article a été écrit pour Rome, tel autre est une intervention à Bordeaux, Madrid, Beyrouth, Buenos Aires, Mexico, Salvador de Bahia, Washington D.C.,  Dar-es-Salaam, Cotonou, Melbourne, Changanacherry (Inde, Kerala),  Incheon (Corée du Sud), Tokyo…

« L’ensemble des textes présentés ici s’inscrit dans le cadre de recherches effectuées au cours de deux décennies d’enseignement auprès de l’Institut pontifical Jean-Paul II, à Rome et dans les différentes sections de l’Institut dans les cinq continents », explique l’auteur : il s’agit d’une « sélection de 27 articles » sur 70 publications.

Le plan en deux volets rend la consultation facile : d’une part « la vie, la famille, la société », de l’autre « l’agir chrétien, le pardon, le Cœur du Christ ».

La vie – car cette somme est un hymne à la vie – de l’embryon, la mort, cette « entrée dans la vie », en passant par les questions de santé et ses enjeux éthiques, le don d’organes, le sida. La famille, « irremplaçable », le corps, l’eucharistie, la communion ecclésiale, la sainteté des époux. La société et sa cellule fondamentale, la révolution sexuelle, la démographie en Europe, et les questions d’une actualité brûlante comme celles touchant à la conscience, à la liberté de conscience, à l’objection de conscience.

Le second volet s’ouvre que la question fondamentale : qu’est-ce qu’une « anthropologie filiale » ? Et il se poursuit avec cette réflexion – qui a encore fait récemment l’objet d’un congrès à Rome – « le Christ contemporain des hommes de tous les temps », en passant par la rationalité de l’agir chrétien. L’auteur affronte la question du pardon qui a fait l’objet d’une longue réflexion – et d’un doctorat – y compris le pardon sacramentel. L’itinéraire s’achève sur « la configuration au Cœur du Christ ».

A l’école de Jean-Paul II

Dans sa présentation aux Bernardins, Mgr Laffitte souligne la spécificité du volume d’offrir une « anthropologie théologique » en langue française, à l’école de Jean-Paul II.

Il situe plus précisément le recueil dans le sillage de la fondation de l’Institut Jean-Paul II : « L’annonce de sa fondation, de même, d’ailleurs, que celle de l’érection du Conseil pontifical pour la Famille, devait être faite le 13 mai 1981, au cours de l’audience où Ali Agça attenta à la vie du Saint-Père. Pour bien comprendre l’intention du Pape, il convient de se resituer dans le contexte du début des années 80. Le philosophe moraliste, devenu successeur de Pierre, ne pouvait que s’alarmer devant la diffusion dans le monde chrétien de courants culturels et de systèmes éthiques, dont certains lui semblaient incompatibles avec le contenu de la Révélation ».

Et il précise l’enjeu : « Plusieurs de ces idées se diffusaient parmi les chrétiens, confrontés au cours de ces années-là à de nouveaux défis dans leur vie quotidienne (…). La stabilité de la cellule familiale était de plus en plus mise à mal ». Puis se posèrent les questions nouvelles dans le domaine de la bioéthique.

« Jean-Paul II fut très vite persuadé, fait remarquer l’auteur, qu’un chantier gigantesque s’ouvrait et nécessiterait dans le futur une grande mobilisation des chrétiens. Rappelons pour mémoire qu’il fonda en 1994 l’Académie pontificale pour la Vie dont il confia la première présidence au Professeur Jérôme Lejeune. »

Mgr Laffitte signale « l’apport capital » des « Catéchèses du mercredi sur l’amour humain prononcées par le Pape entre 1979 et 1984 ». On mesure l’impact quand on sait que l’Institut qui porte son nom « fut chargé de la première publication d’une édition critique qui parut dès 1985 en langue italienne, et qui en est à sa dix-huitième édition ». Sans parler des éditions dans les différentes langues.

Un des défis les plus récents, et plus « spectaculaire », affrontés par l’Institut dans le cadre de la « révolution anthropologique et sociale » actuelle, est constitué par « la diffusion de l’idéologie du genre (gender) ».

L’anniversaire de Familiaris Consortio

Il fallait donc des boussoles, représentées, entre autres, par l’instruction Donum vitae, la partie morale du Catéchisme de l’Eglise catholique, la lettre apostolique Mulieris dignita
tem
, les encycliques Veritatis splendor et Evangelium vitae, la Lettre aux familles.

Ce qui frappe aussi c’est « la fécondité de la pensée de Karol Wojtyła dans des contextes non chrétiens », dans « des pays comme le Japon », ou « des instances politiques internationales ».  Elle est notamment due, explique l’auteur, à « cette capacité de l’approche wojtiłienne à pénétrer en diverses cultures et à capter l’attention de jeunes auditoires », et à « la méthode de Jean-Paul II qui, pour s’adresser à tous les hommes de bonne volonté, partait systématiquement de ce qu’il décrivait comme les expériences humaines fondamentales au cœur de l’homme, expériences communes à tous ».

Mais l’auteur ne se limite pas à la présentation de cet immense héritage : un « nouvel enrichissement sur la nature de l’amour humain » a été apporté par le magistère de Benoît XVI, ses encycliques, ses voyages, et ses discours, comme celui du 13 mai 2011 : « C’est devant les participants à la Rencontre internationale organisée par l’Institut pontifical Jean-Paul II à l’occasion du XXXème anniversaire de l’exhortation apostolique Familiaris consortio, le 13 mai 2011, que le Pape a parlé longuement du corps humain. Il a souligné son rapport constitutif avec le Créateur et observé que c’est lorsqu’il est amputé de cette dimension filiale, que le corps se rebelle contre la personne. Aux yeux du Saint-Père, la famille est le lieu où justement s’entremêlent la théologie du corps et la théologie de l’amour. »

Mgr Laffitte revient ainsi au cœur de son ouvrage : « La référence incessante que fait Benoît XVI à la paternité divine renforce la conviction de l’auteur de ces lignes de l’urgente nécessité de tracer aujourd’hui les contours d’une véritable anthropologie filiale ».

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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