Le « cas sérieux » des homélies (IV)

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Comment bien préparer son homélie ?

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Mgr Enrico Dal Covolo

Traduction d’Océane Le Gall

ROME, lundi 23 juillet 2012 (ZENIT.org) – Bien préparer son homélie pour que celle-ci parle au cœur des fidèles, sans trop la charger de concepts et de messages…Une homélie qui aille à l’essentiel !…  Comment ? Il n’y a pas de règle de fer, répond Mgr Enrico Dal Covolo, recteur de l’université pontificale du Latran, dans la quatrième partie de sa réflexion sur le ministère de la prédication.

En toile de fond : Le titre de la troisième partie de l’Instrument de travail, « Transmettre la foi »,  pour préparer la prochaine Assemblée Générale du Synode des évêques sur le thème de la Nouvelle évangélisation pour la transmission de la Foi chrétienne .

Dans cette quatrième partie, Mgr Dal Covolo, évoque la préparation d’une « bonne »  homélie, non plus seulement dans le sillage direct de la Bible et des Pères de l’Eglise, mais dans le contexte historique, culturel et environnemental des temps modernes, où les critères d’attention du public ne sont plus les mêmes.  

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Nous avons fait allusion – outre à la méthode de l’homélie –  à « l’arrière fond spirituel » du prédicateur:  celui-ci doit être profondément nourri de science et de foi, afin qu’il ne lui arrive pas d’être – selon l’avertissement de saint Augustin – « un vain prédicateur de la Parole » : un « beau parleur », dirions-nous aujourd’hui.

Mais l’exemple de nos Pères nous enseigne aussi qu’au-delà de « l’arrière-fond spirituel » et d’une « préparation en amont », il faut aussi veiller à la « préparation suivante » qui est celle de l’homélie.

* Il a été dit – et à juste titre – que les meilleures homélies sont celles qui ont été le plus longuement préparées, et tant de vaillants pasteurs sont d’accord pour dire qu’ils commencent à préparer leur homélie le lundi pour le dimanche. Mais cela est normal, si on pense à la méthode des homélies, que nous avons illustrée en nous fondant sur l’exemples de nos Pères: si l’homélie doit parler au cœur des fidèles, elle doit partir d’un cœur qui est déjà façonné – à une certaine échelle– par la Parole de Dieu; et ce n’est certainement pas en ramassant quatre idées, au dernier moment, en sacristie, que l’on y arrive…

Là on touche de près  à la personnalité unique de chacun, et dans l’histoire des homélies, depuis l’époque de nos Pères, nous trouvons divers exemples très différents: des prédicateurs qui apparemment improvisent mais qui, en réalité, avaient tout écrit, et  tout appris par cœur, ce qu’ils comptaient dire ; et des prédicateurs qui apparemment lisaient, mais qui en réalité dictaient leurs prédications,  et revoyaient ensuite souvent le texte des notes prises par des  tachygraphes ou des fidèles, pour l’arranger définitivement et le conserver. Saint Augustin, par exemple, soignait personnellement le recueil de ses homélies dans les archives d’Hippone.

 Il m’est arrivé d’avoir dans les mains quelque note de la prédication de saint Charles Borromée. Saint Charles dessinait ses homélies comme un arbre : le tronc était l’idée centrale, qu’il voulait transmettre aux fidèles, les branches étaient par contre les divers développements de sa pensée, à partir de cette unique idée centrale. Ceci nous rappelle au moins que nos homélies ne doivent pas être trop chargées de concepts et de messages. Si de nos homélies les gens rapportent chez eux une idée centrale, valable et concrète pour toute la semaine,  ça sera déjà beaucoup…

Donc je ne crois pas qu’il y ait une réponse univoque devant la question « l’homélie doit-elle être écrite ou pas, doit-elle être lue ou pas? ». Certes, uniquement lire n’aide pas l’attention des fidèles. Toutefois, au moins pour celui qui commence à prêcher, je recommanderais d’écrire en entier le texte de son homélie, et de l’avoir sous les yeux, de manière à vaincre plus facilement le trac des débuts.  Je dirais par contre que tous les prédicateurs doivent avoir bien à l’esprit, gravé dans leur cœur, l’itinéraire complet de leur homélie, dans ses points fondamentaux de « aller » et du « retour ».

De ce point de vue-là, nos Pères, qui avaient étudié l’éloquence classique, avaient bien à l’esprit la « règle » de l’orateur latin: Rem tene, verba sequentur! En particulier, l’introduction et la conclusion, sont très importantes pour le caractère incisif de la communication: celles-ci doivent aider l’assemblée à percevoir l’homélie comme il se doit, c’est-à-dire dans le vif contexte de la célébration liturgique.

* Il n’y a pas non plus de règles de fer à donner concernant la longueur de l’homélie. Il est certain qu’une homélie bien préparée va à l’essentiel, et résulte plus concise. Saint Augustin, encore une fois, le savait bien, quand il se plaignait parce qu’au dernier moment on lui changeait les lectures… Déjà Origène (mais qui, dans de nombreux, contredira par la suite largement cette norme) affirmait: Brevitatem auditores ecclesiae diligunt. E Pietro Crisologo parla della brevitas amica sermonis.

En réalité dans la prédication patristique les signes de lassitude de la part du public ne manquent pas. En tous les cas il me semble que le contexte historique, culturel, environnemental… a tellement changé que, concernant l’élément spécifique de la brièveté ou de la longueur de l’homélie, le renvoi à la prédication des Pères n’est pas très éclairante. En ce qui nous concerne, d’habitude le dimanche, il faudrait s’en tenir à dix minutes d’homélie environ, pour pouvoir la mettre en valeur sans empressement, à travers tous les autres éléments de la célébration eucharistique.

(La cinquième et dernière partie de la réflexion de Mgr dal Covolo sera publiée demain, mardi 24 juillet)


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ZENIT Staff

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