Cardinal Kurt Koch

Cardinal Kurt Koch ZENIT - HSM

«L’Autre dans les traditions juive et catholique: Les réfugiés dans le monde d’aujourd’hui», déclaration de Varsovie

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Comité international de liaison judéo-catholique (traduction complète)

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Le Comité international de liaison judéo-catholique proteste face à la crise humanitaire des réfugiés en Europe, la résurgence de l’antisémitisme, et la persécution des chrétiens.
Ce Comité a tenu sa 23e réunion en Pologne, à Varsovie du 4 au 7 avril, sur le thème : « L’Autre dans les traditions juive et catholique : Les réfugiés dans le monde d’aujourd’hui ».
« Répondant aux impératifs religieux des chrétiens et des juifs, la conférence a pris acte de la crise actuelle des réfugiés qui submerge une bonne partie de l’Europe, reconnaissant les tensions entre d’une part les obligations d’aimer les étrangers, ainsi que leur dignité puisqu’ils sont créés à l’image de Dieu et, d’autre part les préoccupations liées à la sécurité et à la peur du changement », disent les participants. Ils ajoutent : « L’antisémitisme, à la fois en paroles et en actes, a refait surface en Europe et ailleurs et la persécution de chrétiens, principalement dans une bonne partie du Moyen-Orient et dans certaines régions d’Afrique, a atteint des niveaux que l’on n’avait pas connus depuis longtemps. »
Les participants ont souligné que « l’antisémitisme est réel et revêt des formes diverses » et ils recommandent des programmes d’éducation adéquats : « C’est un danger non seulement pour les juifs mais aussi pour les idéaux de la démocratie. Il faut, pour le combattre, améliorer et revitaliser les programmes éducatifs. »
Pour ce qui est de la persécution des chrétiens, ils ont déploré son augmentation chaque année, notamment depuis 2012, et ils ont reconnu « l’obligation d’éveiller les consciences à travers le monde à propos de ce problème et ont convenu de leur responsabilité morale à être une voix pour ceux qui sont sans voix ».
Voici notre traduction du texte de la déclaration conjointe.
A.B.
Déclaration conjointe
La 23e réunion du Comité international de liaison judéo-catholique (ILC) s’est tenue à Varsovie, du 4 au 7 avril 2016. L’ILC est l’entité créée en 1971 pour formaliser l’établissement des relations officielles entre le Saint-Siège et la communauté juive dans le monde. L’ILC est le forum officiel pour la poursuite du dialogue entre la Commission du Saint-Siège pour les relations religieuses avec les juifs et le Comité juif international pour les consultations interreligieuses (IJCIC). Des représentants juifs et catholiques des cinq continents ont participé au rassemblement. Le cardinal Kurt Koch, président de la Commission du Saint-Siège pour les relations religieuses avec les juifs, et M. Martin Budd, président de l’IJCIC, ont co-présidé cette réunion.
Cette réunion a été convoquée à un moment important de l’histoire. L’ILC a directement vu le jour à partir du concile Vatican II et de Nostra ӕtate, son document qui a conduit à une profonde transformation et dont le cinquantième anniversaire a été célébré et commémoré à travers le monde. En même temps, des millions de personnes dans le monde, y compris les catholiques romains et les juifs de nombreux pays, sont conscientes des défis que posent les relations interreligieuses et culturelles.
La Pologne offrait un cadre approprié pour cette réunion. Elle a été le lieu de certains des développements les plus importants et productifs dans la culture et la compréhension de soi tant catholiques que juives, mais aussi, au XXe siècle, le théâtre de quelques-uns des événements les plus abjects de l’histoire du monde. Les participants de l’ILC et les institutions qu’ils représentent ont parfaitement conscience de la tension dynamique qu’impliquent ces deux extrêmes et du noble défi que représente le développement de compréhensions contemporaines construites sur les leçons du passé. Les participants n’ignorent pas moins combien les dynamiques politiques contemporaines ont un impact direct sur le bien humain et social  à la fois des catholiques et des juifs en Pologne et ailleurs dans le monde.
La réunion s’est ouverte sur un événement public auquel ont participé les responsables des deux communautés, des responsables civiques et gouvernementaux de Varsovie et de Pologne, et des représentants du Vatican, de l’Église polonaise et de l’État d’Israël.
Les co-présidents de cette réunion de l’ILC, le card. Kurt Koch et M. Martin Budd, ont chacun présenté à la fois le contexte historique et les défis émergents. Le card. Koch a souligné qu’au long des années, un des effets bienvenus de ces rencontres a été le développement d’amitiés réelles entre les participants et un sincère sentiment de partenariat entre les communautés qu’elles représentent. M. Budd a souligné la signification symbolique de cette réunion en cette ville de Varsovie, chargée d’histoire, et en cette période, à la suite du 50e anniversaire de Nostra ӕtate, et en ce moment de défi moral pour des personnes de foi. La soirée a culminé avec une présentation de l’ambassadeur d’Israël en Pologne. De la part du Yad Vashem, trois catholiques polonais ont été reconnus de manière posthume, par l’ambassadeur, comme « Justes parmi les Nations » pour avoir sauvé des vies juives pendant la Shoah, incarnant la plus noble réalisation des relations judéo-catholiques.
L’agenda de ce dialogue biennal avait pour thème : « L’Autre dans la tradition juive et catholique : les réfugiés dans le monde d’aujourd’hui ». Afin de fournir un fondement religieux et académique aux discussions qui suivraient, la session a commencé par des analyses en profondeur sur la façon dont les traditions et les sources juives et catholiques romaines voyaient « l’autre ». Dans la ligne de la nature savante de ces présentations, chacun des intervenants a reconnu la tension dialectique interne du particulier vs. l’universel dans chaque tradition, soulignant l’importance et l’intégrité morale que revêt l’acceptation de « l’autre » en tant que composante essentielle de la compréhension d’elle-même de chaque tradition. Les présentations et la discussion qui a suivi ont mis en avant le fait que nos Écritures respectives nous fournissent  un cadre pour affronter les questions sociales urgentes telles que la crise des réfugiés aujourd’hui. Répondant aux impératifs religieux des chrétiens et des juifs, la conférence a pris acte de la crise actuelle des réfugiés qui submerge une bonne partie de l’Europe, reconnaissant les tensions entre d’une part les obligations d’aimer les étrangers, ainsi que leur dignité puisqu’ils sont créés à l’image de Dieu et, d’autre part les préoccupations liées à la sécurité et à la peur du changement.
Bien que les cinquante dernières années aient amplement vu une ouverture sans précédent entre nos deux communautés en de nombreux endroits, et surtout au niveau international, ces dernières années ont été témoins d’une montée des développements problématiques qui affectent l’une et l’autre. Après avoir abordé la façon dont nos traditions respectives nous encouragent à aider l’autre, nous nous sommes centrés sur le fait que nos deux communautés se trouvent maintenant dans la position de « l’autre ». L’antisémitisme, à la fois en paroles et en actes, a refait surface en Europe et ailleurs et la persécution de chrétiens, principalement dans une bonne partie du Moyen-Orient et dans certaines régions d’Afrique, a atteint des niveaux que l’on n’avait pas connus depuis longtemps.
Les participants ont souligné que l’antisémitisme est réel et revêt des formes diverses. C’est un danger non seulement pour les juifs mais aussi pour les idéaux de la démocratie. Il faut, pour le combattre, améliorer et revitaliser les programmes éducatifs.
Les participants ont fait observer que la persécution des chrétiens avait augmenté tous les ans entre 2012 et 2015. Ils ont reconnu l’obligation d’éveiller les consciences à travers le monde à propos de ce problème et ont convenu de leur responsabilité morale à être une voix pour ceux qui sont sans voix.
En reconnaissance de la signification historique indiscutable de la Shoah, les participants ont visité le camp de la mort de Treblinka. Dans un mémorial commémoratif, les responsables ont affirmé leur engagement à ne jamais permettre que cette tragédie soit oubliée, ni laisser le monde tolérer une telle négation de l’humanité ou de la dignité de tout être humain, quelle que soit sa race, sa religion ou son ethnie.
La visite d’une agence catholique de service social et du Musée POLIN de l’histoire des juifs polonais a souligné le rôle critique des communautés juives et catholiques dans la vie polonaise contemporaine. Cette réunion a célébré l’expérience polonaise de la transition du communisme, avec ses répressions, à la liberté d’étude et d’expression de la foi religieuse dans une nouvelle société.
En maintenant la signification de l’ILC depuis sa création il y a 45 ans, les représentants ont réaffirmé leur engagement permanent à un dialogue ouvert et constructif, comme modèle pour la compréhension interreligieuse et interculturelle dans le monde, plus spécialement avec les responsables religieux de la communauté musulmane. Ils ont aussi réitéré leur engagement à collaborer pour faire face aux nécessités émergentes de leurs communautés, où qu’elles soient, et pour transmettre leurs messages de transcendance à un monde qui a tant besoin de l’affirmation authentique et bienveillante représentée par leurs deux traditions religieuses.
© Traduction de Zenit, Constance Roques

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