La trajectoire du cardinal Newman (2)

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Un miracle reconnu comme dû à l’intercession du théologien anglais

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ROME, Mercredi 15 juillet 2009 (ZENIT.org) – « Newman se rendit compte que l’enseignement donné au peuple catholique n’était pas idolâtre ou superstitieux comme il se l’était imaginé » : le P. Stern voit dans cette découverte un tournant dans la vie du – futur – cardinal John Henry Newman. Nous publions ci-dessous le second volet de cet entretien (pour le premier volet, cf. Zenit du 14 juillet 2009).

Le Saint-Siège vient de reconnaître le caractère miraculeux d’une guérison obtenue par l’intercession de John Henry Newman (1801-90), ce qui ouvre la voie à sa prochaine béatification (cf. Zenit du 3 juillet 2009). Le P. Jean Stern, Missionnaire de La Salette et membre de l’Association française des Amis de Newman, évoque pour les lecteurs de Zenit la figure du fameux théologien anglican devenu catholique et cardinal.

Zenit – Une fois dans l’Eglise catholique, tout fut-il facile pour Newman ?

Père Stern – Connaissant l’histoire de l’Eglise, il s’attendait d’avance à des difficultés. Il y en eut effectivement. On le suspecta même d’hérésie. Léon XIII, il est vrai, le nomma cardinal, mais ce fut en 1879 seulement ! Voilà ce qu’on lit dans une lettre écrite par lui en 1868, donc après plus de vingt ans de vie catholique. « Il y a dans la religion catholique une profondeur et une puissance, il y a dans son Credo, sa théologie, ses rites, ses sacrements, et dans sa discipline, une plénitude qui nous comble ; il y a en elle une liberté, mais aussi un soutien, en comparaison desquels la négligence dont font preuve à notre égard les hommes, fussent-ils très haut placés, ou les malentendus dont nous pouvons être victimes, ne pèsent pas plus lourd que de la poussière. Voilà le véritable secret de la force de l’Eglise, le principe de son indéfectibilité et le lien qui assure son unité indissoluble. C’est là, vraiment, le commencement de la paix du ciel ».

Zenit – Newman n’a connu ni Vatican II ni les remous postconciliaires. Mais il a vécu à l’époque de Vatican I. On dit qu’il a éprouvé des difficultés à propos de ce concile qui, en 1870, a défini l’infaillibilité du pape.

Père Stern – Disons plutôt qu’il éprouvait de la compassion pour les gens qui éprouvaient des difficultés. Voici une première réaction à chaud, en août 1870, donc dans les jours qui suivirent la définition de l’infaillibilité pontificale. Newman remarque qu’il « est rare qu’un concile n’ait pas été suivi de beaucoup de confusion ». Il donne comme exemples les conciles de Nicée, d’Ephèse, de Chalcédoine…

Zenit – Dans l’immédiat après-Vatican I, quelles furent les confusions ? D’où venaient les difficultés ?

Père Stern – Confusions et difficultés venaient, pour commencer, des manifestations de triomphalisme, auxquelles se livraient certains défenseurs de la nouvelle définition. Ils attribuaient à la définition une extension qu’elle n’avait pas en réalité, et semaient le trouble dans les âmes. « Ce que j’ai senti profondément, et que je me rappellerai toute ma vie », observe Newman dans son livre sur l’infaillibilité pontificale et sa définition en 1870, « c’est la violence et la cruauté de journaux et de publications qui se présentaient en défenseurs du catholicisme… En plus d’un lieu, on fit passer pour des hommes infidèles à Dieu et à son Eglise ceux qui avaient quelque compassion pour les âmes en difficulté, qui se faisaient un scrupule de scandaliser les petits qui croient en Jésus Christ, de mépriser et de perdre les âmes pour lesquelles le Fils de Dieu a donné sa vie ».

Zenit – En quoi consistait la compassion dont, pour sa part, Newman faisait preuve, l’aide qu’il a fournie ?

Père Stern – Elle consistait, pour commencer, dans un rappel de l’attitude catholique fondamentale. Aux personnes en difficultés il disait : « L’Eglise est l’oracle infaillible de la vérité. Voilà le dogme fondamental de la religion catholique ». Si la nouvelle définition dogmatique vous fait difficulté, dites : « je crois en tout ce que Dieu nous enseigne par son Eglise ». Priez, et avec le temps vous verrez mieux ce que l’Eglise enseigne exactement.

Zenit – Est-ce que Newman en restait là ? Se contentait-il du principe : l’Eglise est infaillible ?

Père Stern – Une observation formulée par Newman dans l’après-Vatican I permet de voir dans quelle direction vont ses exigences. Il note que la facilité avec laquelle on adhère à une nouvelle définition pontificale ou conciliaire peut être le fruit d’une foi vigoureuse, mais cette facilité à suivre le magistère peut également être l’indice d’une grande superficialité. On n’éprouve aucune difficulté à professer le nouvel article de foi, on ne sent aucune gêne devant des contradictions apparentes, tout simplement parce que l’on ne se soucie ni du contenu de l’ancien enseignement, ni du contenu du nouveau. Au fond, on ne se souci pas de la Tradition.

Zenit – En d’autres termes, pour Newman, les nouvelles décisions, les nouveaux enseignements sont toujours conformes aux enseignements qui nous viennent du passé, par la voie de la Tradition. La charité pastorale exige, de la part de ceux qui en sont capables, de le montrer. Est-ce là la position de Newman ?

Père Stern – Absolument oui.

Zenit – Mais la charité pastorale ne demande-t-elle pas, plutôt, qu’on s’abstienne d’imposer de nouveaux enseignements ?

Père Stern – La charité demande que la Parole de Dieu soit transmise dans son intégralité. Or, comme le rappelle Newman, la Tradition transmet des mystères qui dépassent l’entendement humain. Parfois surgissent de nouvelles questions, de nouveaux problèmes. La fidélité aux données reçues par voie de Tradition entraîne l’absolue nécessité de donner de nouvelles précisions, puisque de nouvelles difficultés ou questions ont surgi. C’est ce qui arriva au cinquième siècle en christologie. Ceux qui, alors, se sont crispés sur l’ancienne formule, employée par saint Cyrille d’Alexandrie et ont refusé la formule nouvelle, ont sombré dans le schisme et parfois dans l’hérésie.

Zenit – Mais ces nouveaux enseignements, ces nouveautés, ne risquent-elles pas d’être, en réalité, en contradiction avec la Tradition authentique ?

Père Stern – Bien sûr que oui. Mais voici justement la grande découverte faite par Newman en 1839 : la grâce d’avoir su conserver, dans l’Eglise, l’absolue fidélité à la Tradition authentique au milieu de la confusion créée par les hérétiques du cinquième siècle, cette grâce appartenait à Rome et aux Eglises en communion avec Rome, et non pas aux zélateurs de l’ancienne formule. Une fois que Newman eut compris que c’était là un charisme propre au siège apostolique et non pas une réalité passagère, il rejoignit l’Eglise de Rome.

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ZENIT Staff

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