La prière catholique pour le peuple juif le Vendredi Saint, précisions

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Du côté catholique et par un rabbin

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ROME, Mercredi 19 mars 2008 (ZENIT.org) – Clarifier la position de l’Eglise lorsque, le Vendredi Saint, elle prie pour les Juifs, c’est le but d’une lettre que le cardinal secrétaire d’Etat Tarcisio Bertone pourrait adresser aux grands rabbins d’Israël, selon l’agence Reuters.

Pour sa part, un rabbin n’hésite pas à affirmer que « lorsque Israël se réunit pour prier, il demande à Dieu d’éclairer le cœur des gentils ».

Une polémique est en effet née à l’occasion de la modification voulue par Benoît XVI de la prière du Vendredi saint dans le rite catholique « extraordinaire » selon le rituel de Jean XXIII, et dont la célébration a été autorisée par le pape.

Le cardinal Bertone pourrait rappeler que la prière latine, modifiée pour ne pas offenser le judaïsme, n’est « pas un appel à la conversion ou du prosélytisme et qu’il ne s’agit pas de tourner le dos au dialogue entre les deux religions ».

Car cette prière ne constitue en aucune façon « un appel à l’action missionnaire » en direction du judaïsme.

Le texte de référence de l’Eglise en matière de dialogue avec le judaïsme demeure la déclaration conciliaire sur les relations avec les religions non chrétiennes, « Nostra Aetate », adoptée par les pères conciliaires en 1965, devrait réaffirmer la lettre.

Mais vendredi prochain, le Vendredi saint, dans la très grande majorité des églises catholiques, on priera pour les juifs en utilisant la formulation habituelle du missel de Paul VI (de 1970, après la réforme conciliaire) afin que Dieu « les aide à progresser toujours dans l’amour de son nom et dans la fidélité à son alliance ».

Sur ces deux prières, le président du Conseil pontifical de la culture, Mgr Gianfranco Ravasi, bibliste, a fait observer dans les colonnes de la « Civiltà Cattolica », la revue des Jésuites de Rome, publiée après le nihil obstat de la secrétairerie d’Etat :

« Il s’agit là, écrit Mgr Ravasi, de la vision chrétienne et c’est l’espérance de l’Eglise qui prie. Ce n’est pas une proposition programmée d’adhésion théorique ni une stratégie missionnaire de conversion. C’est l’attitude caractéristique de la prière d’invocation par laquelle on souhaite aussi, pour les personnes que l’on considère comme proches, chères et importantes, une réalité que l’on juge précieuse et salvatrice. (…) C’est une manifestation d’affection que de souhaiter aussi à un frère ce que l’on considère comme un horizon de lumière et de vie ».

Il ajoute, en citant la prière habituelle de l’Eglise catholique : « Comme le dira l’Eglise dans sa prière, le prochain Vendredi Saint, selon la liturgie du Missel de Paul VI, notre commune et ultime espérance est que « le premier peuple de l’alliance avec Dieu puisse parvenir à la plénitude de la rédemption ». »

Pour sa part, le rabbin Jacob Neusner a fait observer que « dans le judaïsme, l’on demande à Dieu d’éclairer les nations et de les accueillir dans son royaume. C’est justement pour souligner davantage cette aspiration que la prière ‘Il est de notre devoir’ est suivie par le Kaddish suivant : ‘Puisse-t-Il établir son règne pendant votre vie et dans les jours et la vie de toute la maison d’Israël’. » 

Le rabbin apporte ces précisions après une analyse précise de différentes prières juives également dans la « Civiltà Cattolica »: « Ces passages tirés de la liturgie quotidienne du judaïsme ne laissent aucun doute sur le fait que, lorsque Israël se réunit pour prier, il demande à Dieu d’éclairer le cœur des gentils. La vision eschatologique puise sa force dans les Prophètes et dans leur vision d’une seule humanité réunie, ainsi que dans une liberté d’esprit qui s’étend à l’humanité toute entière. La condamnation de l’idolâtrie accorde peu de réconfort au christianisme ou à l’islam, qui ne sont pas mentionnés. Les prières demandent à Dieu d’accélérer la venue de son règne ».

Il conclut : « Ces prières juives correspondent à celle qu’a voulue Benoît XVI, demandant le salut de tout Israël quand sera arrivée la fin des temps et que l’humanité tout entière entrera dans l’Eglise. Les prières de prosélytisme juives et chrétiennes ont en commun le même esprit eschatologique et ouvrent la porte du salut à tous les hommes. La prière ‘Il est de notre devoir’ comme la prière catholique ‘Prions aussi pour les juifs’ sont l’expression concrète de la logique du monothéisme et de son espérance eschatologique ».

Nous annoncions en effet récemment que jusqu’à l’an dernier, la liturgie du Vendredi Saint selon le rite du missel latin de Jean XXIII (de 1962, autorisé de façon exceptionnelle par Benoît XVI le 7 juillet dernier) invitait à prier pour les juifs « afin que Dieu notre Seigneur enlève le voile qui aveugle leurs cœurs et qu’ils reconnaissent eux aussi Jésus Christ notre Seigneur ».

L’oraison suivante demandait : « Dieu éternel et tout-puissant, vous ne refusez jamais votre miséricorde, même aux juifs incrédules ; exaucez les prières que nous vous adressons pour ce peuple aveuglé, afin qu’en reconnaissant la lumière de votre Vérité, qui est le Christ, il soit arraché à ses ténèbres. Nous vous le demandons par le même Jésus Christ, Amen ».

Or, une note de la secrétairerie d’Etat publiée dans « L’Osservatore Romano » en italien du 6 février 2008, indique une modification demandée et approuvée par Benoît XVI (décret du 4 février 2008) : on prie désormais en latin pour les juifs  « afin que Dieu notre Seigneur éclaire leurs cœurs et qu’ils reconnaissent en Jésus Christ le sauveur de tous les hommes » (cf. Zenit du 7 février 2008).

L’oraison dit ensuite : « Dieu éternel et tout-puissant, qui veux que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité, permets, dans ta bonté, que, par l’entrée de tous les peuples dans ton Eglise, Israël tout entier soit sauvé. Par le Christ notre Seigneur. Amen ».

Anita S. Bourdin

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ZENIT Staff

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