L’histoire de l’icône de Kazan est liée à celle du peuple russe

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CITE DU VATICAN, vendredi 3 septembre 2004 (ZENIT.org) – Lors de l’audience générale du mercredi 25 août, en la salle Paul VI du Vatican, le pape Jean-Paul II a remis au cardinal Walter Kasper l’icône de la Mère de Dieu de Kazan, la « Kazanskaïa », pour qu’il la remette au patriarche orthodoxe russe, Alexis II, lors de la fête de l’Assomption, le 28 août dernier. L’histoire de l’icône est liée à celle du peuple russe.

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Avant d’être confiée à Jean-Paul II, cette icône a voyagé pendant six ou sept siècles, échappant aux guerres, aux incendies, aux vols, ce qui a même fait douter de son origine.

C’est une icône représentant la Vierge « hodigitria », qui « montre le chemin », c’est-à-dire l’Enfant Jésus. L’image ou une copie de l’original est arrivée de Constantinople à Kazan, sur les rives de la Volga, au XIIIe siècle. Au XVIe s. sa trace est perdue : peut-être a-t-elle été cachée par peur de l’arrivée des Tartars qui ont envahi le ville en 1555.

Selon la chronique du métropolite Hermine de Kazan, après l’incendie qui a détruit la ville en 1579, la Vierge serait apparue à une jeune fille nommée Matriona et lui aurait indiqué, dans les cendres d’une maison, l’endroit où elle devait retrouver l’icône.

Tout d’abord incrédule, le patriarche rapporte que le peuple a accueilli l’icône comme un « trésor inestimable ». Il confesse : « Malgré mon cœur dur comme une pierre, j’ai éclaté en larmes et je me suis jeté au pied de l’icône ». Dès lors de nombreux miracles furent attribués à l’intercession de la Vierge de Kazan, et les tsars, comme Ivan IV le Terrible, ont eux-mêmes fait construire des églises en son honneur.

Une copie de l’icône fut adressée aux princes Minin et Pozharski, qui l’ont portée comme un étendard lors de la bataille contre les Polonais qui assiégeaient Moscou, et ils libérèrent la ville, le 22 octobre 1612. Un monument fut édifié à la mémoire des deux héros sur la Place Rouge, et, en action de grâce, la voisine « cathédrale de Kazan », pour abriter l’image considérée comme miraculeuse.

Chaque année, la Vierge de Kazan fut fêtée le 22 octobre, et son icône devint celle de la famille des tsars. En 1721, Pierre le Grand déplaça sa capitale à Saint-Pétersbourg et transféra la précieuse icône dans la nouvelle cathédrale. L’écrivain russe Boulgakov parle de la présence de l’icône de la Vierge de Kazan dans cette cathédrale en 1900.

Mais, recouverte d’un manteau d’argent et de pierre précieuses, elle fut volée quatre ans plus tard. Dès lors, on perdit sa trace. Peut-être a-t-elle été vendue aux enchères, comme beaucoup d’autres icônes à la faveur de la Révolution bolchevique de 1917, qui s’accompagna du pillage des églises.

En 1970, elle est réapparue aux Etats-Unis, dans une vente aux enchères, et une association catholique mariale « l’Armée bleue » l’a acquise grâce à une fondation de deux millions de dollars, dans l’intention d’en faire le don au sanctuaire de Fatima, la Vierge ayant demandé, lors des apparitions de 1917, de prier pour la Russie. Et la révélation du troisième « secret » de Fatima, le 13 mai 2000, a dévoilé combien le pape polonais se sait lié au sanctuaire de la Vierge de Fatima.

Mais l’icône, transférée de Fatima au Vatican, fut offerte en 1993 à Jean-Paul II, qui l’a conservée dans sa chapelle privée, dans l’intention de la remettre quand le moment serait venu à l’Eglise orthodoxe russe et à la vénération du Peuple russe. Elle n’avait jusqu’ici jamais été montrée en public ni photographiée, sauf lors de la visite du président Vladimir Poutine au Vatican, le 5 novembre 2003.

Elle est également liée à la protection du peuple russe au moment de l’invasion de Napoléon Ier, indiquait la semaine dernière au micro de Radio Vatican, Mgr Michel Berger, sous-secrétaire de la Commission pour les Biens culturels de l’Eglise, et expert en art byzantin.

« En plus de son origine miraculeuse, il y a le fait, disait-il, que cette Vierge, surtout aux XVIIe et XVIIIe siècles, au moment où la Russie moderne a vécu des périodes très difficiles, la dévotion envers cette Vierge s’est renforcée. Il y a ensuite des événements historiques précis, comme la victoire sur l’invasion napoléonienne. Le général Koutousov lui-même avait emporté l’icône conservée jusque-là dans la cathédrale de la Kazan pour la protéger des éventuelles menaces de l’invasion napoléonienne. La Vierge de Kazan est ainsi devenue Celle qui a protégé et défendu la Russie contre ces attaques. C’est ce qui l’a rendue très populaire. Il n’y avait pas une seule maison où il n’y avait une icône de la Vierge de Kazan, qui était offerte aux jeunes mariés ».

Pourtant une commission conjointe d’experts du Vatican et du patriarcat de Moscou a examiné l’icône pour s’assurer de son authenticité. L’icône serait une copie de l’original. Quelle est sa valeur non seulement artistique mais cultuelle ?

« Une valeur immense, répondait Mgr Berger. Même si artistiquement du point de vue strictement artistique sa valeur n’est pas immense, l’original a eu un rôle immense dans l’histoire et la dévotion du peuple russe, comme le montre aussi le caractère précieux des joyaux des ex-voto. Cela représente une dévotion non à l’œuvre sur bois de tilleul, mais à la Mère de Dieu qui s’est manifestée dans la ville de Kazan et dans l’histoire même de la Russie de ces derniers siècles ».

Enfin, pour ce qui est de l’importance œcuménique de ce geste, Mgr Berger ajoutait : « L’importance réside dans le fait que la remise de cette icône s’est faite, somme toute, de façon très discrète. Il se peut que cette dimension ascétique et sans triomphalisme apporte des fruits abondants et surtout cette réconciliation, cette compréhension que nous espérons voir advenir entre l’Orient et l’Occident chrétien ».

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ZENIT Staff

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