L'état actuel de la recherche de l'unité des chrétiens

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Entretien avec Mgr Brian Farrell, L.C., secrétaire du Conseil pour l’Unité des Chrétiens

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CITE DU VATICAN, dimanche 25 janvier 2004 (ZENIT.org) – « L’impatience est une grande tentation contre l’œcuménisme » affirme le secrétaire du Conseil Pontifical pour l’Unité des Chrétiens, Mgr Brian Farrell, L.C.

A l’occasion de la Semaine de Prière pour l’Unité des Chrétiens, Mgr Brian Farrell a accepté de dresser pour Zenit un bilan de l’état dans lequel se trouve aujourd’hui la recherche de l’unité entre les chrétiens.

Zenit : Quel est l’état actuel de la recherche de l’unité des chrétiens ?

Mgr Brian Farrell : Il y a des ombres et des lumières. Au niveau local, dans les paroisses, les diocèses ou les associations, on peut voir des succès œcuméniques importants. Toutes sortes d’activités communes ou de coopération sont mises en place. Les gens sont en général convaincus qu’il est impossible de revenir sur la recherche de l’unité que le Christ souhaite pour ses disciples. Il y a un renouveau d’intérêt pour l’œcuménisme « spirituel » c’est-à-dire la prière pour l’unité et la purification de l’idée que les communautés ont les unes des autres. Parmi les ombres, il y a ceux qui se découragent parce que c’est si long. Ce n’est pas toujours facile d’impliquer les jeunes générations, qui n’ont peut-être pas vu combien les relations entre les chrétiens divisés ont changé au cours des dernières décennies; et puis, une chose importante, après que les différents dialogues œcuméniques aient mis en lumière les nombreux points que les chrétiens ont en commun, l’heure est maintenant venue de faire face aux différences plus profondes entre les Eglises, et ceci demande un effort plus patient et plus pénétrant. L’impatience est une grande tentation contre l’œcuménisme.

Zenit : Parlez-nous des relations entre l’Eglise catholique et les Eglises orthodoxes…

Mgr Brian Farrell : Des progrès énormes ont été réalisés ces dernières années dans les relations et la coopération avec les différentes Eglises Orthodoxes individuellement. Il y a des contacts réguliers et des échanges d’idées avec pratiquement toutes les Eglises orthodoxes. Il y a des visites de délégations fréquentes. On ne peut pas en faire la liste ici. Il y a un effort de plus en plus grand pour faire face à des défis communs ensemble, surtout en Europe. Tout ceci est malheureusement parfois dominé par l’insistance des media sur les tensions et les malentendus qui peuvent exister et existent vraiment dans certains cas.
Dans la nouvelle situation apparue en Europe de l’est depuis la chute du communisme, la présence catholique est davantage visible et ceci est parfois perçu comme une menace par les orthodoxes. Ils ont un concept plus large du prosélytisme que nous à l’ouest, et cela donne naissance à des tensions. Ceci s’applique particulièrement à de nombreux événements accompagnant la réapparition de l’Eglise gréco-catholique en Ukraine. Nous ne pourrons surmonter ces difficultés sérieuses qu’à travers une charité fraternelle excluant toute rivalité et compétition, une charité qui soit vraiment un échange de dons.
Un autre signe important montrant que nous faisons des progrès : le gros effort qui a été fait des deux côtés pour relancer le dialogue théologique international entre l’Eglise catholique et les Eglises orthodoxes dans leur ensemble, interrompu ces dernières années. Le comité de coordination du dialogue sera convoqué très prochainement pour proposer un chemin à suivre.

Zenit : Que pouvez-vous nous dire des relations avec les anciennes Eglises d’Orient ?

Mgr Brian Farrell : Ce sont les Eglises qui n’ont pas subi l’influence de l’Empire romain et qui ont développé leurs propres traditions dans le domaine théologique et ecclésiastique : les Coptes, les Syriens orthodoxes, l’Eglise Apostolique d’Arménie, l’Eglise Orthodoxe d’Ethiopie, l’Eglise Malankare. Le Conseil Pontifical pour la Promotion de l’Unité des Chrétiens a entamé un nouveau dialogue avec ces Eglises.
Le dialogue a également été ouvert avec les Eglises assyriennes d’Orient. Ces Eglises sont surtout présentes au Moyen Orient. Etant donné la situation actuelle de conflits et de divisions, les responsables des Eglises Orthodoxes d’Orient sont conscients du besoin de renforcer la coopération au niveau pastoral et social. Sur le plan œcuménique elles essaient de travailler de plus en plus ensemble, comme une famille d’Eglises. Après une rencontre préparatoire avec des représentants de ces Eglises ici à Rome l’an dernier, la première session du dialogue aura lieu cette semaine au Caire. Le Saint-Siège sera représenté par le cardinal Kasper et on espère que la rencontre pourra surtout renforcer les formes de coopération et de communion qui existent déjà.

Zenit : … et des relations avec la Communion anglicane ?

Mgr Brian Farrell : Comme tout le monde le sait, l’année dernière a été une année particulièrement intense dans ce domaine. La première visite du nouvel archevêque de Canterbury, Dr Rowen Williams, au pape, a été extrêmement positive, en ce sens qu’elle a consolidé la nature spéciale des relations entre les anglicans et les catholiques et qu’elle a ouvert la voie à des contacts plus fréquents et « presque institutionnels ». Il est vrai toutefois que les difficultés internes de la Communion anglicane ne peuvent qu’avoir des conséquences sérieuses sur les relations œcuméniques. La Communion anglicane doit maintenant clarifier la manière dont elle entend rester unie en tant que Communion. Notre dialogue théologique (ARCIC) va se poursuivre, mais l’autre instrument officiel de dialogue entre anglicans et catholiques (IARCCUM) ne se réunira pas en tant que corps. Il travaillera à travers une sous-commission spéciale pour mettre en lumière, à partir de déclarations déjà approuvées, les principes ecclésiologiques qui pourraient être utiles en ce moment. Comme vous le voyez, loin de fragiliser notre dialogue, cette période de défi a intensifié nos échanges œcuméniques.

Zenit : Comment sont les rapports avec les Communautés ecclésiales issues de la Réforme ?

Mgr Brian Farrell : Les relations entre les catholiques et les luthériens ainsi que les Communautés issues de la Réforme ont continué à se développer et à s’améliorer depuis la signature solennelle de la Déclaration Commune sur la Doctrine de la Justification à Ausgburg en 1999. Il y a des rencontres annuelles et toute une série de discussions et de conversations. Si l’on regarde l’année qui vient de s’écouler on voit combien il est important que la communion spirituelle dans la prière et le culte, les rencontres humaines et les discussions théologiques contribuent ensemble à affirmer le but de l’unité pleine et visible de l’Eglise. Des représentants de la Fédération Luthérienne Mondiale et du Conseil Pontifical pour la Promotion de l’Unité des Chrétiens se rencontrent régulièrement au moins une fois par an pour des consultations entre les membres de la Fédération et du Conseil pontifical, en alternance à Rome et à Genève, sur toutes les questions urgentes concernant leurs relations.

La Commission internationale commune de dialogue entre méthodistes et catholiques a célébré son 35ème anniversaire en 2002 et est entrée dans une nouvelle phase de dialogue prometteuse. Les méthodistes étudient la possibilité de ratifier officiellement les accords contenus dans la Déclaration Commune sur la Doctrine de la Justification entre l’Eglise catholique et la Fédération Mondiale Luthérienne.

Le dialogue se poursuit avec l’Alliance Mondiale des Eglises Réformées. Il se trouve dans sa troisième phase. Nous recherchons les fondements bibliques et théologiques de notre témoignage commun dans le monde. Il y a également une série de conversations pleine de promesses avec les Mennonites, l’Alliance Baptiste Mondiale et les
Disciples du Christ.

Le dialogue entre catholiques et pentecôtistes est en cours depuis 1972 au niveau international à travers un groupe de responsables et de communautés du pentecôtisme classique. Ceci permet d’affronter les malentendus réciproques et de mieux apprendre à comprendre les schémas du discours de chacun et sa manière de vivre le message chrétien.

Il y a un contact permanent et des échanges entre le Conseil Pontifical pour la Promotion de l’Unité des Chrétiens et le Conseil Mondial des Eglises à Genève.

Zenit : Qu’est-ce qui alimente le travail œcuménique et les progrès ?

Mgr Brian Farrell : Comme vous le voyez, le monde œcuménique est vaste et diversifié. L’image globale de ce monde est une image de succès et de progrès. Nous savons que l’unité sera un don de Dieu et pas un exploit humain.

Il est important de retourner au cœur du concept du mouvement œcuménique, à l’élan qui l’a soutenu et inspiré depuis le début, et de développer sur cette base de nouvelles énergies pour un vrai dialogue et un nouvel engagement dans ce dialogue. L’œcuménisme spirituel qui a inspiré la Semaine de Prière pour l’Unité des Chrétiens a été crucial au début du mouvement œcuménique et continue de le soutenir. L’œcuménisme de vie et d’amour doit être renouvelé à tous les niveaux, de la théologie à l’activité pastorale. Si la coopération œcuménique pouvait créer de plus en plus de « lieux de rencontre d’unité dans la diversité », ceci ferait naître des occasions d’apprentissage intensif et d’action ; ceci permettrait d’offrir l’expérience d’une communion en action, enrichissante, qui réconcilie, comme moyen d’approfondir les liens entre les chrétiens sur la base du baptême commun et de la foi commune en Jésus-Christ unique Seigneur.

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ZENIT Staff

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