L’Aide à l’Eglise en Détresse face au défi de la crise économique

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Entretien avec le secrétaire général, Pierre-Marie Morel

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ROME, Dimanche 14 décembre 2008 (ZENIT.org) – Grâce aux 700 000 donateurs de l’Aide à l’Eglise en Détresse, un séminariste sur six dans le monde peut se préparer au sacerdoce. Mais la crise économique actuelle frappe aussi durement l’AED.

Dans cet entretien, le secrétaire général de l’œuvre, Pierre-Marie Morel, fait le bilan de sa première année au service de l’AED.

Zenit – Monsieur Morel, en janvier dernier vous abandonniez un poste de vice-président du groupe EADS pour prendre la responsabilité de l’Aide à l’Eglise en Détresse (AED) comme secrétaire général international. Quelles sont les grandes lignes de votre action depuis un an ?

P.-M. Morel – Depuis un an je me suis attaché à comprendre les enjeux. J’ai commencé par écouter en interviewant systématiquement tous ceux qui travaillent pour notre oeuvre, que ce soit au siège en Allemagne mais aussi dans nos 17 bureaux nationaux. Ce temps passé avec chacun m’a permis de me faire une première idée des priorités.

Avec ses 300 permanents entourés de nombreux volontaires, prêtres et laïcs, le personnel est une des grandes forces de cette œuvre avec son engagement, sa foi et son professionnalisme. Cette force est un trésor dont il faut bien s’occuper. C’est la raison pour laquelle la plupart des actions prises concernent le personnel et les moyens mis à leur disposition.

Un autre des grands chantiers de l’année 2008 et qui va s’achever en 2009 est la mise en place d’un logiciel commun pour nos bureaux nationaux. Pour mieux connaître nos donateurs et mieux répondre à nos besoins. Nos donateurs sont extraordinaires. Ils sont fidèles et généreux car ils connaissent les enjeux et les besoins de l’Eglise catholique dans le monde. Ils sont aujourd’hui environ 700 000 et soutiennent la mission pastorale de l’Eglise par leur prière fidèle. Ils font dire une messe toutes les 27 secondes dans le monde avec une intention particulière et soutiennent ainsi la grande prière de l’Eglise unie à l’Eglise du ciel dans sa supplication pour faire connaître la bonne nouvelle de l’évangile, apporter la paix et l’unité au monde et soulager les souffrances. Grâce à eux, un séminariste sur six dans le monde peut se préparer au sacerdoce, des fidèles peuvent prier dans des chapelles, les prêtres et les sœurs peuvent continuer leur mission pastorale. Plus de 5000 demandes d’aide sont ainsi honorées grâce à eux tous les ans. Je rends grâce à Dieu pour leur fidélité.

Zenit – Comme secrétaire général vous êtes un observateur privilégié des souffrances de l’Eglise dans le monde ? N’est ce pas démoralisant ?

P.-M. Morel – Vous savez, le Christ a donné sa vie pour chacun de nous. La victoire est déjà annoncée, elle est au bout du chemin. Toutes les souffrances dont nous sommes les premiers témoins sont le terreau et la semence de l’Eglise. Nous sommes invités à prier et à adorer en nom et place de ceux qui ne peuvent le faire. Nous sommes au cœur du mystère de la communion des Saints qui est une arme efficace contre la désespérance. Au siège social messe et adoration quotidienne nous renvoient personnellement à cette responsabilité.

Dans l’Espérance nous avons tous été sauvés dit Saint Paul aux Romains !

Il faut lire l’encyclique Spe salvi de notre cher pape Benoît XVI. Au chapitre 3 à propos de Joséphine Bakhita il dit : « l’exemple d’une sainte de notre temps peut en quelque manière nous aider à comprendre ce que signifie rencontrer ce Dieu pour la première fois et réellement. » 

Joséphine est née au Soudan dans le Darfour. Enlevée par des trafiquants d’esclaves, battue jusqu’au sang, vendue plusieurs fois, elle finit par connaître un maître totalement différent qui lui permit de rencontrer Dieu. « Désormais elle avait une espérance – dit le Saint Père – non seulement la petite espérance de rencontrer des maîtres moins cruels mais la grande espérance : « Je suis définitivement aimée et quel que soit ce qui m’arrive, je suis attendue par cet amour. Et ainsi ma vie est bonne. Par la connaissance de cette espérance elle était rachetée, elle ne se sentait plus une esclave mais une fille de Dieu libre. »

Alors démoralisant ? Non ! Dans l’espérance ! Nous sommes nourris des témoignages de Sainte Joséphine Bakhita mais aussi de tous les Saints d’aujourd’hui qui donnent leur vie pour le Christ et dont nous sommes les premiers témoins.

Nous étions à Nairobi il y a deux semaines avec mon épouse Anne, pour le congrès de la Fédération Africaine de l’Action Familiale (FAAF) présidée par Danièle Sauvage. Nous avons été édifiés par la force et la profondeur des témoignages des représentants des 17 pays présents prêts à travailler ensemble pour sauver les valeurs familiales conformément à l’enseignement de l’Eglise. Espérance pour la vie.

En Palestine nous avons rencontré des chrétiens qui forcent l’admiration en ne demandant que de pouvoir rester vivre et prier sur leur terre pour demeurer un signe de paix entre toutes les communautés. Espérance pour la paix.

En octobre dernier nous étions à Lisieux avec Anne pour la béatification de Louis et Zelie Martin parents de Sainte Thérèse de l’enfant Jésus. Quel exemple pour tous les parents du monde qui choisissent la vie et qui accueillent la volonté du Seigneur au quotidien ! Espérance pour la famille.

A la cathédrale de Westminster j’ai trouvé dans ma rencontre avec Monseigneur Jean Benjamin Sleiman archevêque de Bagdad une grande espérance malgré la précarité de la situation des chrétiens en Iraq. Espérance contre toute espérance.

Quelle richesse dans cette réunion avec la conférence épiscopale et le nonce apostolique de Russie qui ont besoin de notre aide pour continuer à développer leur projets pastoraux. Espérance de ceux qui ont confiance.

Après Gethsémani, après le vendredi saint il y a la résurrection !

Zenit – Depuis quelques mois une grave crise financière et économique s’est abattue sur le monde. Quelles conséquences voyez-vous pour l’Aide à l’Eglise en Détresse ?

P.-M. Morel – Devant de tels évènements nous avons deux solutions. Celle du pessimisme, du repli sur soi et de l’abandon. Ou bien celle de ceux qui savent que de tout mal, Dieu peut tirer un bien. C’est mon choix. J’ai lancé le mois dernier le programme « Cap 2012 » ( en Anglais Cape 2012) pour mobiliser toute notre œuvre face à cette crise. Ce programme a été présenté au comité des directeurs ainsi qu’au Conseil général de l’œuvre réuni à Rome la semaine dernière. Car si la crise économique affecte les grands pays industrialisés, nous savons bien que les pays pauvres en sont les premières victimes.

Nous estimons qu’en 2012 nous aurons besoin de 100 millions d’euro pour faire face à toutes les demandes. Il nous manque 20 millions d’euro par an. La croissance des dons proviendra de nos bureaux existants mais aussi de nouveaux bureaux là où des chrétiens peuvent participer à cet extraordinaire élan de solidarité.

Devant cette urgence, dans le numéro de janvier 2009 du Bulletin, je demande à tous les donateurs de prier. Je leur demande de donner dès 2009 un euro de plus par mois et de trouver chacun un nouveau donateur en expliquant le pourquoi de cette urgence.

Parallèlement à cela nous mettons en place un programme de réduction de coûts afin d’orienter le maximum de fonds vers les projets. Ainsi avec la grâce de Dieu qui ne nous a jamais abandonnés nous avons confiance dans l’avenir et par cette mobilisation sans précédent nous avons bon espoir de répondre à la demande.

Zenit – Vous parlez de nouveaux bureaux, à quels pays pensez-vous ?

P.-M. Morel – Les critères à prendre en compte pour ouvrir de nouveaux bureaux son
t nombreux et complexes. D’abord les bureaux nationaux existants ont des projets pour se développer. Ensuite de nouveaux pays pourraient devenir des pays donateurs dans les prochaines années. Certains pays potentiels sont à l’étude.

Zenit – On dit qu’après la mort des fondateurs, les organisations passent toujours par des périodes difficiles. Qu’en est il de l’Aide à l’Eglise en Détresse depuis la mort du Père Werenfried ?

P.-M. Morel – C’est vrai. Comme toutes les organisations dans le monde la perte de son fondateur est une étape douloureuse et la surmonter nécessite humilité, engagement et prière.

L’Aide à l’Eglise en Détresse a la chance d’avoir été érigée par le Pape Jean Paul II en association publique de fidèles rattachée à la Congrégation pour le clergé.

Sous l’impulsion de notre cher nouveau Président le Père Joaquin Alliende Luco, ce lien étroit avec l’Eglise a été et restera déterminant pour la fidélité de cette œuvre au charisme de son fondateur et pour l’unité de ses membres au sein de l’Eglise catholique.

Enfin son indépendance financière en fait une organisation totalement libre au service de l’Eglise universelle.  

Zenit – Monsieur Morel nous arrivons à la fin de cet entretien. Que souhaitez vous nous dire pour cette nouvelle année ?

P.-M. Morel – C’est l’année Saint Paul ! Pour notre œuvre, il est intéressant de savoir que la communauté à laquelle Paul est resté le plus attaché est celle des Philippiens. Bien qu’emprisonné là-bas, puis relâché, Paul garda de nombreux contacts avec ceux qui ont organisé un soutien financier pour l’aider dans ces activités d’évangélisation. Nos donateurs sont les Philippiens d’aujourd’hui ! Ecoutons Saint Paul s’adresser aux Philippiens au chapitre 4.

« Réjouissez-vous sans cesse dans le Seigneur, je le dis encore réjouissez-vous. Que votre modération soit connue de tous les hommes. Le Seigneur est proche. N’entretenez aucun souci. Mais en tout besoin recourez à l’oraison et à la prière pénétrée d’action de grâce pour présenter vos requêtes à Dieu. Alors la paix de Dieu qui surpasse toute intelligence prendra sous sa garde vos cœurs et vos pensées dans le Christ Jésus ».

Puisse cette adresse de Paul aux  Philippiens être notre programme à tous en 2009 pour que nous demeurions les messagers de l’Espérance dont le monde a besoin.

Bonnes fêtes de Noël et bonne et sainte année 2009 !

Si vous voulez aider l’AED (http://www.acn-intl.org) vous pouvez le faire immédiatement en envoyant un message à l’adresse suivante aed@aed-france.org (pour la France) ; info@kin-aed-be.org (pour la Belgique francophone) ; info@kin-aed-be.org (pour la Belgique flamande) ; mail@aide-eglise-en-detresse.ch (pour la Suisse francophone) ; info@acn-aed-ca.org (pour le Canada).

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ZENIT Staff

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