"L’Afrique est un continent où la paix pourrait devenir une réalité" (2)

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En Afrique, la diffusion d’armes légères est une plaie bien connue

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CITE DU VATICAN, Mercredi 28 juillet 2004 (ZENIT.org) – « L’Afrique est un continent où la paix pourrait devenir une réalité », estime Fides, au lendemain de l’appel de Jean-Paul II et du voyage de son envoyé spécial au Darfour, Mgr Paul Josef Cordes, président de Cor Unum. Mais Fides dénonce, à la suite des interventions du Saint-Siège à l’ONU, « la diffusion d’armes légères » comme  » une plaie bien connue » et offre cette radiographie inquiétante des pays producteurs, des pays des licences, des transferts de technologie belliqueuse.

L’agence internationale Fides, organe de la congrégation romaine pour l’Evangélisation des Peuples, publie une étude sur le trafic d’armes en Afrique, en dessinant le cadre géopolitique et la carte de production des armes en Afrique, et conclut pourtant : « le désarmement est possible ».

Fides souligne l’option de la diplomatie française pour la « Capacité africaine de réagir à la crise » (CARC) ou le « Renforcement de la capacité africaine de la paix » (RECAMP), et la préférence donnée à des solutions impliquant l’ONU ou des alliances régionales pour la paix. Mais pour Fides, la rivalité entre de grandes puissances favorise le trafic d’armes.

La production militaire en Afrique, par Fides

En Afrique, la diffusion d’armes légères est une plaie bien connue qui contribue à l’instabilité de vastes régions du continent. En plus des armes provenant d’autres parties du monde (en particulier, mais non exclusivement, de l’Europe de l’Est), s’affirme une production locale qui pourrait avoir avec le temps des développements inquiétants. Parmi les pays africains producteurs d’armes, on trouve: l’Afrique du Sud, le Zimbabwe, le Nigeria, la Namibie, l’Ouganda, le Kenya et la Tanzanie, auxquels s’ajoute l’Egypte.

Le plus grand producteur est l’Afrique du Sud, qui a hérité, du régime de l’apartheid, une industrie perfectionnée et diversifiée. Actuellement, en Afrique du Sud, il y a 700 usines qui travaillent dans le secteur militaire et emploient 22.500 personnes (à la fin des années 1980, il y en avait 160.000).

La plus grande partie sont des petites et moyennes industries, et le colosse national est « Denel » qui contrôle les usines les plus significatives. Pour ce qui concerne les armes légères, les plus grand producteurs sont: Vektor (revolvers, fusils d’assaut, mitrailleuses, mortiers, canons automatiques de 20 mm) ; MGL Milkor Marketting (Pty) Ltd (lance-grenades automatiques) ; Mechem (fusils anti-matériel de 12, 7 et 20 mm) ; ARAM (Pty) Ltd (mitrailleuses lourdes de 12,7mm ; New generation Ammunition (munitions de petits et de gros calibres) ; LIW (petits canons de 30 et 35 mm) ; Truvelo Armoury Division (revolvers, fusils et pièces d’armes légères) ; Pretoria Metal Pressing! (PMP) (munitions 12,7 x 99 mm ; 12,7 x 76 mm ; 9 x 19 mm ; 7,62 x 51 mm ; 5,56 x 45 mm).

D’après les données officielles, le pays exporte des armes dans 61 pays, même si les régions privilégiées sont le Moyen-orient et l’Afrique. Le plus grand client est l’Algérie, même si ce pays est en proie à une guerre civile dans laquelle les forces de sécurité ont été accusées d’atrocités et de massacres contre les civils. Les clients les plus importants sont les suivants : Algérie, Inde, République Populaire de Chine, Emirats Arabes Unis, Taiwan, Singapour, Thaïlande, Cameroun, Chili, Colombie, Koweit, Oman, Pérou, Swaziland, Congo-Brazzaville, Botswana, Ouganda, Rwanda, Tunisie, Côte d’Ivoire, Kenya, Zambie, Mozambique et Mexique.

En 2001, 32 % des exportations sud-africaines ont été absorbées par l’Afrique. L’Algérie à elle seule représente 28% de toutes les ventes en Afrique. On vend notamment à ce pays africain, UAV (avions sans pilote) de reconnaissance, et un ensemble de mise à jour de la flotte d’hélicoptères de combat Mil Mi24 Hind, d’origine soviétique. Le reste des exportations se répartit de la sorte : 15% au Moyen-Orient, 16% en Asie du Sud; 15% dans le reste de l’Asie ; 16% en Europe ; 5% aux Amériques, et 1% aux Nations-Unies, équipements pour les Casques Bleus).

Tous les pays ne peuvent pas recevoir les mêmes systèmes produits par les industries sud-africaines. La loi sur l’exportation des armements a distingué 4 catégories de moyens qui sont soumis à un niveau différent de contrôle pour leur exportation :

Catégorie A: Sensitive Major Significant Equipment (SMSE) – c’est-à-dire toute arme qui peut faire un grand nombre de victimes et causer de grands dégâts.
Catégorie B: Sensitive Significant Equipment (SSE) – armes légères.
Catégorie C: Non-sensitive equipment (NSE) – systèmes utilisés dans le support des opérations de combat sans une capacité spécifique mortelle (par exemple, systèmes logistiques et pour les télécommunications).
Catégorie D: Non-lethal equipment (NLE) – (équipement non mortel) moyens défensifs comme les systèmes de déminage.

Et donc, certains pays peuvent acheter seulement les systèmes des deux dernières catégories (non mortelles), comme le Zimbabwe auquel les dernières fournitures remontent à 2000 et concernaient seulement les systèmes de la catégorie D.

Le Zimbabwe a hérité de son précédent régime lui aussi, d’une industrie embryonnaire de guerre (quand le pays s’appelait encore Rhodésie). Partant de cette base en 1984, on a fondé la « Zimbabwe Defence Industries » (ZDI). Cette usine produit des armes légères, des munitions et des mines. Le « savoir faire » pour la production d’explosifs et de mortiers a été fourni par la France, et la Chine a construit une fabrique de munitions pour des armes d’infanterie. Parmi les clients de la ZDI, il y a l’Angola (l’armée gouvernementale et les rebelles de l’UNITA), les rebelles soudanais et la République Démocratique du Congo. Au Congo, où les troupes de Mugabe soutiennent le président Kabila, en échange des fournitures de la ZDI, Harare est parvenue à obtenir la concession de 37,5% des actions de « Gecamines », l’usine minière de l’Etat du Congo.

Avant la fin de la guerre en Angola, il y avait en cours entre Luanda et Harare, des négociations pour la fondation en Angola d’un établissement commun pour la réalisation d’armements. Avec la fin de la guerre, toutefois, le gouvernement angolais semble avoir perdu l’intérêt dans cette entreprise.

La ZDI produit des armes légères (en particulier des copies de la mitraillette israélienne UZI et de la mitraillette tchèque CZ25), et surtout des munitions (De 9 mm à 20 mm), des projectiles de mortiers (60, 81, et 120 mm), des grenades anti-personnel et anti-chars. Parmi les clients officiels du Zimbabwe, il y a l’Afrique du Sud, le Malawi, le Botswana, la Tanzanie et la Zambie.

Toujours en Afrique orientale, l’Ouganda dispose, lui aussi, d’une petite industrie de guerre Dans ce pays il y a au moins trois usines d’armes. La plus grande, « Nakasongola Arms Factory », est de propriété chinoise (une « joint venture » entre le gouvernement de Pékin et des techniciens et entrepreneurs d’origine chinoise, nord-coréenne et sud-africaine). Cette usine se trouve dans la région de Gulu (où sévit depuis des années la Lord’s Resistance Liberation Army, LRA), et produit des armes légères et des mines, fournies à l’armée du Burundi et à l’UNITA angolaise. Il y a aussi la « Saracen” qui fournit l’armée ougandaise, et dont le propriétaire est la « Strategic Resources Corporation », nom derrière lequel se cache la célèbre « Executive Outcomes  » (EO), la Compagnie Militaire Privée sud-africaine (PMC), qui a cessé officiellement ses activités à la fin de 1999, mais que l’on suspecte de devoir agir derrière des noms plus discrets. Il y a enfin Ottoman, Engineering LTD, spécialisée dans les armes légères. Un des clients de l’industrie ougandaise
est la République Démocratique du Congo.

Au Kenya, la « Kenya Ordnance Factories Corporation » produit des munitions pour revolvers et fusils d’assaut (de 20 à 60.000 par jour). L’usine a été construite avec le concours de la FN belge et a été inaugurée en 2000. Le gouvernement du Kenya déclare que sa production est destinée seulement aux forces armées locales, et qu’elle n’a pas l’intention de concéder des licences d’exportation.

Le seul producteur d’armes de l’Afrique occidentale est le Nigeria. La « Defense Industries Corporation » (DICON) a été créée en 1964 par une loi spéciale, le « Defense Industries Corporation of Nigeria Act ». Cette industrie a eu un rôle important durant la guerre de sécession du Biafra (1968-1970). Confiée à des entrepreneurs étrangers, l’usine fut déclarée en faillite en 1972, et son directeur général, un allemand, fut expulsé du pays. La société a continué à fonctionner avec des hauts et des bas pendant trente ans environ, sous le régime des militaires. A la fin des années 1990, le nouveau gouvernement civil décida de relancer la production militaire. Dans ce but, on nomma un nouveau conseil d’administration de la DICON, et l’on établit des contacts avec la Russie pour le transfert de technologies.

L’usine nigériane emploie actuellement 700 personnes environ dans l’établissement de Kaduna où sont produites des armes légères et des munitions; l’usine de Bauchi produit des véhicules blindés légers. Officiellement, les armes produites sont destinées seulement aux besoins des forces armées et de la police du Nigeria.

Parmi le matériel produit il y a: Nigerian Rifle 1 Model 7,62 mm (RN. – 7,62, sur licence britannico-belge) ; Nigerian Pistol – Model 9MM (NPI – 9mm); Sub-Machine Gun (PM 12S Calibre 9MM sur licence de la Beretta italienne) DICON SG 1 – 86 Single Barrel Shot Gun; DICON M 36 Hand-Grenade; 7.62mm x 51 soft core (Ball) Cartridge 7.62mm X 51 Soft core (Ball); 7.62mm x 51 Blank Bulleted 9 x 19MM Parabellum Cartridge; 9MM Blank Star; 12 Bore Shot – Gun Cartridge.

En Afrique du Nord, le principal producteur d’armements est l’Egypte. Ce pays exporte aussi en Afrique sub-saharienne. En 1992, deux ans avant le génocide rwandais de 1994, on signa un contrat d’achat d’armes égyptiennes en faveur de l’armée rwandaise. Le contrat, garanti financièrement par une banque française, comprenait des mortiers de 60 et 82 mm, 16.000 projectiles de mortiers, des obus de 122 mm, avec 3.000 coups, des lance-roquettes, des explosifs au plastic, des mines anti-personnel et 3 millions de projectiles de petit calibre.

Parmi les producteurs égyptiens d’armes légères il y a : Abu Kir Engineering Industries / Factory 10 (munitions de petit calibre); Al-Ma’asara Company for Engineering Industries (MF 45) (munitions de petit et de gros calibre); Arab International Optronic (AIO) S.A.E (systèmes de pointage); Helwan Machine Tools Company / Factory 999 (mortiers); Kaha Company for Chemical Industries (MF 270) (grenades de fusils, grenades à mains); Maadi Company for Engineering Industries (revolvers, fusils, mitrailleuses légères et lourdes, lance-grenades ; Sakr Factory for Developed Industries (roquettes anti-char); Shoubra Company for Engineering Industries (MF 27) (munitions).

(à suivre : Un héritage de morts…)

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ZENIT Staff

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