« Je n'ai pas perdu la foi », déclare une victime d'abus sexuels

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Témoignage de Mme Marie Collins

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ROME, mardi 7 février 2012 (ZENIT.org) – « Je veux être catholique, je veux rester dans l’Église, je m’y attache de toutes mes forces car je veux en finir avec cette histoire (…). Mais je n’ai pas perdu la foi en Dieu et en Jésus Christ », déclare, douloureusement, Mme Marie Collins, Irlandaise, victime d’abus.

Elle a témoigné devant les participants du symposium organisé par l’Université pontificale grégorienne, ce mardi 7 février, à propos des réponses apportées et à apporter au scandale des abus sexuels dans l’Eglise. Elle s’est aussi confiée à Radio Vatican dans un entretien traduit par le service en français.

RV – Qu’attendez-vous de ce symposium ?

Marie Collins – Le fait que l’Eglise ait décidé de tenir un symposium sur ce thème est très important.

En tant que victime, j’ai beaucoup critiqué l’Église, ayant souffert – si l’on peut dire – de la main même de mon diocèse, lorsque j’ai voulu apporter devant la justice la personne qui avait abusé de moi. Mais nous ne pouvons vivre dans le passé : il nous faut aller de l’avant.

La chose la plus importante, l’unique chose importante, c’est la sécurité des enfants.

Et j’attends d’un tel symposium que les leaders de l’Église puissent avoir une meilleure connaissance, une plus grande compréhension de ce phénomène, et faire tout le possible pour que cela n’arrive plus, en élaborant des stratégies pour prévenir. On ne répètera jamais assez combien c’est important ! Ma plus grande préoccupation: que les lignes directrices mises en pratique ne soient pas suffisantes.

Il est donc important que chaque membre de la hiérarchie ecclésiastique qui n’applique pas ces directives en subisse les conséquences. Les paroles ne servent à rien si elles ne sont pas suivies d’actions. Il est évident que la question des abus n’est pas limitée à l’Église : qu’elle est partout dans la société. Mais si l’Église pouvait indiquer à la hiérarchie comment prévenir ce mal terrible, elle apporterait une grande contribution à la guérison de ces personnes profondément blessées par la manière dont l’Église a géré ce phénomène, et les aiderait à retrouver le respect.

De quoi ont besoin les enfants qui ont subi des abus, quand ils se rendent compte de ce qui leur est arrivé ?

Ce n’est pas tellement pour ce que la personne qui commet l’abus te fait physiquement, c’est plutôt pour ce que, toi victime, tu ressens psychologiquement.

J’avais une mauvaise opinion de moi-même, je me suis toujours considérée comme une personne méchante, une personne indigne. Je voulais que personne ne le sache. Souvent, les gens se demandent : pourquoi les enfants ne racontent-ils pas ce qui leur est arrivé ?

C’est parce qu’ils sont persuadés qu’ils ont commis quelque chose de très mal… ils ne peuvent le raconter. En eux grandit toujours plus la conscience qu’il y a quelque chose qui ne va pas. En ce qui me concerne, cela m’a provoqué une très grave dépression : je suis devenue phobique, avec des attaques de panique, je ne parvenais plus à travailler, je devais continuellement être hospitalisée en psychiatrie.

Il m’a fallu 30 ans pour pouvoir tout raconter à un médecin, faire face à cette histoire m’a beaucoup aidée. Cela fait maintenant 15 ans que je ne suis plus retomber en état de dépression, d’anxiété.

Selon moi, plus tôt on parvient à comprendre si un enfant a été victime d’abus, plus tôt on pourra lui venir en aide et plus tôt on parviendra à sauver le reste de sa vie.

Etes-vous parvenue à rester catholique et à vous réconcilier avec cette Église qui vous a trahie ?

Je me suis beaucoup engagée à travailler avec l’Église, à la maison, en collaborant avec le comité qui a rédigé les lignes directrices pour la protection des enfants, en travaillant avec le diocèse de Dublin pour organiser le bureau pour la protection des enfants. Cependant aujourd’hui encore, il m’est très, très difficile de pratiquer ma religion.

Je veux être catholique, je veux rester dans l’Église, je m’y attache de toutes mes forces car je veux en finir avec cette histoire. Mon espérance, c’est qu’à la fin, mon Église réussira à remédier à cette situation. Il y a un grand manque de respect et de confiance, chez moi, dans mon pays…Tout cela a été trop dévastateur… Mais ce qui a été le plus dur, ce n’est pas de découvrir qu’à l’intérieur de l’Église des personnes commettent des abus : cela arrive partout dans la société, aussi bien dans les milieux sportifs que dans les milieux éducatifs… Ce qui a été le plus dur c’est de découvrir que ces personnes étaient protégées par des hommes qui auraient dû protéger les enfants. Oui, c’est cela qui a causé tant de mal à la foi et à la confiance des gens et c’est ce qui m’a fait le plus de mal, mais je n’ai pas perdu la foi en Dieu et en Jésus Christ. Certes, j’ai beaucoup de difficulté à pratiquer ma religion, mais je reste là…

Traduction de Radio Vatican

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ZENIT Staff

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