Japon : « Le pape et l'Eglise ont été très proches »

Print Friendly, PDF & Email

Par l’ambassadeur près le Saint-Siège

Share this Entry
Print Friendly, PDF & Email

Propos recueillis par H. Sergio Mora

ROME, mardi 20 mars 2012 (ZENIT.org) – Un an après le tremblement de terre et le tsunami, le Japon réévalue le rôle de l’amitié, et les statistiques relèvent chez les jeunes une nouvelle envie de fonder une famille, comme l’explique aujourd’hui l’ambassadeur du Japon près le Saint-Siège, Hidekazu Yamaguchi, au premier anniversaire du tremblement de terre et du tsunami.

Excellence, que retenez-vous de la réponse du Saint-Siège et de l’Eglise à cette catastrophe?

Après la catastrophe, le pape a parlé deux ou trois fois durant l’angélus et nous avons envoyé ses paroles à Tokyo. Il a par ailleurs envoyé directement un télégramme à l’empereur Akihito, pour lui faire part de ses sentiments de tristesse et encourager la population japonaise.

<p>Mais ce n’est pas tout. Benoît XVI a envoyé sur place le cardinal Robert Sarah, président du Conseil pontifical Cor Unum. Et la Caritas internationale est intervenue, faisant appel à toutes les Caritas du monde  pour récolter des fonds en faveur des victimes de la catastrophe.

Il y a donc eu plusieurs initiatives…

Oui, il y en a eu de très intéressantes, par exemple celle du cardinal Antonio Maria Veglio, qui a créé un fonds en invitant tous le monde maritime à aider leurs collègues au Japon. Mais aussi celle du cardinal Bernard Francis Law, qui a organisé, le 20 avril dernier, un concert pour sensibiliser au problème, et auquel j’ai assisté volontiers. Il a été le premier à m’appeler directement chez moi, pour me faire ses condoléances.

Pour ne pas parler de la communauté de Sant’ Egidio qui a organisé une veillée de prière à l’église Santa Maria au Transtévère, à Rome, et de deux grands évènements et un concert organisés par l’université grégorienne.

Et de la Secrétairerie d’Etat?

Le cardinal Tarcisio Bertone a envoyé un télégramme à la conférence épiscopale du Japon, faisant part de la tristesse des catholiques pour les victimes, un geste que nous avons beaucoup apprécié. Pour tout cela, récemment j’ai organisé, à la demande de mon gouvernement, un dîner de à ma résidence où l’on a pu remercier tout le monde.

Ces jours-ci aussi ?

Le cardinal Giovanni Lajolo a célébré une messe et nous a encouragés. La communauté de Sant’ Egidio a organisé une veillée de prière en l’église Santa Maria au Transtévère.

L’Eglise catholique s’est montrée très solidaire à l’égard des rescapés et cela nous encourage beaucoup ; c’est pourquoi notre ambassade a voulu donner un concert à Saint Marie Majeure (la semaine passée) avec le nouveau cardinal  Abril y Castellò.

A Pâques, l’an dernier, Benoît XVI a répondu, à la télévision,  à une enfant japonaise qui lui demandait pourquoi le tsunami existait…

Franchement cette nouvelle n’a pas eu beaucoup d’écho au Japon, car la communauté catholique y est petite, environ 450.000 personnes, soit 0,4% de la population totale, qui vivent principalement à Nagasaki, Tokyo et leurs environs.

Comment les Japonais ont-ils vécu cette catastrophe?

Nous, les Japonais, nous avons l’habitude des calamités naturelles, cela arrive souvent – éruptions volcaniques, tremblements de terre, inondations -. Mais cette fois c’était énorme. Aujourd’hui, nous savons qu’il y a eu trois épicentres et aucun scientifique ne l’avait prévu, ni n’aurait pu l’imaginer.

Les mesures de prévention étaient importantes, une ville avait une digue anti tsunami…

Dans cette ville-là, il y a eu beaucoup de victimes parce qu’ils avaient confiance en la digue et ne l’ont pas évacuée. Dans le monde entier, tous ont été surpris de nous voir aussi calmes. C’est une qualité qui nous est enseignée dès tout petit: « Si tu es un homme, n’étale pas tes sentiments devant les autres ».  Donc, on ne pleure pas devant les autres, à la limite quand on est seul. C’est une tradition samouraï.

Qu’est-ce qui a changé au Japon depuis la catastrophe?

Cette catastrophe a  changé beaucoup de choses, à commencer la confiance dans la science. Mais la vie quotidienne aussi : par exemple, consommer beaucoup d’énergie est aujourd’hui mal vu, car tout le monde contribue, après l’appel du gouvernement, à réduire sa consommation. Nous devons quitter l’énergie atomique et utiliser de l’énergie propre, en particulier l’énergie  géothermique. Mais le Japon a aussi promis de réduire les émissions de gaz, il faut donc trouver des méthodes différentes de celles que l’on utilisait auparavant.

Devant tant de souffrance, qu’en est-il de la relation avec le Créateur?

Au début, après la catastrophe, les gens ont pensé à la fatalité, l’ont attribuée à l’emplacement du Japon, aux volcans etc. Que cela était inévitable. Puis, au fil du temps, un fort désir de famille s’est emparé d’eux et aujourd’hui on pense à nouveau à elle. C’est très intéressant car les jeunes ne voulaient pas se marier, pensant à leur liberté individuelle. Au contraire, maintenant, ils veulent fonder une famille. C’est surprenant.

Les statistiques confirment-elles cette tendance ?

Oui, cette tendance existe bien. C’était une notion un peu oubliée au Japon qui retrouve maintenant son espace, car la baisse démographique est le gros problème de notre pays.

Comment se manifeste la solidarité ?

L’amitié a pris beaucoup d’importance et les volontaires qui viennent nous aider sont nombreux. Amitié aussi avec d’autres nations : 163 pays nous ont offert leur aide et des secours. Personnellement, je crois que nous avons tant de pays amis grâce à notre politique et notre diplomatie car, après la seconde guerre mondiale, le Japon n’a jamais cherché à résoudre les problèmes par la force et a coopéré avec tous les pays. Les Etats-Unis, par exemple, nous ont envoyé vingt mille soldats pour nous aider à subvenir aux premiers besoins.

Et qu’a fait l’empereur?

Akihito, pour la première fois après la seconde guerre mondiale, s’est adressé au public. Son père Hirohito, à la fin du conflit, avait communiqué à son peuple la défaite du Japon. Depuis, pour la première fois, un empereur a encouragé son peuple directement. Il a voulu faire sentir sa présence. Nous parlons de la pire catastrophe depuis la fin de la guerre.

L’empereur est très aimé ?

Oui, au point que durant sa récente intervention au cœur la population était très inquiète. Maintenant il va mieux.

Et les bénévoles, qui étaient-ils, qui sont-ils?

La communauté catholique japonaise a envoyé beaucoup de bénévoles sur place, mais pas seulement: il y a en a beaucoup, sans connotation religieuse, qui ont voulu aider. Les entreprises, par exemple,  permettent que leurs employés aillent faire du bénévolat continuent à payer leurs salaires. Pour ne pas parler de tous les travailleurs qui se donnent du mal pour arrêter la radioactivité,  jusqu’à mettre leur vie en danger.

Traduction d’Isabelle Cousturié

Share this Entry

ZENIT Staff

FAIRE UN DON

Si cet article vous a plu, vous pouvez soutenir ZENIT grâce à un don ponctuel