"J'ai vu qu'au coeur de l'Eglise, il y a la prière", déclare Mgr Bruno Forte

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Déclarations du théologien qui a prêché la retraite de Carême au pape et à la curie

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ROME, vendredi 19 mars 2004 (ZENIT.org) – Après avoir prêché les exercices spirituels de Carême cette année pour le pape et ses plus proches collaborateurs, Mgr Bruno Forte affirme: « J’ai vu qu’au cœur de l’Eglise, il y a la prière ».

Mgr Bruno Forte, professeur à la Faculté de Théologie de l’Italie Méridionale, à Naples, membre de la Commission Théologique Internationale, révèle dans cet entretien à Zenit, quelques aspects de cette expérience vécue entre le 29 février et le 6 mars.

Zenit : Qu’est-ce que cette expérience a suscité en vous?

Mgr Forte : Je suis profondément ému et reconnaissant envers Dieu qui m’a permis de faire cette expérience. Avant tout, pour le témoignage d’homme de prière que le pape m’a donné. Il a assisté aux 22 méditations. Il écoutait attentivement, dans une attitude de prière profonde, et passait de longs moments à genoux.

A la fin j’ai pu rencontré le pape et plaisanter aussi un peu avec lui. Il a un très grand sens de l’humour. Je lui ai dit ce que des amis à moi m’avaient dit avant de partir pour prêcher les exercices spirituels: « Si le pape survit à tes 22 méditations, ça veut non seulement dire que c’est un saint, mais aussi qu’il a une santé de fer! » Et le Saint-Père, qui a largement surmonté… l’épreuve, a ri de bon coeur.

J’ai également été touché par le témoignage de prière des autres participants: cardinaux, archevêques, évêques, prêtres de la Curie romaine. Ils ont vécu ces exercices spirituels dans une attitude d’écoute, de méditation et de prière. Je l’ai vu aussi au cours des dialogues spirituels que j’ai pu avoir.

Au cours de ces journées, j’ai fait une expérience d’espérance authentique. Et cela parce que j’ai vu qu’au cœur de l’Eglise, il y a des hommes capables de faire passer au second plan toutes leurs activités pendant une semaine pour se consacrer à la primauté exclusive de la prière et de l’écoute de la Parole de Dieu. Je crois que c’est celle-là la vraie force de l’Eglise. C’est une vraie grâce qui rayonne du cœur de l’Eglise, du gouvernement universel de l’Eglise, vers nous tous, baptisés dans cette Eglise de l’amour.

Zenit : Y a-t-il une idée fondamentale que vous vouliez transmettre quand vous avez préparé ces exercices spirituels ?

Mgr Forte : L’objectif proprement dit des exercices spirituels, c’est-à-dire de renouveler notre engagement à la suite du Christ, lumière du monde. Dans la tradition des exercices spirituels il y a trois étapes, qui ont été définies entièrement par saint Ignace de Loyola.

La première est la voie purgative qui est l’étape lors de laquelle on demande à Dieu la grâce d’être libéré du péché et des manques de vérité et de liberté, avec la liberté que Lui seul peut nous donner. C’est le moment de la purification du cœur, du renouvellement intérieur. C’est ce que la phrase de saint Jean, qui a été la devise de mes exercices, dit quand il affirme: « Celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres » (Jn 8, 12). Dans cette phrase, en contemplant Jésus et les choix de sa vie, on peut vérifier notre liberté, avec l’aide de Dieu et sa grâce.

La deuxième étape est la voie illuminative au cours de laquelle, d’abord au pied de la Croix de Jésus, et éclairés par sa Résurrection, nous pouvons nous laisser éclairer sur ce que Dieu veut de nous, à la suite du Christ qui dit: « Je suis la lumière du monde, je suis la lumière de la vie ».

La troisième étape est la voie unitive. Celui qui vit ce cheminement fait l’expérience des fruits de l’Esprit, de la joie de la communion de la Trinité et de l’Eglise de l’amour car, comme dit Jésus « Qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres mais aura la lumière de la vie ».

Au cours de ces journées avec le Saint Père et ses proches collaborateurs j’ai essayé de proposer ce cheminement qui nous a conduits aux sources, à la fraîcheur de l’Evangile, dans lequel nous avons sans cesse besoin de puiser pour nous mettre à la suite de Jésus et devenir de plus en plus ses témoins.

Zenit : Dans le discours que le pape a fait à la fin des exercices spirituels, il a utilisé le mot « passion » pour qualifier le style avec lequel ils ont été prêchés. D’où vient cette « passion »?

Mgr Forte : Elle naît du simple fait que le sens de la vie d’un croyant, d’un prêtre, d’un théologien, comme je le suis, ne peut être que quelqu’un, le Christ. C’est lui qui a marqué ma vie. Au début des exercices, faisant allusion au fait que le Saint-Père, quelques jours auparavant, avait dit quelques mots en dialecte romain, j’ai cité un proverbe napolitain très beau qui, je dois dire, a été immédiatement accueilli avec enthousiasme: « Se pò campà senza sapè perchè, ma non se pò campà senza sapè per chi » (on peut vivre sans savoir pourquoi, mais on ne peut pas vivre sans savoir pour qui). C’est ça le sens de la vie: quelqu’un, le Christ. Se mettre à la suite du Christ sans réserve donne un sens et de la beauté à la vie.

Et puis, il y a le fait d’être Napolitain et donc, dans la tradition de cette Eglise qui a donné au monde tant de saints: depuis les théologiens, de saint Thomas à saint Alphonse de Liguori, aux laïcs comme Moscati et à des figures aussi très belles de femmes témoins de l’Evangile comme sainte Marie-Françoise des Cinq Plaies, ou Caterina Volpicelli… Je crois que le fait d’appartenir à cette Eglise qui a toujours rendu un témoignage de grande fidélité à la communion avec Rome tout au long des siècles, m’a aidé à vivre le climat de la passion pour l’Evangile dans la sérénité et la simplicité. J’ai par ailleurs vu avec quelle simplicité et quel enthousiasme tous les participants accueillaient les plaisanteries qu’il m’arrivait parfois de faire, comme Napolitain, et qui ont rendu plus léger ce chemin qui, avec l’aide de Dieu nous a conduits à la racine de l’Evangile.

Zenit : Est-il possible de lire les textes que vous avez prêchés au pape et à ses collaborateurs?

Mgr Forte : Puisque beaucoup m’avaient demandé de publier les textes j’ai à mon tour demandé au Saint-Père qui m’a dit que je devais le faire car, a-t-il précisé, « tous les prédicateurs l’ont fait, et moi-même je l’ai fait quand j’ai prêché les exercices spirituels à Paul VI ». L’édition du texte est pour l’instant prévue dans sept langues: italien, espagnol, français, anglais, portugais, allemand, polonais. Nous pouvons confier à Dieu l’intention qu’il se serve de ces pages pour toucher le cœur de ceux qui les liront, surtout pour que se réalise la vraie finalité d’une expérience comme celle-là, celle de puiser à la fraîcheur de l’Evangile. Et c’est très beau qu’au cœur de l’Eglise l’eau vive de l’Evangile soit celle qui nourrisse les choix et guide sur le chemin. Ceci donne à l’Eglise la liberté que seule la vérité réussit à donner au cœur, la liberté d’être sous le regard de Dieu et de vouloir plaire uniquement à Lui.

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ZENIT Staff

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