Italie : Eluana Englaro, dans le coma depuis 17 ans, sans alimentation artificielle

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Un médecin italien précise le cadre clinique

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ROME, Dimanche 8 février 2009 (ZENIT.org) – Eluana Englaro n’a pas été alimentée de façon « artificielle » déclare un professeur de médecine. Ce n’est pas un cas « d’acharnement » thérapeutique et elle ne souffrait pas : la jeune femme a vécu 17 ans sans l’assistance de médicaments pour soulager la douleur et sans appareils.

Alimentation et hydratation supprimées

Une bonne partie de l’opinion publique italienne, laïque et pas seulement religieuse, voit dans la suppression totale de l’alimentation et de l’hydratation de la jeune femme, depuis hier 7 février, dans une clinique de la ville de Udine, une « euthanasie » directe. Eluana Englaro y a été transférée mardi dernier depuis la maison médicale de Lecco où elle était jusqu’ici et la cessation progressive de l’alimentation a commencé dès vendredi, devenant totale hier.

Eluana Englaro, 37 ans, dans le coma depuis 17 ans, à la suite d’un accident de voiture survenu le 18 janvier 1992, n’a pas eu besoin de respirateur artificiel pour vivre, ni d’alimentation « artificielle », et elle n’était pas malade. Elle déglutissait. On la portait en fauteuil roulant dehors et on lui faisait de la kinésithérapie pour stimuler ses muscles.

Mais une décision de justice a tranché, à la demande de son père, Beppe Englaro : elle ne doit plus être ni alimentée ni hydratée.

Or, le gouvernement Berlusconi a émis un décret pour garantir à toute personne l’hydratation et l’alimentation. Le décret-loi a été soumis au Parlement. Une course contre la montre a commencé. Privée désormais de nourriture et d’hydratation, Eluana pourrait mourir dans quelques jours.

Alimentation assistée, mais pas artificielle

Le professeur Alessandro Bassi Luciani, professeur de médecine légale du département de Neurosciences de l’Université de Pise a précisé le cadre clinique. Il affirme que l’alimentation qui était administrée jusqu’ici à Eluana n’était pas « artificielle » ni « forcée », puisqu’elle était nourrie « par la bouche, avec des aliments fluides et calibrés, par une sonde gastro-nasale souvent enlevée (je crois après chaque repas, dit-il) ». Pour lui, il s’agit d’une alimentation « simplement assistée ».

Pour le médecin, il est légitime de contester les décisions de la magistrature en tant qu’elles sont « politiques » et non « juridiques » : la décision de la Cour de Cassation de Milan n’est pas une « sentence » mais un « arrêt », souligne le médecin.

De plus il s’étonne que les magistrats aient émis un tel décret sans avoir soumis la jeune femme à une « expertise médico-légale », mais en se fondant sur une documentation fournie « par la famille ».

Il ajoute : « Eluana Englaro n’est pas en agonie ». Par « agonie », on entend, dit-il, « la diminution lente et inexorable des forces vitales précédant la mort ». Pour le médecin, il y a contradiction dans les termes lorsqu’on dit « agonie de 17 ans ».

Pas de souffrances physiques

Sa situation n’était pas non plus « douloureuse », affirme le médecin italien : « pas de souffrances physiques : elle n’a besoin d’aucun médicament, qui apaise la douleur ». Il souligne le « paradoxe » : la contraindre à la « mort par inanition », en supprimant nourriture et hydratation, implique au contraire d’avoir recours à des médicaments pour empêcher la douleur physique.

Et si l’on estime qu’Eluana éprouve une souffrance « psychique », le médecin fait observer que cela revient à affirmer que la jeune femme « perçoit » sa situation… Avant d’ajouter : « Sans aucun doute, sa situation est douloureuse pour beaucoup », en particulier « pour qui demande qu’elle puisse continuer à vivre ».

Aucun acharnement thérapeutique

Le cas d’Eluana Englaro n’est pas non plus un cas « d’acharnement » thérapeutique : le terme définit des « soins médicaux », or, affirme-t-il, « elle n’en a pas besoin ». Il cite un épisode survenu il y a quelques mois : « Elle a eu une grave hémorragie qui l’a conduite, cette fois, près de la mort, à cause de la reprise du cycle ovarien (signe du début de la régularisation de ses fonction physiques ?) : on n’a fait alors aucune thérapie, ni médicale ni pharmacologique, ni de transfusion (et elle s’est remise de cette situation critique spontanément avec une rapidité incroyable) ».

Le médecin refuse de qualifier de « thérapeutiques » les soins qui étaient donnés à la jeune femme : des « pratiques d’hygiène » ou les « promenades en fauteuil ».

Quant à l’expression de la part de la jeune femme de ses « désirs » (son père a affirmé qu’elle aurait aimé en finir si elle se trouvait dans cet état), le médecin rappelle que le « consentement informé » est tout autre chose.

Enfin, le médecin conteste le terme « état végétatif permanent » comme « obsolète » et « antiscientifique ». « En médecine, est permanent ce dont on sait qu’on ne peut guérir », ce qui est « irréversible ». Or, affirme-t-il l’état des personnes comme Eluana est un « état végétatif persistant », ce qui fait toute la « différence ».

Convocation du Parlement italien

Le conseil des ministres italien, présidé par Silvio Berlusconi, s’est réuni vendredi soir pour adresser au Sénat un projet de loi qui interdirait aux médecins de cesser l’alimentation et l’hydratation des patients, ces deux mesures ne consistant pas en « acharnement thérapeutique » mais étant le minimum nécessaire à la vie de tout être humain.

Il indique que « dans l’attente de l’approbation d’une législation complète en matière de fin de vie, l’alimentation et l’hydratation (…) ne peuvent en aucun cas être suspendues par ceux qui assistent les personnes qui ne sont pas en mesure de décider pour elles-mêmes ».

Le président de la République italienne, M. Giorgio Napolitano avait en effet refusé dans la journée de signer le décret-loi qui aurait évité le recours au Parlement. Il n’y voit pas de « caractère urgent ».

Anita S. Bourdin

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ZENIT Staff

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