Homélie du patriarche Grégoire III à Saint-Paul-hors-les-Murs

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Pèlerinage aux tombeaux des Apôtres Pierre et Paul

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ROME, Vendredi 9 mai 2008 (ZENIT.org) – « Aujourd’hui, notre concélébration a lieu près du tombeau de Saint Paul. Après-demain, samedi 10 mai, nous concélébrerons la Divine Liturgie sur le tombeau de Saint Pierre, sur la foi de qui le Christ a fondé son Eglise », a expliqué le patriarche Grégoire III Laham.



Voici le texte intégral de l’homélie de  Sa Béatitude le patriarche Grégoire III Laham, hier, jeudi 8 mai, en la basilique de Saint-Paul-hors-les-Murs.

Eminences,

Chers Frères dans l’Episcopat et le Sacerdoce,

Chers Frères et Sœurs,

C’est une grande joie pour nous tous d’être à Rome, dans cette Basilique Papale de Saint-Paul-hors-les-Murs. Notre joie est grande d’être les pèlerins de l’Orient, et surtout du lieu de la conversion de Saint Paul, de Damas, la capitale syrienne, où celui qui allait être l’Apôtre des Gentils fut baptisé par Saint Ananie, premier Evêque de cette ville et l’un des premiers Evêques de la chrétienté.

Nous sommes heureux de concélébrer la Divine Liturgie dans cette Basilique, inaugurée une première fois en 403 par l’Empereur Honorius. Nous sommes venus en pèlerins pour vénérer, dans cette Ville Sainte de Rome, les tombeaux des Coryphées des Apôtres, Pierre et Paul, qui sont des concitoyens de notre Orient bien-aimé.

Aujourd’hui, notre concélébration a lieu près du tombeau de Saint Paul. Après-demain, samedi 10 mai, nous concélébrerons la Divine Liturgie sur le tombeau de Saint Pierre, sur la foi de qui le Christ a fondé son Eglise.

Saint Pierre fut le premier Evêque de notre siège patriarcal d’Antioche, et Nous sommes, par la grâce de Dieu, son successeur sur le Trône d’Antioche. Il est devenu ensuite le premier Evêque de Rome, alors capitale des Empereurs, et depuis lors capitale de la foi catholique, siège aujourd’hui du successeur de Pierre et Vicaire du Christ, Sa Sainteté le Pape Benoît XVI, avec qui nous nous sommes rencontrés ce matin, au début de notre pèlerinage; ce fut une rencontre spirituelle de foi, une rencontre de la grande famille catholique; le Saint Père nous a reçus avec grand amour, en compagnie de mes frères les Evêques du Saint-Synode, des Supérieurs Généraux, des Supérieures Générales, de prêtres, religieux et religieuses, et d’un grand nombre de fidèles de l’Eglise Grecque-Melkite Catholique, des pays arabes du Proche-Orient et du monde de l’émigration.

Antioche, Damas, Jérusalem et Alexandrie font ce pèlerinage à Rome, la Ville Eternelle, gardienne de la sainte foi chrétienne, sous la houlette du Pasteur des Pasteurs, Sa Sainteté le Pape, et de ses collaborateurs de la Curie Romaine, dont sont présents aujourd’hui parmi nous Son Eminence le Cardinal Leonardo Sandri, Préfet de la Congrégation pour les Eglises Orientales, et son prédécesseur, Sa Béatitude Eminentissime le Cardinal Ignace Moussa Daoud, fils de l’Orient, Patriarche émérite d’Antioche des Syriens.

Notre pèlerinage d’aujourd’hui est aussi un prélude aux célébrations de l’Année de Saint Paul, que le Saint Père a annoncée, qu’il ouvrira le 28 juin prochain ici même, et qui se terminera le 29 juin 2009. Nous avons déjà prévu un grand programme pour la célébration de cette Année à Damas, et nous serons, à cet effet, en continuelle relation et coordination avec Son Eminence le Cardinal Andrea Cordero Lanza di Montezemolo, Archiprêtre de cette Basilique, qui nous donne l’hospitalité aujourd’hui.

Souvenirs personnels

Notre pèlerinage a une signification spéciale pour moi, car c’est le prélude de mes noces d’or sacerdotales, ayant été ordonné prêtre en l’Abbaye de Notre-Dame de Grottaferrata le 15 février 1959, et j’ai célébré la Divine Liturgie pour la première fois le lendemain, en cette Basilique, sur ce même autel.

Dans l’Abbaye adjacente, j’ai passé trois ans, jouissant de l’hospitalité des Pères bénédictins, et aujourd’hui nous avons eu la joie de visiter son Révérendissime Père Abbé, Dom Edward Power. J’ai vécu dans cette Abbaye avec huit de mes confrères, moines de l’Ordre Basilien du Très Saint Sauveur, à qui le Père Gabriel Acace Coussa, de l’Ordre Basilien Alépin, alors Assesseur de la Congrégation pour l’Eglise Orientale, futur Cardinal et Secrétaire – malheureusement mort prématurément de la même Congrégation, avait donné l’opportunité de venir continuer leurs études à Rome.

Ici même, j’ai eu la joie d’assister à la Sainte Messe célébrée par le Bienheureux Jean XXIII le 25 janvier 1958 pour la fête de la Conversion de Saint Paul sur la route de Damas, fête patronale de cette Basilique, puis, après la célébration, j’ai eu le privilège, avec les moines de l’Abbaye et mes confrères salvatoriens, d’être présent au discours que le Pape prononça, à l’intérieur de l’Abbaye, dans lequel il annonça la convocation du Concile Vatican II, dont il précisa la finalité: « pour l’unité des chrétiens » .

Paul, Apôtre de Jésus-Christ, a porté à Rome et au monde entier cette Orientale Lumen, le message du Christ venu de l’Orient; à travers ses Epîtres et ses voyages apostoliques autour de la Méditerranée, il a donné à l’Orient et à l’Occident la théologie et la spiritualité de l’Evangile. Paul, Apôtre des Nations, est le vrai signe du dialogue dans le monde entier.



Dans cette Ville Sainte, nous sommes heureux de proclamer de nouveau notre communion spirituelle avec l’Eglise de Rome, et nous voudrions répéter les paroles du Concile de Chalcédoine, en 451, dont les Pères, après avoir écouté le Tomos du Pape Saint Léon le Grand, ont proclamé que « Pierre a parlé par la bouche de Léon ». Nous gardons aussi le souvenir de notre prédécesseur Pierre III d’Antioche, qui écrivait à son confrère le Patriarche de Constantinople Michel Cérulaire, après la discorde de celui-ci en 1054 avec le Cardinal Humbert de Silva-Candida:

« Tous les malheurs présents (…) ne proviendraient-ils pas d’ici, je veux dire de cette longue séparation, de cette mésintelligence de notre Eglise avec le Siège Apostolique? »

Aujourd’hui, plus que jamais, nous avons besoin de cette voix de Pierre et de son successeur, le Pape de Rome, et de tous les Pasteurs de l’Eglise. Oui, nous avons besoin de cette unité chrétienne, qui s’est exprimée ex cathedra, d’une manière imposante et mondiale, à travers les messages du Pape et des Papes. Le Pape, successeur de Saint Pierre, a toujours la mission que Jésus a confiée à Pierre: « Et toi, confirme tes frères ».

Le Pape est une nécessité chrétienne, et je dirais mondiale, une nécessité de la foi, car c’est lui qui est, avec tous les Pasteurs du monde chrétien, appelé à fortifier, à confirmer les chrétiens dans leur foi, dans les grandes valeurs spirituelles.

Comme nous demandons dans notre prière liturgique pour le Pape, pour le Patriarche et pour les Evêques: « Qu’ils dispensent fidèlement les paroles de ta vérité ».

Nous avons besoin de cette unité afin de réaliser l’expérience de l’Eglise primitive de Jérusalem, la Mère de toutes les Eglises, comme nous lisons au chapitre IV des Actes des Apôtres, que les chrétiens n’avaient « qu’un cœur et une âme », et « entre eux tout était commun ».



Ici présents, à Rome, nous sentons plus que jamais l’importance unique de notre mission en Orient et en Occident, pour tout ce qui se rapporte à la présence chrétienne, à la convivialité et au dialogue des chrétiens avec les autres chrétiens et avec les musulmans, un dialogue mondial. Nous, en Orient, nous avons cette mission très spéciale, comme celle que Saint Paul a portée, qui est d’être présents et, comme Jésus l’a dit, « levain dans la pâte », dans le monde arabe, qui compte 300 millions de personnes, à majorité musulmane.

Nous demandons à Dieu de fortifier la foi juste et
orthodoxe, comme Saint Paul, à Ephèse, a prié, à genoux, pour l’union des chrétiens et pour une plus profonde compréhension du mystère du Christ, dans toutes ses dimensions, dans sa largeur, sa longueur, sa profondeur et sa hauteur.

Nous avons besoin de Saint Paul, de son enseignement, pour avoir plus de courage dans la vie chrétienne, et surtout nous avons besoin d’expérimenter, nous aussi, cette rencontre qui a changé la vie de Paul de Tarse et toute la trame de l’histoire de l’Eglise et du monde entier: la rencontre de Paul avec Jésus, qui lui a donné la possibilité de comprendre, de trouver l’anneau de la vraie rencontre avec la philosophie grecque et avec la révélation divine, comme ce fut le cas plus tard pour lui à Athènes. Sa rencontre avec Jésus l’a rendu fort pour rencontrer tout homme, afin d’être, comme il l’a dit, « tout à tous », afin que chacun obtienne l’intelligence par la connaissance du Christ, afin de gagner le monde et tous les hommes à Jésus-Christ.

Aujourd’hui, le monde a plus que jamais besoin de cette rencontre vraie avec le Christ, dans la foi, afin que nous puissions affronter le monde, la nature, l’environnement, toute la création dans tous ses éléments, pour que l’homme soit vraiment roi de cette création comme Dieu l’a fait, et comme le rappelle le Psaume 8: « Tu l’as couronné d’honneur et de gloire; Tu l’as fait régner sur les œuvres de tes mains ».



La rencontre avec Dieu est à la base de la rencontre des civilisations, des cultures, des peuples et des nations dans leurs diversités et dans leurs croyances. La rencontre avec la personne de Jésus-Christ est la base de la vraie mondialisation, de la vraie globalisation.

Aujourd’hui, plus que jamais, chers Frères et Sœurs ici présents, et à travers vous je le dis à tous les fidèles de l’Eglise Grecque-Melkite Catholique, nous avons besoin d’approfondir cette rencontre avec le Christ. Nous l’avons rencontré d’abord le jour de notre baptême et de notre chrismation, nous l’avons reçu dans l’Eucharistie et dans l’Evangile. Notre approfondissement doit se faire à travers les Sacrements, les saints Mystères de l’Eglise, à travers notre vie chrétienne selon l’Evangile, afin de rencontrer, à travers Jésus et à travers notre foi, notre monde et notre société, l’autre, le frère de notre communauté, notre frère de n’importe quelle religion, culture ou civilisation, pour pouvoir ainsi être le levain dans la pâte de notre société, la lumière pour le monde, et le sel pour donner un sens à la vie.

C’est là le sens de notre vocation de chrétiens orientaux, dans notre monde arabe à majorité musulmane, et de notre vocation de grecs-melkites catholiques en relation avec le monde occidental, en pleine communion avec l’Eglise de Rome, qui « préside dans la charité », selon les mots de Saint Ignace d’Antioche.

Nous avons, chers Frères et Sœurs, à travers ces convictions, ces données et ces valeurs constantes de notre vie, à être des serviteurs de l’unité chrétienne et humaine. Avec témérité, j’ose dire que nous devons être un modèle de l’unité chrétienne et les grands promoteurs de cette unité, « afin que le monde croie », afin que l’on puisse arriver, dans ce monde, à la pleine stature du Christ, afin que nous soyons « l’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique », avec un même Pasteur, Jésus-Christ, qui est « l’Evêque de nos âmes », comme dit Saint Irénée. 

Selon les mots de Saint Paul, « nous sommes un seul corps, nous avons un seul baptême et une seule foi », et nous sommes tous unis à ce grand homme-Dieu, le nouvel Adam, Jésus Christ; à Lui la gloire dans les siècles des siècles. Amin.

+ Gregorios III, Patriarche

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ZENIT Staff

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