France : Les évêques publient une note en vue du débat sur la bioéthique

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 ROME, Jeudi 13 janvier 2011 (ZENIT.org) – « En vue du débat parlementaire, les Évêques de France ont souhaité, dans une note distribuée aux députés, faire quelques propositions qui permettraient que la dignité de tous, en particulier des plus vulnérables, soit mieux protégée selon l’esprit de notre corpus juridique français » indiquait le site de la Conférence des évêques de France qui publiait le 10 janvier le texte de cette note que nous reprenons ci-dessous.

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Avec les citoyens des États généraux de la bioéthique, nous pensons que « la France est un pays souverain qui ne doit pas se soumettre à la pression internationale en matière éthique » ni se rallier au «moins disant éthique » [*].

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Mettre au point la législation française en matière bioéthique est un enjeu d’humanité.

L’information concernant des anomalies génétiques graves (articles 1 à 4)

Pour la personne chez laquelle une anomalie génétique serait diagnostiquée, le projet de loi envisage les moyens de faciliter l’information des membres concernés de sa famille, en prévoyant à l’avance, avec le médecin, les modalités de cette information dans un document écrit.
La personne ne devrait-elle pas être accompagnée d’un psychologue ou d’une personne de confiance lorsqu’elle fait face à l’annonce du diagnostic ? Pour respecter sa liberté, ne faudrait-il pas inscrire la possibilité pour elle de révoquer ce « document » ?
Ne faut-il pas prévoir que la personne sera informée si des découvertes permettant la prévention et le soin sont faites après le diagnostic, afin qu’elle puisse en informer sa famille ?

Le don croisé d’organes (article 5)

Le projet envisage le « recours au don croisé d’organes, dans le respect du principe d’anonymat », lorsque le donneur est incompatible avec le receveur pressenti. L’exposé des motifs précise qu’il s’agit d’une « personne ayant déjà exprimé l’intention de don ». Pourquoi ne pas ajouter cette précision dans le texte de loi, afin d’éviter le plus possible la pression familiale sur le donneur ?
Le projet de loi n’aborde pas le don post mortem, réalisé aujourd’hui selon le régime du consentement présumé. Pourquoi ne pas préférer le régime du choix assumé avant la mort, plus respectueux de la liberté ? Ne faudrait-il pas renforcer les campagnes d’information dans les familles pour que ce choix personnel soit partagé ?

Diagnostic prénatal (articles 9-12)

Il est juste de donner une information avant et après tout examen et de recevoir le «consentement libre et éclairé» de la femme enceinte en l’accompagnant et en lui laissant le temps du dialogue. Il serait nécessaire de former le personnel de telle sorte que cette information et ces examens ne soient pas source d’angoisse.
En cas de risque avéré, la femme devrait recevoir systématiquement, sauf opposition de sa part et non « à sa demande », une information sur la prise en charge de l’anomalie suspectée, sans que cette information soit discriminatoire par rapport aux personnes handicapées.

L’AMP avec tiers donneur : la levée de l’anonymat (articles 14-18)

En permettant à l’enfant issu d’un don de gamètes d’accéder à des données non identifiantes sur le donneur et même à son identité, le projet de loi veut réparer une injustice objective commise envers un enfant auquel a été délibérément imposée une dissociation des éléments de sa filiation.
Cela suscite de multiples questions. En particulier, l’accès à l’identité du donneur repose sur son « consentement exprès », ce qui lui confère le dernier mot dans un domaine où il est loin d’être seul engagé, puisque sont concernés l’enfant mais aussi ses parents légaux. Quel sera l’impact de la présence d’un ou plusieurs tiers sur la relation parents-enfants ? Quel est le poids psychologique d’une présence anonyme du donneur pendant la période de croissance vers la majorité ? Quelle répercussion sur l’enfant désirant le connaître si, devenu majeur, il apprend qu’il est décédé ? Ou s’il n’accepte pas ses caractéristiques qu’on a choisies pour lui ? Comment établir et garantir la nature de la relation entre l’enfant et le donneur ? La connaissance de son « parent biologique » ne risquera-t-elle pas de conduire subjectivement l’enfant à une multiparentalité et apaisera-t-elle chez lui le préjudice subi par la dissociation de sa filiation ? Est-il juste envers l’enfant que la loi suive les couples dans leur désir d’enfant à tout prix ?
En considération de l’intérêt de l’enfant, toutes ces questions et d’autres encore invitent à supprimer la possibilité d’AMP (assistance médicale à la procréation) avec tiers donneur, réalisée pour un petit nombre de couples. Au minimum, les couples devraient recevoir, préalablement au don de gamètes, une information objective et exhaustive sur les difficultés auxquelles ils seront confrontés, et sur la possibilité de l’adoption afin que leur consentement soit libre et éclairé.

AMP et « conservation de gamètes et d’embryons » (articles 19-22)

La « conservation de l’embryon » ne peut pas devenir une technique d’AMP. Elle est une conséquence non éthique d’un savoir-faire non achevé en matière d’AMP. Elle interroge sur la légalisation de cette « transgression première » qu’est la congélation d’êtres humains.
La méthode de congélation des ovocytes par vitrification appelle une vérification sérieuse et un encadrement strict. Elle pourrait être envisagée si elle permet de mettre fin à la congélation des embryons. Le projet de loi envisage que les couples pacsés soient dispensés de deux années de vie commune avant leur accès à l’AMP. Cela n’est pas justifié et est préjudiciable à l’intérêt de l’enfant qui a besoin de stabilité. Le Conseil constitutionnel a rappelé que le pacs n’est pas équivalent au mariage. En particulier, il n’offre pas de garantie de stabilité équivalente à celle exprimée dans l’engagement qui caractérise le mariage.

Recherche sur l’embryon humain (articles 23-24)

Il est regrettable que soit supprimée « l’étude » ne portant pas atteinte à l’intégrité de l’embryon humain. Cette idée exprime que soin et recherche s’appellent l’un l’autre, sans que la recherche conduise automatiquement à sa destruction.
Il est heureux, en cohérence avec notre corpus juridique, que soit maintenu le principe d’interdiction de recherche sur les embryons humains. Les protéger de toute réification et de toute instrumentalisation est le devoir de la loi. Cependant, les nouvelles conditions de dérogation, en vidant le principe de sa valeur, changent gravement l’esprit de la loi.
Une information objective sur les résultats scientifiques et sur les thérapies obtenues permettrait un débat parlementaire de qualité. Il faudrait prendre en considération les progrès scientifiques sur les cellules souches adultes et les résultats que des recherches sur les embryons d’animaux pourraient apporter.
Une réflexion cohérente sur les valeurs fondamentales mises en jeu par des choix particuliers donnerait tout son sens à la valeur éthique que l’interdiction de la recherche sur l’embryon humain promeut pour l’avenir de la société : la protection du plus vulnérable est un bien pour la société, et son devoir.

Les Évêques catholiques de France
Jeudi 2 décembre 2010

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ZENIT Staff

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