France : le diagnostic de Mgr Pontier

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Servir la dignité de tout être humain

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L’élection de Mgr Pontier par ses pairs à la présidence de la Conférence des évêques de France, invite à lire ou relire ses déclarations de ces dernières semaines, si riches en événements pour l’Eglise et pour la société française. On y découvre un souffle, grâce auquel foi, espérance et charité s’incarnent pour servir la dignité de tout être humain. Au cœur d’une crise culturelle majeure. Un diagnostic sans complaisance.

Mgr Georges Pontier, 69 ans, archevêque de Marseille, et originaire du Tarn, qui lui a laissé du soleil dans sa voix et la solidité de l’enracinement dans un riche terroir, vient d’être élu président de la Conférence épiscopale (CEF), ce 17 avril 2013.

Le sérieux de la résurrection

Dans son message de Pâques, il tirait les conséquences, notamment éthiques et sociales, de la foi en la « résurrection de la chair » – à commencer par la résurrection du Christ – comme un fondement de la dignité de tout être humain: « Quand nous proclamons la dignité de l’homme, nous la proclamons de son corps et de son esprit. Ni le degré de beauté des corps, ni celui de la finesse des esprits ne le rendent plus ou moins homme. L’être humain indivisible est le sujet de cette dignité fondamentale. »

Il en tire les conséquences pour l’engagement au cœur de la société pour la défense du corps humain, que ce soit celui de l’embryon, des prostitués, des condamnés, du malade incurable: « C’est à cette lumière ou dans cette conviction que les chrétiens sont des chantres de la grandeur de tout homme, des défenseurs de sa dignité. C’est à partir de là que l’Église proclame la dignité de l’embryon humain, qui mérite les marques de respect dues à une personne humaine. A partir de là que la mise à mort de l’embryon ou son utilisation comme matériau de recherche lui semblent impensables et inacceptables. C’est encore à partir de là qu’on ne peut faire du corps de chair, comme dans le principe de la gestation pour autrui, une marchandise négociée ici et produite là-bas, au gré des désirs des uns et des besoins des autres. »

« C’est aussi à partir de là, poursuit l’archevêque, que le respect de l’unité du corps et de l’esprit ne s’accommode ni de pratiques échangistes, ni de la prostitution. C’est toujours à partir de là que la peine de mort est dénoncée comme un acte immoral et que la torture ne saurait être justifiée. C’est enfin à partir de là que l’acte d’euthanasie est considéré comme un homicide et l’acharnement thérapeutique comme un excès de pouvoir. »

« Toucher au corps, c’est toucher à une personne humaine. Respecter l’homme, c’est rendre à son corps, en toutes ces diverses circonstances, les marques de respect dues à une personne », résume Mgr Pontier.

Il conclut : « Notre foi en la résurrection de la chair est une lumière qui maintient humaine l’humanité. Elle l’invite au plus grand respect pour celui qui se présente comme un être à aimer, un frère en humanité aujourd’hui et pour toujours. »

Une crise culturelle grave

Le diagnostic de Mgr Pontier sur la société actuelle en France n’est pas sans nuances ni sans réalisme. Interviewé par Dominique Paquier-Galliard, il aborde divers sujets d’actualité. Il confie tout d’abord, à une question sur le nouveau pape, se réjouir du « nom de François » et que le pape soit « d’Amérique latine », avec cette forme de « simplicité qui n’est pas de façade ».

A propos de la crise économique, il fait observer que « la société fondée sur la consommation, la possession des biens matériels montre ses limites et ne prépare pas à l’épreuve, ce qui fait qu’on est désemparé ».

Quant au « Mariage pour tous » actuellement débattu au Parlement français la question, dit-il, se révèle « plus politique plus qu’éthique » : elle est abordée, par rapport à l’enjeu politique et non « éthique » mais pourtant elle impose un « infléchissement du mariage » et du « rapport aux enfants et aux droits des enfants ».

On est moins attentif « aux questions de fond qu’aux questions politiciennes », déplore Mgr Pontier qui diagnostique : « On efface l’aspect éthique pour les motifs politiques ».

A propos de la situation « dramatique » de la violence à Marseille, il affirme : « Tuer quelqu’un signifie que celui qui tue est très inhumain ». Il déplore « quelque chose de la culture ambiante » comme « la perte du sens de la vie, de la hiérarchie des valeurs » ; quelque chose culturellement « n’est plus en place et c’est dramatique ».

L’archevêque en lit d’autres signes – petite délinquance, économie, éducation, logement, manque de travail – mais il invite à « ne pas simplifier les choses », car il s’agit d’une « crise culturelle grave ».

Ainsi, les remèdes ne sont pas seulement, dit-il, politiques et économiques, mais « de l’ordre des valeurs profondes qu’il nous faut retrouver tous ensemble ».

« Pourquoi pas moi ? »

Lors de la messe chrismale, entouré des prêtres de son diocèse, le 25 mars dernier, il donnait un écho au vœu du pape François d’une « Eglise pauvre pour les pauvres », et encourageait l’initiative nationale « Diaconia 2013 »: « L’Église qui est en France invite les communautés chrétiennes à se faire proches des plus pauvres, à faire qu’en son sein les plus pauvres parmi les croyants aient toute leur place. C’est ce qu’on appelle la diaconie de l’Église, c’est ce temps fort de Diaconia 2013 qui aura lieu à Lourdes lors de la prochaine fête de l’Ascension et que nous vivons aussi ici dans nos communautés. C’est l’œuvre de l’Esprit qui nous invite à cette proximité fraternelle que Jésus le Christ est venu vivre pour que vive l’alliance ! »

Enfin, présidant l’ordination d’un jésuite, Kostia de Leusse, le 23 mars dernier, il disait son souci des jeunes et des vocations sacerdotales : « Vous les jeunes qui vivez cette belle liturgie, entendez combien Dieu vous aime et aime tous les hommes. Voyez la joie de son serviteur Kostia qui lie sa vie à celle du Christ pour que vive ce monde. Entendez que l’Eglise et le monde ont besoin de prêtres qui continuent à offrir l’amour de Dieu dans leur ministère. Merci de réfléchir à cette question : pourquoi pas moi ? »

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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