« France catholique » en kiosque, au service de la Nouvelle Evangélisation

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Entretien avec Frédéric Aimard, directeur

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ROME, Mercredi 1er mars 2006 (ZENIT.org) – Depuis la semaine dernière, l’hebdomadaire français « France Catholique », fondé en 1924, racheté par ses rédacteurs et ses abonnés il y a sept ans, revient dans le réseau de distribution des messageries de presse, qu’il avait quitté il y a une vingtaine d’années : il se trouve donc en France en kiosque et en librairie. Son directeur actuel, Frédéric Aimard, explique aux lecteurs de Zenit les raisons d’un tel choix, dans la perspective de la Nouvelle Evangélisation. L’entretien montre combien, pour une presse catholique indépendante, les possibilités techniques de se faire connaître sont aujourd’hui réduites.

Zenit : Frédéric Aimard, vous avez pris la décision de remettre l’hebdomadaire France Catholique dans le réseau des Messageries de Presse, dans toute la France, en ce mois de mars 2006. Pourquoi maintenant ?

F. Aimard : Depuis quelques années nous avons dû réagir à une chute des abonnements. Et la distribution en kiosques nécessite des investissements que nous ne pouvions pas consentir. L’année dernière, pour la première fois depuis sept ans, nous avons connu une embellie et un exercice bénéficiaire. C’est un signe encourageant de stabilisation. Nous avons décidé qu’il fallait tenter un grand coup pour faire sortir notre journal de « l’ombre ».

Zenit : Mais pourquoi la distribution en kiosques, alors que, justement, c’est si cher ?

F. Aimard : Une petite confidence personnelle : j’aime les marchands de journaux depuis, qu’avant même de savoir lire, j’allais acheter, certains jeudis, le journal de Mickey, avec une belle pièce jaune de 20 centimes. Plus tard, lycéen à la toute fin des années 60, je hantais la Maison de la presse de mon quartier, qui était un long boyau au fond duquel, dans un meuble à tiroirs fermés (!) on trouvait une presse peu conforme à l’esprit du temps. La caissière n’aimait pas beaucoup me voir feuilleter tant de journaux pour en acheter si peu. C’est dans ces tiroirs que j’ai découvert La France Catholique, que j’étais bien obligé d’acheter parce qu’elle arrivait pliée en huit, et qu’il n’était pas question de la remettre à sa place une fois qu’on l’avait ouverte…
Je sais donc le mérite d’une rencontre avec une presse d’opinion libre chez un marchand de journaux et j’ai un immense respect pour le rôle de cette profession dans le commerce des idées…

Zenit : Cela a bien évolué depuis, avec l’arrivée massive de la presse de loisir ! Pourquoi ne pas utiliser davantage le réseau des paroisses ?

F. Aimard : Parce que celui-ci n’existe pour ainsi dire plus. Jusqu’aux années 70, il y avait ce qu’on appelait des « fonds d’Eglise », un présentoir avec plusieurs journaux catholiques souvent assez différents, un tronc, une personne responsable qui tenait le stand le dimanche matin et faisait une comptabilité à l’exemplaire près… Puis certains curés ont essayé de maintenir cela, malgré la disparition des bénévoles efficaces en ce domaine peu valorisant, mais plus question de compter les numéros vendus ou volés ! L’intérêt économique s’est étiolé, mais restait l’intérêt publicitaire. Enfin, à partir de la fin des années 80, personne dans les paroisses n’a plus eu le temps ni la volonté de s’occuper des journaux et, même, les stands ont été détruits car cela faisait trop « marchands du temple ».

Zenit : Pourquoi alors, vos prédécesseurs avaient-ils cessé de mettre France Catholique en kiosques ?

F. Aimard : Parce que la vente en kiosques n’a pas que des avantages. Les commissions prises par les messageries sur le chiffre d’affaires sont fortes. Les frais sur invendus non négligeables. Quant aux acheteurs, on sait qu’ils font du « zapping », achetant un numéro de temps en temps sur un titre accrocheur, ils changent trop souvent de points de vente et cela alourdit les frais de distribution. Surtout, quand les Nouvelles Messageries de Presse ont commencé à perdre leur monopole de la diffusion des journaux, elles ont cherché à devenir rentables, et cela passait par la promotion d’une certaine forme de presse très commerciale, même si elle était souvent éphémère, aux dépens des journaux plus classiques. La pression a été intense sur les journaux d’idées, qui perdent chaque année des lecteurs, et ne peuvent rivaliser avec les magazines people ou autres. Beaucoup de titres ont alors renoncé à une diffusion en kiosques, dont le nôtre.

La vraie question reste celle de l’emplacement dans le magasin. Il y a une place pour la presse de programmes de télévision où on trouve éventuellement « Le Pèlerin », une pour les magazines d’actualité ou politique où on trouve éventuellement « La Vie », une autre pour la presse d’Histoire ou se trouve « Histoire du Christianisme », il y a même un rayon « ésotérique » assez développé où se retrouve parfois, bien malgré lui, « Feu et Lumière ». Mais de place spécifique pour la presse religieuse, il n’y en a pas beaucoup. J’espère que « France catholique » sera rangé non loin de « La Vie » ou de « Témoignage Chrétien ». Il serait souhaitable sans doute que d’autres journaux chrétiens fassent le saut car, on a beau dire, en matière de presse comme pour beaucoup de choses jugées non totalement indispensables, l’offre crée la demande.

Zenit : Quel accueil avez-vous reçu aux NMPP ?

F. Aimard : Un accueil très professionnel. On a communiqué le texte suivant aux marchands de journaux : « France Catholique revient dans les kiosques. Depuis plus de 80 ans, cet hebdo catholique pointe chaque semaine, sous une forme facile à lire, ce qu’il faut retenir de l’actualité générale. Il comporte un supplément d’infos spécifiquement religieuses, des pages pour aider à prier et à réfléchir et des pages culturelles (expos, musique, cinéma) qui ont fait sa réputation. Son concept éditorial le situe dans la ligne du Pape Benoît XVI et refuse toute radicalisation « identitaire » ou « protestataire ». France Catholique s’exprime avec le ton militant de la Nouvelle Evangélisation lancée par Jean-Paul II. »
Il faut croire que ce texte a porté puisqu’il a suscité quelques candidatures spontanées de libraires prêts à faire l’expérience de vendre France Catholique.

Zenit : Quels sont vos espoirs de développement à partir des kiosques ?

F. Aimard : A vrai dire ce sont des espoirs si faibles que je ne vous livrerai aucun chiffre. Une chose est certaine, c’est que cette décision a déjà eu un effet positif sur nos amis les plus proches. Ils se sont trouvé un petit travail militant très facile à faire, qui consiste à aller chez son marchand de journaux et à lui demander s’il a  » France Catholique « . Premier cas de figure : il l’a ; alors on l’achète au moins une fois, ou on achète autre chose, on discute, on fait en sorte que le journal soit mieux affiché. Deuxième cas, pas si rare malheureusement : il pense l’avoir quelque part, mais il n’en est pas bien sûr. Il cherche, il trouve. Le journal va sortir du paquet bien ficelé ou du placard. C’est le but recherché. Troisième cas, il n’a pas reçu le journal. Mais il peut le demander au réseau des NMPP. C’est affaire de contact personnel. Voilà un militantisme tranquille et individuel à la portée de tous, et qui sera bon pour nous, comme pour les marchands de journaux qui vont peut-être ainsi trouver de nouveaux clients… On nous a réclamé par ailleurs des affichettes. Tout cela est excellent pour le moral. C’est de l’évangélisation au plus petit niveau qui ne réclame pas un sacrifice considérable et qui permet de sortir quand même de nos « douillettes paroisses ».

Zenit : A quoi sert l’hebdomadaire « France Catholique » quand tant de nouveaux médias chréti
ens se sont développés, et que l’enjeu de la télévision par exemple, paraît autrement vital ?

F. Aimard : Je ne vais pas vous dire que « France Catholique » est indispensable au projet divin car je n’en sais rien. Une chose est sûre, il existe. Il faut croire que c’est pour quelque chose. Je sais qu’il a rendu de grands services à l’Eglise par le passé, et je constate qu’il continue d’en rendre d’inestimables à divers témoins du Christ aujourd’hui… et à ses abonnés : j’en ai des témoignages très émouvants. Il est vrai que la plupart des nouveaux mouvements d’Eglise, la plupart des diocèses ont développé des médias de plus en plus professionnels. Vrai aussi que de nouveaux journaux ont occupé un terrain qui tend par ailleurs à se réduire, et que l’enjeu des radios diocésaines ou de KTO est passionnant.
Il me semble toutefois que notre hebdomadaire reste un espace unique de liberté pour la pensée et des débats (parfois un peu rébarbatifs), pour des initiatives nouvelles et pas toujours reconnues facilement, pour une rencontre entre des catholiques qui ne sont pas tous exactement sur la même longueur d’ondes. Tout cela mérite à mon avis respect, reconnaissance et même soutien à cause d’une longue tradition de réflexion, de modération politique et d’ouverture culturelle, de fidélité à Rome et d’esprit très militant renouvelé, un esprit qui rafraîchit l’âme de beaucoup, qui ont plus que jamais besoin à la fois d’être confortés et d’être stimulés.
En tout cas merci à Zenit de s’être fait l’écho de notre actualité technique, dont j’espère qu’elle intéressera le public catholique le plus large, même celui qui est abonné à d’autres journaux que le nôtre, ou qui n’est abonné à aucun journal parce qu’il trouve tout ce dont il a besoin ailleurs… sur Internet par exemple.

Pour retrouver « France Catholique » sur Internet, cf. :
http://www.france-catholique.fr

http://www.monde-catholique.com

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ZENIT Staff

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