Forum international de Bioéthique: L’embryon humain tiraillé

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Entre la réalité biomédicale, le chaos juridique et les multiples interrogations éthiques

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ROME, lundi 21 octobre 2002 (ZENIT.org) – L’embryon humain tiraillé entre la réalité biomédicale, le chaos juridique et les multiples interrogations éthiques. Tel pourrait être le résumé succinct de ce premier Forum international de Bioéthique organisé par « Médecine et Dignité de l’Homme » à Bruxelles ces 19 et 20 octobre.

Plus de 600 personnes, dont de nombreux jeunes, représentant une dizaine de pays, ont participé à ce Forum. Cette association internationale d’origine française « Médecine et Dignité de l’Homme », présidée par Elisabeth Bourgois, écrivain, avait choisi Bruxelles, au coeur de l’Europe, pour étudier ces questions qui dépassent largement un territoire national. L’association a pour but de « promouvoir une éthique médicale fondée sur les principes de la dignité de l’homme et du respect de toute vie humaine » cf. www.theembryo.com.

Résumé des conférences

Aspects biomédicaux :
– Dr Paulina TABOADA (spécialiste en Médecine Interne, Docteur en Philosophie à l’Académie Internationale du Liechtenstein)
o L’analyse de la différence substantielle entre le clonage thérapeutique et le clonage reproductif a abouti à la conclusion que la seule différence résidait en la poursuite ou non de l’évolution de vie de l’embryon et en son utilisation. Les questions éthiques qui se posent sur le clonage reproductif doivent aussi s’appliquer au clonage thérapeutique.

– Professeur Giuseppe NOIA (Obstétricien Gynécologue à la Polyclinique Gemelli de Rome)
o Après avoir exposé les données scientifiques en ce qui concerne les cellules souches embryonnaires et adultes, et leur utilisation en vue de régénérer différents tissus, le Professeur NOIA a exposé une nouvelle possibilité scientifique : la xéno-transplantation (un fantastique espoir de thérapie fœtale)

– Docteur Catherine SIBILLE (Centre de Génétique Humaine de l’université Catholique de Louvain)
o Le diagnostic prénatal, de plus en plus systématique, constitue une avancée extraordinaire dans les recherches pour mieux dépister et connaître certaines maladies, mais ouvre néanmoins la voie à la sélection eugéniste.

– Professeur Philippe ANTHONIOZ, Professeur d’histologie, embryologie, cytogénétique CHRU de Tours, Gynécologue
o Partant de la biologie, il a mis l’accent sur le fait que l’embryon est fils ou fille d’un père et d’une mère, d’où la question délicate du statut filial d’un éventuel clone humain. C’est la jeunesse même de l’embryon qui lui donne son immense capacité de transformation et donc toute sa richesse. « Je ne parle pas « d’embryons » mais « d’enfants embryonnaires » , je vous suggère d’en faire autant»

-Aspects juridiques :

– Mr Guy DE VEL, (Docteur en Droit, Directeur Général des Affaires Juridiques du Conseil de l’Europe), Mme BLUMBERG MOKRI, (Docteur en Droit, avocat à la Cour d’Appel de Paris), Professeur Carlo CASINI (Ex Président du comité juridique du Parlement Européen, Magistrat à la Cour Suprême de Cassation d’Italie, membre du Comité National de Bioéthique en Italie), Professeur Etienne MONTERO (Faculté de Droit de Namur)

o L’exposé des différents textes du Conseil de l’Europe, de la Charte des Droits fondamentaux de l‘Union Européenne, et ceux de différents Droits Nationaux, conduit à la constatation d’un véritable chaos juridique quant au statut de l’embryon. « On s’aperçoit que contrairement à d’autres domaines du Droit, la démarche législative tant en France, qu’au niveau régional européen, consiste à ériger des règles de protection autour de l’embryon humain, avant même d’être en mesure de livrer une définition de cet intérêt protégé ». (Mme Blumberg Mokri) Depuis sa conception, et jusqu’à la naissance, l’embryon puis le fœtus, représentent un processus biologique continu, alors que l’évolution du droit dans ses différentes sources a amené une dissociation artificielle, non fondée scientifiquement et variable selon les textes. Or ce chaos juridique ne peut perdurer en raison de ses graves conséquences, certes budgétaires (recherches), mais aussi et surtout en ce qui vise la définition même des Droits de l’Homme, « car l’Europe n’est pas seulement marché et concurrence, mais également un espace juridique privilégié des Droits de l’Homme » (Prof Casini)

Aspects éthiques

– Professeur Dianne NUTWELL IRVING (Professeur de philosophie in the Catholic Universty of America.) Councillor Peter GARRETT (Research and Education Director of Life, GB), professeur Gonzalo MIRANDA ( Doyen de la Faculté de Bioéthique de Rome), Professeur Leigh TURNER (Unité d’Ethique biomédicale de l’Université Mc Gill – Montréal) Dr Xavier MIRABEL ( Cancérologue, Président du collectif contre l’Handiphobie), Professeur Alain MATTHEEUWS (Institut d’Etudes Théologiques de Bruxelles) Professeur Martha TARASCO MICHEL (Faculté de Bioéthique de Mexico)

o Professeur MIRANDA : dès la fécondation, chaque cellule agit en interaction avec les autres cellules, dans la réalité de l’unicité d’un nouvel être humain. C’est toute la beauté de la maternité.

o Docteur Xavier MIRABEL : la pratique des diagnostics prénataux suit les progrès de la médecine mais aussi une demande très forte des familles et des soignants. La société, « anxiogène » devant tous risques de handicaps, conduit à la sélection embryonnaire et au rejet du handicap. « Un chiffre intéressant : alors que le nombre de grossesses tardives ne cessent de croître, occasionnant un risque chez l’enfant d’être atteint de trisomie 21, en 4 ans le nombre de naissances d’enfants trisomiques a été divisé par trois en France. Puisqu’il n’est pas possible de traiter la trisomie, n’y a-t-il pas ici une sélection eugéniste ? »

o Professeur MATTHEEUWS : face aux observations scientifiques, à la question délicate de son « individuation » et aux différentes connaissances de son statut, l’embryon reste une énigme et un mystère. De là se pose la nécessité de l’application du principe de précaution : « on ne tire pas sur un buisson qui bouge sans savoir s’il s’agit d’un chasseur ou d’un perdreau ! »

o Professeur TARASCO : la projection narcissique de soi-même sur l’enfant à venir en vient à systématiser le mythe de l’enfant parfait.

En conclusion, la présidente Elisabeth BOURGOIS a proposé aux participants de ce forum l’adoption de résolutions finales, proposées par «Médecine et Dignité de l’Homme »

RESOLUTIONS
proposées par « Médecine et Dignité de l’Homme à l’occasion de son premier Forum International des 19 et 20 octobre 2002 à Bruxelles, sur le thème : « Concevoir l’embryon »

Avant même de constituer un problème de droit civil et pénal, le respect de l’être humain est d’abord une exigence de civilisation. Dans le monde des hommes chaque individu est un être unique, qui demande à être reconnu et promu comme tel. Pour vivre il a besoin de l’aide de tous, à commencer de ceux qui l’ont engendré. A son tour il devra accueillir les autres et user de toute sa créativité pour les aider à vivre le mieux possible ; sans cet accueil et cette entraide mutuelle, la vie sociale, la vie tout court devient impossible. Il s’agit, comme vous le savez, d’une condition indispensable de l’existence en commun.

Ce document a pour objet de rappeler les principes scientifiques, juridiques et moraux qui concernent l’embryon humain et qui devraient être considérés par la législation des Etats

1. Considérant que la science établit que dans t
out nouveau zygote humain, distinct du corps de ses géniteurs, s’est déjà constitué l’identité biologique d’un nouvel individu humain et qu’il est appelé à se développer en tant que personne humaine par un devenir progressif, où aucune étape n’apparaît plus décisive qu’une autre,

2. Considérant le cas où certains ne reconnaîtraient pas cette identité biologique du zygote et en application du principe juridique de précaution pour respecter la vie de chaque embryon humain comme celle d’un individu de l’espèce humaine,

3. Considérant que le devoir des Etats consiste à organiser la vie sociale en vue du bien commun, à protéger la vie de tous, sans oublier celle des plus faibles,

4. Considérant que la loi doit garantir pour tous, les droits inhérents à la dignité de la personne à commencer par le droit fondamental à la vie et à l’intégrité physique de tout être humain depuis la conception jusqu’à la mort et qu’un Etat qui agit contrairement à ces principes et obligations renonce à garantir l’égalité de tous les citoyens devant la loi minant ainsi le fondement premier d’un Etat de droit,

Nous demandons que les gouvernements de l’Europe, le Conseil de l’Europe et l’Union européenne

1- s’engagent à faire en sorte que les Etats prennent les mesures législatives indispensables pour défendre, protéger et promouvoir toute personne humaine en assurant sa protection par la loi, dès sa conception..

2- interdisent, de ce fait, toute forme d’instrumentalisation de l’embryon humain, son clonage, sa destruction ou sa mutilation.

3- s’opposent aux subventions des recherches qui, en instrumentalisant systématiquement les embryons humains, violent en eux, la dignité de l’humanité,

4- s’engagent à favoriser d’urgence toutes les recherches concernant les cellules souches, uniquement adultes.

5- s’engagent à favoriser les recherches sur les traitements des maladies génétiques sans destruction ou mutilation des embryons malades.

A l’ouverture du Congrès, le samedi 19 octobre, un message de Jean-Paul II pour le Forum, a été lu par Monseigneur Luigi CELATA, Nonce Apostolique de Belgique.

« Informé du Forum International de Bioéthique qui se tient à Bruxelles les 19 et 20 octobre 2002 sur le thème « Concevoir l’embryon », le Saint Père salue cordialement tous les participants. Il les encourage volontiers dans leurs réflexions, pour faire connaître à tous, leur responsabilité dans ce domaine si important pour l’avenir de notre société. Souhaitant qu’une telle initiative contribue à éclairer les consciences, afin que soit pleinement respectée la dignité de l’être humain dès sa conception, comme le demande l’enseignement de l’Eglise, le Pape accorde à tous, organisateurs, intervenants et participants, une particulière Bénédiction apostolique».

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ZENIT Staff

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