Famine en Afrique : « Respectons les valeurs humaines »

Print Friendly, PDF & Email

Interview de Mgr Anthony Muheria, évêque du diocèse de Kitui (Kenya)

Share this Entry
Print Friendly, PDF & Email

ROME, Mardi 18 octobre 2011 (ZENIT.org) – L’intervention de Benoît XVI en faveur des peuples touchés par la faim due à la sècheresse a sauvé des milliers de personnes, majoritairement non-catholiques. Mais au-delà de la sècheresse, le problème qui demeure est aussi dû aux idéologies de certaines entités internationales qui conditionnent l’aide à des problématiques peu ressenties en Afrique. Il faut des infrasrtuctures pour l’irrigation, des routes, mais aussi la formation d’un leadership qui s’occupe de la population, puisque les hommes politiques oublient les besoins des Africains. C’est ce qu’a indiqué à ZENIT l’évêque du diocèse de Kitui au Kenya, Mgr Anthony Muheria, membre de l’Opus Dei.

ZENIT : Excellence, actuellement, quelle est la situation au Kenya et dans la Corne de l’Afrique, et quel a été l’importance de l’appel de Benoît XVI ?

Mgr Muheria : Nous nous trouvons dans une période de famine. Nous remercions beaucoup le pape pour ses paroles qui ont été prononcées avant les interventions internationales. Nous avons beaucoup ressenti sa proximité, même si dans les grands diocèses, la majorité des personnes ne sont pas catholiques.

Je ne veux pas dire que l’aide a été la conséquence automatique des paroles du pape, même si c’est après son intervention que l’aide est arrivée. Peut-être que les problèmes bureaucratiques ont été dépassés grâce à l’intervention du pape qui a démontré une préoccupation paternelle.

Comment expliquer qu’il puisse y avoir encore aujourd’hui des famines ou des choses de ce genre ?

En parti parce que nous n’avons pas de structures au Kenya ni même en Afrique. Parce que nous ne pensons pas à long terme. Il existe un problème de gouvernement mais aussi de structures sociales. La politique a conduit à un individualisme et ne répond donc pas directement aux besoins généraux de la population.

Il existe par ailleurs un manque de leadership et de formation. Beaucoup vont étudier en Europe et ne reviennent pas pour donner ce qu’ils ont appris.

Mais l’aide internationale a-t-elle été suffisante ?

Les Caritas internationale et nationales, des institutions internationales nous ont aidés. Suffisamment si nous considérons qu’ils ont évité la mort de personnes, mais pas assez si nous pensons à la qualité de vie. Suffisamment pour une urgence mais la situation n’a pas été résolue.

Encore une sècheresse et tout recommencera. Nous avons besoin de partenaires qui, en quelques années, créent des structures comme l’irrigation à faible débit. Ce genre de technologie est utile dans les zones où l’ont dépend de la pluie.

Il faudrait aussi des structures et des voies de communication, parce que dans certaines zones les récoltes sont abondantes mais on ne peut pas les transférer là où il y a la famine. Il ne faut pas non plus passer par les réseaux commerciaux qui profitent de la situation pour gagner de l’argent facilement. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas. Quand il y a une famine, on importe du maïs mais d’autres fois et en d’autres lieux, on élimine des récoltes pour contrôler les prix.

Et dans la Corne de l’Afrique ?

Là, les choses se compliquent plus en raison de la guerre. Le groupe Shabab lié à Al Quaeda est en train de provoquer un exode. Chaque jour, mille réfugiés arrivent dans les camps de réfugiés du Kenya où se trouvent déjà 400 000 personnes.

Mgr Tomasi a parlé d’un génocide. Mais y a-t-il des responsables ?

Il y a des responsabilités si nous pensons à la dignité de la personne humaine. Même ces idéologies qui n’ont pas de lien avec les problèmes réels des gens.

Cela me désole de le dire, mais il y a des institutions qui menacent de suspendre l’envoi de nourriture si l’on ne s’engage pas à lutter contre la discrimination envers les homosexuels, qu’il existe un couple gay qui a souffert de discriminations. Mais ici, nous sommes en train de mourir de faim, nous avons besoin d’eau, ce sont des problèmes urgents.

L’environnementaliste et prix Nobel Wangari Maathai, décédée récemment, s’est prodiguée en faveur de l’environnement. Elle encourageait une reforestation destinée à changer le climat et à favoriser l’agriculture pour combattre la faim.Elle était à la tête d’institutions, mais quelqu’un d’important lui a-t-il donné son appui ?

Ils se préoccupent de choses qui n’ont rien à voir avec nos problèmes en Afrique. Ils ne mettent pas au centre la dignité humaine. Et je ne veux pas entrer dans le thème de l’avortement qui est une autre problématique. Les personnes ont le droit de manger et de s’habiller, ils ne peuvent pas nous couper les vivres en raison du droit à l’homosexualité. Ils sont en train de jouer un jeu pervers et je le dis en tant qu’évêque. Je ne parle pas des valeurs chrétiennes, mais au moins respectons celles humaines. 

Share this Entry

ZENIT Staff

FAIRE UN DON

Si cet article vous a plu, vous pouvez soutenir ZENIT grâce à un don ponctuel