Europe : les décideurs appelés à se tourner "vers les périphéries"

Print Friendly, PDF & Email

Et « vers les cieux », par Mgr Gallagher

Share this Entry
Print Friendly, PDF & Email

Plus les décideurs européens « se tourneront vers les hommes et les femmes des périphéries de la société » et « vers les cieux, c’est-à-dire vers des idéaux élevés », plus « ils favoriseront le bien commun de tous », affirme Mgr Gallagher : « Regarder vers la périphérie et vers les cieux n’écarte pas de l’essentiel; au contraire, cela ordonne les actions vers le droit chemin ».

Mgr Paul Gallagher, secrétaire pour les relations avec les États, est intervenu lors de la deuxième rencontre des conseillers juridiques des Conférences épiscopales d’Europe, qui a eu lieu à Bratislava, en Slovaquie, du 4 au 6 mars 2015.

La conférence de l’archevêque, qui avait pour thème « Construire l’unité européenne dans l’esprit chrétien », était centrée sur les deux discours du pape François au Conseil de l’Europe et au Parlement européen – deux institutions de « défense de la dignité humaine » – à Strasbourg, le 25 novembre 2014.

Attirer l’attention sur les périphéries

Le pape a voulu prendre la parole à Strasbourg et non à Bruxelles, pour s’adresser non seulement au Parlement mais aussi au Conseil de l’Europe « où toutes les nations européennes sont représentées, y compris la Russie et l’Ukraine, ainsi que l’Arménie et l’Azerbaïdjan, où de graves conflits sont en cours », a noté l’archevêque : « le continent est plus grand que l’Union européenne… son but était d’attirer l’attention sur les « périphéries » géographiques ».

Mgr Gallagher a fait observer qu’aujourd’hui en Europe, « l’argent semble être devenu plus important que les personnes, en particulier [les personnes] pauvres et vulnérables ».

Le pape a donc réaffirmé « la dignité de la personne humaine », dont « toutes les lois devraient viser la protection » : « Les droits humains doivent être fixés dans les lois positives de chaque État, être protégés par les personnes qui ont autorité, et respectés partout et par tous. »

L’archevêque a cité le pape pour préciser l’utilisation juste de ces droits humains : « il convient de faire attention pour ne pas tomber dans des équivoques qui peuvent naître d’un malentendu sur le concept de droits humains et de leur abus paradoxal. Il y a en effet aujourd’hui la tendance à une revendication toujours plus grande des droits individuels, qui cache une conception de la personne humaine détachée de tout contexte social et anthropologique, presque comme une « monade » (μονάς), toujours plus insensible aux autres « monades » présentes autour de soi. ».

Ainsi le concept de « devoir » est « lié au concept des droits » : il est « tout aussi essentiel et complémentaire », a souligné Mgr Gallagher. En d’autres termes, « chaque être humain fait partie d’un contexte social dans lequel ses droits sont liés à ceux des autres et au bien commun de la société ».

Vers la périphérie et vers les cieux

Le pape a également rappelé les racines chrétiennes du continent, car « le christianisme n’est pas seulement le passé, mais aussi le présent et l’avenir », a-t-il poursuivi : face aux menaces contre la dignité de la personne humaine, « l’Europe peut grandement bénéficier de la lumière de la morale chrétienne ».

D’où l’appel du pape : « L’heure est venue de construire ensemble l’Europe qui tourne, non pas autour de l’économie, mais autour de la sacralité de la personne humaine, des valeurs inaliénables ; l’Europe qui embrasse avec courage son passé et regarde avec confiance son avenir pour vivre pleinement et avec espérance son présent. Le moment est venu d’abandonner l’idée d’une Europe effrayée et repliée sur elle-même, pour susciter et promouvoir l’Europe protagoniste, porteuse de science, d’art, de musique, de valeurs humaines et aussi de foi. L’Europe qui contemple le ciel et poursuit des idéaux ; l’Europe qui regarde, défend et protège l’homme ; l’Europe qui chemine sur la terre sûre et solide, précieux point de référence pour toute l’humanité ! »

« Cela peut sembler paradoxal, mais plus les responsables de la politique, de l’économie, de la culture, se tourneront vers les hommes et les femmes des périphéries de la société, plus ils placeront la dignité de l’individu au centre de leurs activités, plus ils favoriseront le bien commun de tous », a ajouté l’archevêque.

Et plus les décideurs « se tourneront vers les cieux, c’est-à-dire vers des idéaux élevés, sans laisser les valeurs du marché dominer leur travail, plus ils vivront l’unité et auront la capacité de résoudre les problèmes ».

« Regarder vers la périphérie et vers les cieux n’écarte pas de l’essentiel; au contraire, cela ordonne les actions vers le droit chemin, de sorte qu’elles puissent vraiment protéger les droits humains », a-t-il insisté. S’il n’est « pas du devoir de l’Église de mener une politique concrète », sa mission est « d’inviter les politiciens à regarder plus loin que les solutions à court terme ».

L’amour du pape pour le continent

Évoquant les défis de l’Europe, le pape s’est arrêté en particulier sur les conditions des migrants : « On ne peut tolérer que la Mer Méditerranéenne devienne un grand cimetière ! Dans les barques qui arrivent quotidiennement sur les côtes européennes, il y a des hommes et des femmes qui ont besoin d’accueil et d’aide. L’absence d’un soutien réciproque au sein de l’Union Européenne risque d’encourager des solutions particularistes aux problèmes, qui ne tiennent pas compte de la dignité humaine des immigrés, favorisant le travail d’esclave et des tensions sociales continuelles. L’Europe sera en mesure de faire face aux problématiques liées à l’immigration si elle sait proposer avec clarté sa propre identité culturelle et mettre en acte des législations adéquates qui sachent en même temps protéger les droits des citoyens européens et garantir l’accueil des migrants. »

« Le pape « du bout du monde » a montré son amour et son souci pour notre continent », a ajouté Mgr Gallagher. Dans son sillage, le Saint-Siège appelle les peuples de l’Europe à poursuivre l’unité en se libérant « des faux égalitarismes et de la bureaucratie excessive, afin d’assurer une paix durable ».

Pour qu’il n’y ait « plus jamais de guerre en Europe », il faut « que la confiance et la fraternité grandissent et soient consolidées dans l’acceptation des différences culturelles ». L’Église catholique « peut offrir une aide tangible en faveur de l’unité de la famille de l’Europe », a conclu l’archevêque.

Share this Entry

Anne Kurian-Montabone

Baccalauréat canonique de théologie. Pigiste pour divers journaux de la presse chrétienne et auteur de cinq romans (éd. Quasar et Salvator). Journaliste à Zenit depuis octobre 2011.

FAIRE UN DON

Si cet article vous a plu, vous pouvez soutenir ZENIT grâce à un don ponctuel