Deux supérieurs commentent l’Instruction du Saint-Siège sur l’obéissance

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Les supérieurs des jésuites et des scolopes

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ROME, Mardi 10 juin 2008 (ZENIT.org) – Zenit a demandé aux supérieurs généraux de deux ordres masculins, la compagnie de Jésus et l’ordre des frères des écoles pies ( Scolopes), de commenter la récente Instruction du Saint-Siège sur l’autorité religieuse et l’obéissance dans la vie religieuse.

Les supérieurs, tous deux espagnols, évaluent très positivement le document « le service de l’autorité et l’obéissance », publié par la Congrégation pour les Instituts de vie consacrée et les Sociétés de Vie apostolique le 11 mai, mais proposent de poursuivre la réflexion. L’Instruction a pour sous-titre Faciem tuam, Domine, requiram (je chercherai ton visage, Seigneur) et est signée par le préfet de la Congrégation, le cardinal Franc Rodé, C.M.

Le supérieur des Jésuites

« Mon sentiment à l’égard de ce document est très positif. Je pense qu’il a été écrit, élaboré et continuellement enrichi de concepts minutieusement choisis », souligne le nouveau supérieur général des jésuites, le père Adolfo Nicolás.

Pour le responsable de la Compagnie de Jésus, le texte « au niveau théologique et spirituel est centré sur Jésus et sur son obéissance au Père », « un bon point de départ qui s’adapte facilement à la plupart des religieuses et religieuses auxquels ce document s’adresse ».

Selon le successeur de saint Ignace de Loyola, « ce document ne cherche pas à apporter de grandes nouveautés, il veut tout simplement expliquer comment fonctionne une vie consacrée, faire connaître les motivations et les orientations de fond ».

Le père Nicolás souligne que « si on lui demandait, dans un exercice de coopération fraternelle visant à améliorer ce document », d’indiquer « quels sont les points à développer encore », il proposerait les points suivants :

« Il est juste de centrer la réflexion sur Jésus et sur son obéissance au Père, souligne-t-il, mais peut-être faudrait-il prolonger la réflexion jusqu’à découvrir comment Jésus lui-même fut guidé par l’Esprit dès le début de sa vie publique (comme l’explique l’Evangile selon saint Marc). La longue tradition du discernement spirituel, si centrale dans l’obéissance, se fonde largement sur l’attention et sur la sensibilité à percevoir les signes de l’Esprit dans la vie et dans le cœur des fidèles ».

« Ce document souligne à juste titre la très importante fonction des ‘médiations’ humaines (institutions, processus, personnes – à commencer par le supérieur et en y incluant la communauté dans laquelle nous vivons – loi morale, normes et règlements, etc.) », a poursuivi le supérieur.

Même « si cela est juste et nécessaire pour une obéissance raisonnable et réaliste », le père Nicolás a expliqué qu’il est difficile que les médiations humaines « soient exemptes d’éléments culturels, idéologiques, de préférences personnelles et d’autres facteurs qui influent sur notre jugement concernant la vérité et la réalité ». Il faudrait, selon lui, « davantage insister sur les réserves, les conditions et les paramètres à l’intérieur desquels ces médiations peuvent réellement nous ouvrir le chemin qui porte à la volonté de Dieu ».

« Il nous est tous arrivé dans la vie de pouvoir constater que les médiations n’aident pas toujours à rencontrer la bonté et la justice de Dieu, a-t-il souligné ; qu’elles peuvent même parfois être une entrave à cette rencontre ».

« On ne saurait oublier que Jésus, notre modèle d’obéissance, traitait de façon plutôt brusque les médiateurs et les médiations qui, à son époque, prétendaient être des garants indiscutables de la volonté de Dieu ».

C’est pourquoi le supérieur des Jésuites a admis qu’il chercherait bien dans ce document « un tout petit coin pour y glisser l’élément ‘surprise’, qui est le compagnon inséparable, bien qu’inattendu, de tout discernement réel et profond ».

« Si ce que nous cherchons vraiment de toute notre âme est la Volonté de Dieu, et que Dieu est libre de guider et de se manifester à ceux qui le cherchent, il faut laisser une porte ouverte à la surprise. La Bible est un témoignage continu de combien cela nous coûte à nous humains de vivre ouverts à la nouveauté de Dieu. Et ceci nous dit quelque chose concernant les médiations et leur caractère limité ».

Le père Nicolás a ensuite relevé qu’« il n’est pas rare, dans les contextes culturels ou sociaux de certains pays, d’entendre que ‘le problème aujourd’hui n’est pas un problème d’obéissance mais d’autorité’ ».

« C’est une expression qui demande a être clarifiée », a-t-il ajouté, « mais que l’on ne peut ignorer et qui doit être analysée par ceux dont une partie de la mission consiste à aider les autres à chercher la volonté de Dieu »

« Que l’obéissance puisse représenter un acte suprême de liberté me semble tout à fait juste et vrai », a-t-il admis, même si cela « n’arrive bien entendu pas de manière mécanique ou automatique ».

« Mais qu’une personne puisse grandir immensément dans la liberté personnelle en sortant de soi-même pour vivre dans une ouverture totale à l’horizon de Dieu et au chemin de Jésus me paraît non seulement une réalité évidente, mais une perspective humainement encourageante et porteuse de grande espérance ».

« Et ceci montre la purification radicale à laquelle nous devons soumettre nos concepts d’obéissance, en accordant une attention particulière au concept de bon sens que nous avons utilisé avec tant d’insouciance ».

Le Supérieur des Scolopes

Pour le père Jesús María Lecea, supérieur général des frères des Ecoles Pies, l’Instruction « le service de l’autorité et l’obéissance » est un texte suggestif et positif pour raviver dans la vie des religieux le sens évangélique du vœu d’obéissance à la suite du Christ obéissant ».

« Au-delà de l’aspect disciplinaire, le document présente la signification théologique et pastorale du service de l’autorité et de l’exercice d’obéissance. Ceci est applicable à tous, supérieurs et compagnons de communauté », a souligné le successeur de Saint Joseph Calasanzio.

« Si dans ses contenus, ce texte ne constitue pas une nouveauté, car il suit la doctrine de documents récents comme ‘Vie fraternelle en communauté’ (1994), ‘Vie consacrée’ (1996) et ‘Repartir du Christ’ (2002), certains des aspects sont nouveaux, comme le service de l’autorité au-dessus du pouvoir, la recherche commune (supérieurs et frères) de la volonté de Dieu, la dignité de la personne à offrir sa propre liberté, l’assistance pastorale à donner dans les moments conflictuels ».

Le père Lecea souligne que « l’autorité du supérieur est cimentée dans son expérience d’obéissance à l’Evangile et au projet de vie de sa congrégation ».

« En pratiquant l’obéissance on acquiert de l’autorité devant nos frères, a-t-il ajouté, qui voient en leurs supérieurs des médiations nécessaires pour unir les volontés à la recherche de la volonté de Dieu, pour pouvoir ainsi mieux exercer la mission apostolique et en obtenir de meilleurs fruits ».

Le Supérieur des Scolopes a enfin rappelé l’importance de l’application de l’obéissance « tant dans le contexte de la vie communautaire que dans celui de l’exercice de la mission spécifique de la congrégation ou de l’institut ».

Le texte, prévoit-il, « donnera un nouvel élan à la vie religieuse dans quelque chose qui est pour elle est fondamental : la recherche du visage de Dieu dans notre histoire humaine ».

Miriam Díez i Bosch

Traduction française : I
sabelle Cousturié

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ZENIT Staff

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