Des accusations anonymes sans fondement: P. Lombardi réagit à un livre récent

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On peut être un admirateur de Benoît XVI sans être un « bon disciple »

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Un livre récent publié en France sur le pontificat de Benoît XVI apporte de précieux renseignements, mais il porte aussi des graves accusations anonymes, sans fondement, ce qui est « inacceptable », déclare le P. Lombardi dans une note publiée par Radio Vatican en français ce 18 février.

Le père Federico Lombardi, directeur de la salle de presse du Saint-Siège et de Radio Vatican, déplore ces aspects négatifs du livre intitutlé  « L’homme qui ne voulait pas être Pape » par Nicolas Diat chez Albin Michel.

Dans cette déclaration, le porte-paorle du Saint-Siège critique la méthode et l’esprit du livre et conteste la véracité de certains passages qu’il résume ainsi: « L’impression qui en ressort est que Benoît XVI était entouré de démons (…). L’auteur du livre, qui est à coup sûr un grand admirateur du Pape Benoît, ne semble pas en revanche en être un bon disciple (…). Dommage! Ce que l’Auteur dit de Benoît XVI est beau. Pourquoi le gâcher de cette façon ? »

Déclaration du père Federico Lombardi, s.j.

Un ouvrage volumineux en français (Nicolas Diat : « L’homme qui ne voulait pas être Pape », chez Albin Michel) a été publié il y a quelques jours. C’est le fruit d’un travail de longue haleine, le résultat de nombreux entretiens entre l’Auteur et plusieurs personnalités ecclésiastiques. L’ouvrage offre un vaste panorama du pontificat du Pape Benoît XVI. Il évoque également le début du pontificat de son Successeur, mais, comme le titre l’indique, l’auteur a surtout voulu approfondir la pensée ainsi que la personnalité de Joseph Ratzinger, son esprit et ses intentions.

Le livre retrace les événements et fournit de nombreuses informations utiles pour les replacer dans leur contexte. Les interventions et les discours du Pape sont largement rapportés. L’Auteur les relit avec intelligence et analyse souvent en profondeur les intentions qui étaient à la base. Il s’appuie sur les nombreux témoignages personnels recueillis lors de ses conversations avec des témoins privilégiés et fiables.

Bref, le livre offre sans nul doute une contribution significative à la connaissance et à la compréhension du pontificat du Pape Benoît, dont l’Auteur est un admirateur sincère et un observateur attentif.

Mais l’Auteur ne s’arrête pas là. Inévitablement, il évoque à plusieurs reprises les faits et les personnes qui ont entouré le Pape. Le cadre général fait état des relations complexes, des difficultés, des tensions, des moments particulièrement difficiles, qui ont longtemps défrayé la chronique et suscité des débats. On ne peut certes pas parler de manière approfondie du pontificat du Pape Benoît XVI en faisant abstraction des vicissitudes qui ont atteint un niveau dramatique avec la soustraction de la part du majordome du Pape de documents réservés et leur publication.

C’est à ce niveau-là que l’ouvrage mérite de sérieuses critiques, lorsque, à plusieurs occasions, il prend pour cible des personnes précises, en les nommant, en leur attribuant explicitement des responsabilités très graves, sans un fondement certain ou – tout au moins dans certains cas – sans aucun fondement (deux exemples particulièrement graves : dans le cas du cardinal Mauro Piacenza, on parle par exemple de ses rencontres avec Paolo Gabriele qui n’ont jamais eu lieu ; en renfort des accusations qui sont adressées à un autre cardinal, on cite pour preuve un document « sino-allemand » qu’à l’époque, en connaissance de cause, j’avais qualifié de « délirant » ; et on pourrait citer d’autres exemples). L’Auteur laisse entendre qu’il se base sur les témoignages qu’il a recueillis et ajoute, à la fin de l’ouvrage, une longue liste de remerciements à l’égard de personnalités influentes, dont de nombreux cardinaux. Mais, alors que l’identité des auteurs des témoignages positifs est clairement indiquée, les déclarations négatives et les accusations les plus graves restent anonymes même lorsqu’elles sont placées entre guillemets. En outre, plusieurs personnalités qui sont remerciées à la fin du livre ont pris leur distance par rapport à cet ouvrage dans lequel elles ne se reconnaissent pas.

Finalement, l’impression qui en ressort est que Benoît XVI était entouré de démons. L’auteur semble avoir identifié quelques adversaires auxquels il pense avoir le droit d’adresser non seulement des critiques compréhensibles pour leurs erreurs ou pour des faits certifiés, mais aussi les accusations les plus atroces de trahison, en allant au-delà de ce qui a été prouvé, de ce qui est plausible et licite.

Dans ce sens, contrairement à son intention, ce livre ne fait pas la lumière sur les tensions et les ombres de Vatileaks et annexes, mais paradoxalement dans plusieurs de ses pages, il finit par en devenir une illustration et un prolongement.

Et pourtant, nous espérions en être sortis, grâce à deux Papes et à leur sagesse.

Par sa décision historique de renoncer au Pontificat, en nous élevant dans une autre dimension, le Pape Benoît a contribué aussi à surmonter définitivement le climat de bavardages, de médisances et de mesquinerie qui, malheureusement, avait accompagné et assombri la dernière partie de son pontificat. Le Pape Benoît, nous le savons, avait affronté avec patience et sagesse, l’aspect douloureux et obscur des événements de la dernière partie de son pontificat. Il avait souhaité pour son majordome un procès pénal et une peine équitable avant de le gracier pour mettre un point final, conclusif et évangéliquement apaisant à ce triste chapitre.
En chargeant une Commission de trois cardinaux de mener une enquête, il avait aussi voulu porter un regard objectif et impartial sur les événements, par le biais de contacts plus larges et complexes qui n’auraient pu trouver place dans le cadre d’un procès pénal. Cette enquête, elle aussi, s’est achevée avant la fin de son pontificat et, comme on le sait, ses conclusions ont été remises personnellement et exclusivement à son Successeur. Un acte d’une grande et admirable sagesse.

L’auteur du livre, qui est à coup sûr un grand admirateur du Pape Benoît, ne semble pas en revanche en être un bon disciple.

Par ailleurs, et cela devrait être absolument clair pour tous, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du monde ecclésiastique, le Pape François a acheminé son pontificat sur des voies nouvelles, en toute liberté par rapport au passé, en projetant l’Église vers la mission et en envisageant les « réformes » en fonction de ce caractère missionnaire, en s’efforçant de la libérer des pesanteurs et des mesquineries qui l’entravent dans des dynamiques autoréférentielles et mondaines.

Par conséquent, si l’on a su saisir l’esprit de Benoît et celui de François, on peut dire que l’exercice visant à ranimer le trouble, en soutenant des interprétations, des hypothèses ou pire en attribuant des responsabilités et en lançant des accusations qui sont loin d’être fondées, cet exercice va résolument à l’encontre de ce que les deux Papes ont voulu et veulent. Bien entendu, chacun est libre d’assumer la responsabilité de ses propos et d’écrire ce qu’il juge opportun. Mais permettez-moi de dire que quand le Pape François fustige les bavardages, qui peuvent aller jusqu’à la calomnie – il le fait souvent, comme on le sait, et il l’a fait à plusieurs reprises avec une fermeté particulière le dimanche 16 février – il pense aussi à ce type d’ouvrages et de discours.
Dommage ! Ce que l’Auteur dit de Benoît XVI est beau. Pourquoi le gâcher de cette façon ?

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Federico Lombardi

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