Congrès missionnaire asiatique : Mgr Orlando Quevedo fait le point

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Entretien avec UCANEWS

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ROME, Jeudi 16 novembre 2006 (ZENIT.org) – Le point sur le récent congrès missionnaire asiatique est fait en ces termes par Mgr Orlando Quevedo : « Le chemin à parcourir est long, mais il y a des raisons d’espérer », indique « Eglises d’Asie », l’agence des missions étrangères de Paris (EDA 451, de la mi-novembre, cf. (eglasie.mepasie.org).

EDA rappelle en effet que, du 18 au 22 octobre 2006, un millier de délégués venus de vingt-cinq pays d’Asie ont pris part, à Chiang Mai, en Thaïlande, à un « Congrès missionnaire asiatique », le premier du genre (voir EDA 450).

Dans l’interview ci-dessous, accordée à l’agence d’information catholique Ucanews, à cette occasion, le secrétaire général de la Fédération des Conférences épiscopales d’Asie (FABC), Mgr Orlando Quevedo, donne son point de vue sur la signification pour l’Eglise en Asie d’un tel congrès, indique encore EDA. Nous publierons la seconde partie de l’entretien dans notre édition du 17 novembre.

Archevêque de Cotabato, aux Philippines, Mgr Quevedo, OMI, a été président de la Conférence épiscopale philippine de 1999 à 2003 et est depuis vingt ans engagé dans les travaux de la FABC. A Rome, il a assumé des responsabilités au sein du Conseil général du secrétariat du Synode des évêques ainsi qu’au Conseil pontifical ‘Justice et paix’. La traduction est de la rédaction d’Eglises d’Asie.

Ucanews : Que voyez-vous sortir de ce premier Congrès missionnaire asiatique ?

Mgr Orlando Quevedo : Dans les pays de l’Asie, les fidèles auront moins peur de leur identité de chrétiens, de « petit troupeau ». J’espère qu’ils seront moins sur la défensive et que, dans le respect, l’humilité et le courage, ils pourront mener leur vie de chrétiens au milieu de croyants d’autres religions, tout en travaillant avec tous pour le bien de la justice et des valeurs du Royaume. Ensuite, la conscience de la mission a grandi et cela vaut au-delà de l’Asie. Enfin, la compréhension de ce qu’est la mission, dans tous ses aspects, a crû, notamment le fait que la mission par le témoignage de vie est ce qu’il y a de plus important. Il y a une meilleure compréhension du fait que la mission n’est pas simplement d’aller en-dehors, à l’étranger notamment, mais peut être vécue dans la réalité de son propre pays. Le temps présent appelle à un dialogue accru avec les croyants des autres religions et, en même temps, à une meilleure prise de conscience et une confiance accrue en sa propre identité.

Comment qualifieriez-vous ce temps présent que vous évoquez ?

Je veux dire par là la confrontation entre les cultures, entre les religions, la suspicion. Le terrorisme peut être un révélateur mais il ne s’agit pas que de cela. J’ai à l’esprit le changement qui est cours dans les mentalités au sujet de la religion, des religions. Le rôle et la place que les religions ont dans les sociétés modernes qui sont sécularisées, sont l’objet de débats. En Occident, les chrétiens évangéliques et les protestants, ce que l’on appelle « la majorité morale » ou la droite morale, sont désormais présents dans l’espace public et ils pèsent sur la scène politique car ils votent selon ce qu’ils décrivent comme des critères de choix moral.

Comment la FABC peut-elle promouvoir la mission ?

Au sein de la FABC, les grands thèmes de l’inculturation, du dialogue interreligieux et du dialogue avec les peuples, tout particulièrement les pauvres, sont autant de lignes directrices. Il est du ressort des conférences épiscopales de mettre en œuvre ou de suivre les recommandations émises par les différentes assemblées plénières (de la FABC). Toutefois, on constate que l’impact de la FABC, tel qu’il a pu être évalué pour l’évaluation préparée en vue de l’assemblée plénière tenue à Manille en 1995, n’est significatif qu’au niveau des évêques et, éventuellement, à celui des prêtres. Il n’y a pas eu de véritable impact à la base.

A Mindanao, dans le sud philippin où je suis évêque, l’impact de la FABC en ce qui concerne le dialogue interreligieux ou les autres thèmes liés à l’inculturation et au dialogue avec les pauvres, est réel. Il peut même être qualifié de fort là où les Communautés ecclésiales de base (BECs) et les communautés humaines de base ont pris racine et se sont développées, à Sulu notamment (à l’extrême sud de la province). Les documents de Vatican II y sont utilisés et il en est de même, peu à peu, avec ceux produits par la FABC. Sur place, de nombreux responsables connaissent le contenu des messages issus des assemblées plénières.

Dans son ensemble, l’Eglise aux Philippines et sans doute dans un certain nombre d’autres pays n’est pas allée aussi loin. Au sein de la FABC, nous avons encore beaucoup de travail pour faire connaître et rendre vivant au niveau de la base l’ensemble des directives au sujet du dialogue interreligieux et de l’inculturation, par exemple. Toutefois, les règles de fonctionnement de la FABC n’autorisent un contact qu’avec les seules conférences épiscopales. Il n’est pas possible d’agir directement au niveau des diocèses avec des programmes concrets, à moins d’y être invité pour un séminaire ou une action concrète et précise.

Quelles sont les bases sur lesquelles la FABC étaye son travail en ce qui concerne le dialogue dans la mission ?

Au chapitre IV d’Ecclesia in Asia, sur lequel s’est appuyé ce congrès missionnaire asiatique, le pape Jean-Paul II écrit que la compréhension de la vérité se fait de manière graduelle. Il évoque un style d’évangélisation qui évoque plutôt qu’il ne provoque, un style progressif et graduel. On peut évangéliser en racontant la vie de grandes figures de la foi. On peut évangéliser par son propre style de vie. On peut évangéliser par un partage de foi en racontant des histoires et ceux qui appartiennent à d’autres religions racontent leurs propres histoires, liées à leur propre croyance. Pour l’Asie, le pape lui-même (Jean-Paul II) disait que la proclamation du Seigneur Jésus n’est pas la seule manière possible d’évangéliser ou d’annoncer le Christ. De fait, dans de nombreuses régions d’Asie, cela se fait ainsi. Le dialogue interreligieux est une manière d’évangéliser, de partager la foi, sa foi et d’annoncer notre croyance personnelle en Christ.

Les tensions apparaissent lorsque vous pensez sans cesse l’évangélisation en termes de proclamation explicite et qu’il n’y a pas place pour un autre style d’évangélisation, qui passe par l’évocation. C’est là un extrême. L’autre extrême serait de mener un dialogue interreligieux uniquement comme une manière de se faire des amis, sans aucun partage de conviction. Mais lorsque vous considérez le dialogue interreligieux comme une voie d’évangélisation, je ne vois aucune tension. C’est ainsi que j’observe ce qui se passe en Asie. On doit entendre ce que dit un théologien lorsqu’il dit que nous avons à proclamer Jésus comme Seigneur et Sauveur. C’est là un rappel du fait que vous ne pouvez délaisser vos convictions.

(A suivre : les chemins concrets du dialogue en Asie)

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ZENIT Staff

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