« Chrétiens et Juifs, rencontre à Jérusalem » : message du card. Barbarin

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« Des femmes et des hommes ont jeté leurs vies dans le dialogue »

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ROME, Mercredi 24 mars 2010 (ZENIT.org) – Au lendemain du colloque « Chrétiens et Juifs, rencontre à Jérusalem » qui s’est déroulé en Israël les 16 et 17 mars, le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), organisateur, publie ce message adressé aux quelque 200 participants par le cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, primat des Gaules, qui n’a pas pu participer à la rencontre.

Ce colloque, fait observer le CRIF, « a été marqué par un caractère inédit puisqu’il a permis à des catholiques, des protestants et des juifs de France et d’Israël, à échanger dans un ton de grande liberté. Ce succès promet des développements encourageants » (cf. Zenit du 19 mars 2010 et « Un Echo d’Israël »).

Message du cardinal Barbarin

Chers amis,

En tant que Cardinal de Lyon, Primat des Gaules, je tiens à saluer l’initiative du Docteur Richard Prasquier, président du CRIF, ainsi que de Monsieur Gérard Israël, Président de la Commission pour les relations avec l’Eglise catholique et le monde chrétien.

Cette décision d’ouvrir en Israël un séminaire de dialogue entre Juifs et Chrétiens se situe dans la pleine continuité de tout ce qui a été réalisé, d’une part par les communautés et les organisations juives de France et, d’autre part, par l’Episcopat français, notamment à la suite du Concile Vatican II.

Souvent, nous entendons dire que le dialogue entre Juifs et Chrétiens est particulier en France. Peut-être ne savons-nous pas suffisamment qu’il a été mis en place en Allemagne, en Pologne, aux Etats-Unis, dans différents pays d’Amérique latine, comme c’est le cas en Argentine, au Brésil, au Chili, en Uruguay.

Néanmoins, sans entrer dans un triomphalisme déplacé, louons les particularités de ce que nous avons essayé de bâtir et qui continue de progresser entre Juifs de France et Catholiques. Rappelons-nous, nous ne nous sommes jamais limités à des rencontres conventionnelles, sympathiques, bien que l’amitié soit devenue le ciment de notre fraternité.

Dès le début de nos retrouvailles, nous avons abordé l’un après l’autre, non seulement les conflits de mémoire qui, s’ils n’avaient pas été dépassés, rendaient toute confiance impossible, mais aussi les contentieux contemporains qui n’ont pas manqué de surgir. Il suffit d’évoquer l’affaire du Carmel d’Auschwitz, les discussions politico-religieuses qui entouraient le procès de Paul Touvier, pour se rappeler que, si n’avions pas abordé franchement les lieux d’incompréhension les plus profonds, nous n’aurions pu sceller qu’une fraternité de salon.

De part et d’autre, des femmes et des hommes ont jeté leurs vies dans le dialogue, en payant parfois au prix fort cet engagement au sein de leurs propres communautés. Les cardinaux, les rabbins, les présidents du CRIF, qui négociaient à Genève pour les accords concernant le Carmel d’Auschwitz, n’étaient-ils pas perçus comme des utopistes, qui mettaient en péril la crédibilité de leurs communautés respectives? Le grand rabbin Sirat m’a raconté, peu après mon arrivée à Lyon, les épisodes de cette longue et douloureuse affaire, qui l’a profondément lié à mon prédécesseur, le cardinal Decourtray.

Aujourd’hui, ces femmes et ces hommes sont inscrits au tableau d’honneur de la fraternité retrouvée ; ce n’était guère le cas auparavant, tant les soupçons et le mépris avaient stratifié notre regard réciproque.

La conjoncture actuelle n’est plus celle des années 1980. Il est évident que le conflit du Moyen-Orient comporte malheureusement des dimensions religieuses; sans une paix interreligieuse, aucun accord ne tiendra.

Si l’expérience française, qui consiste à nommer les problèmes – même si cela est douloureux – et à chercher dans le respect de chacune des traditions la définition de nouveaux paradigmes permettant de se penser autrement ensemble, si cette expérience peut apporter un jet de lumière ou tout simplement une petite étincelle qui encouragera nos frères juifs, chrétiens et musulmans vivant en Terre Sainte, nous ne pouvons qu’en rendre grâce à Dieu.

Permettez-moi à ce sujet de saluer le Patriarche Fouad Twal, ainsi que toutes les églises chrétiennes vivant en Israël dans les territoires palestiniens et en Jordanie.

C’est avec grand regret que je ne puis être avec vous à Jérusalem pour ce colloque, mais soyez sûrs que je pense à vous et que je me tiens avec vous devant Celui qui ne peut être que la source de toutes démarches de paix interreligieuse.

Vous savez mon amitié,

Philippe Cardinal Barbarin

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ZENIT Staff

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