Chine : Des élus à la messe à Hong Kong

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ROME, Vendredi 21 octobre 2005 (ZENIT.org) – A l’occasion de la visite à Canton des élus démocrates de Hongkong, deux d’entre eux, ainsi que le chef de l’exécutif de Hongkong, ont assisté à une messe dans une église catholique de la ville, indique « Eglises d’Asie (EDA n. 427, eglasie.mepasie.org).

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A l’occasion de la visite, qualifiée d’« historique » par le chef de l’exécutif hongkongais, Donald Tsang, que les élus du Legco (Legislative Council), l’assemblée parlementaire de Hongkong, ont effectuée les 25 et 26 septembre derniers dans la province du Guangdong, deux d’entre eux, catholiques, ainsi que Donald Tsang, catholique connu pour aller à la messe tous les jours lorsqu’il est à Hongkong, ont assisté à la messe dans une église catholique de la ville de Canton. Les deux élus en question, Andrew Cheng Kar-foo et Martin Lee Chu-ming, font partie des élus démocrates qui étaient persona non grata en Chine continentale jusqu’à cette visite, du fait des critiques émises par eux à l’encontre du régime chinois, après la répression du printemps de Pékin, en 1989. Martin Lee Chu-ming, fondateur et ancien président du Parti démocrate, député au Legco depuis 1985, est considéré comme le « père de la démocratie » à Hongkong.

Les trois personnalités politiques hongkongaises ont assisté à la messe le lundi 26 septembre au matin, en l’église de Notre-Dame de Lourdes, située sur l’île de Shamian, à Canton, à quelques centaines de mètres à pied de l’hôtel où les élus du Legco et Donald Tsang étaient logés. Cette visite n’était pas inscrite à l’ordre du jour de leur programme officiel. Contacté dès le 27 septembre à Hongkong par l’agence Ucanews, Andrew Cheng a confié qu’il s’était rendu à l’église pour « deux raisons ». « Premièrement, j’ai prié pour le pays et pour Hongkong. Deuxièmement, j’ai prié pour ma fille », a-t-il précisé, ajoutant : « En Chine, j’ai prié pour la démocratie et pour nos compatriotes qui vivent là-bas. En apparence et d’un point de vue économique, la Chine croît, mais, sous la surface, il y a de nombreux problèmes, tels que la très inégale répartition des richesses, le dédain pour la dignité de l’homme et le manque de liberté. C’est pourquoi j’ai prié Dieu qu’il prenne soin de la Chine et que ses dirigeants ne se focalisent pas uniquement sur les questions économiques. Et j’ai aussi prié pour que Hongkong devienne un modèle pour le pays en matière de démocratie, d’Etat de droit et de respect des droits de l’homme. »

Sur un plan plus personnel, Andrew Cheng a poursuivi en expliquant que la prière auprès de Notre-Dame de Lourdes revêtait pour lui une signification particulière, car « je suis habitué à lui confier mes joies comme mes difficultés », a-t-il confié. Il a conclu en ajoutant qu’il avait brièvement parlé au prêtre à l’issue de la messe, mais qu’il n’avait pas échangé de paroles avec les catholiques locaux. « L’assistance était très peu nombreuse », a-t-il précisé.

Quant à Martin Lee, la presse hongkongaise a rapporté qu’il avait déclaré s’être « senti si bien » de pouvoir se rendre dans une église sur le continent. Celui qui a présidé le Parti démocrate a ajouté déplorer très fortement que tant de catholiques chinois « continuent de nos jours à être arrêtés pour le simple fait de pratiquer leur foi ». Un point de vue partagé par Andrew Cheng qui voit dans l’existence des communautés catholiques « clandestines » la manifestation de l’absence d’une « réelle liberté de religion en Chine ». L’élu démocrate a toutefois ajouté que la situation actuelle était plus favorable que celle qui prévalait en 1986, date de sa dernière visite sur le continent chinois. « A l’époque, le simple fait d’assister à une messe normale était tout sauf aisé », a précisé Andrew Cheng, qui est par ailleurs membre de l’Alliance hongkongaise pour le soutien aux mouvements démocratiques et patriotes en Chine, une organisation considérée comme « subversive » par Pékin (1).

Au-delà de l’assistance à la messe des trois personnalités politiques, la visite dans le Guangdong des députés du Legco a revêtu une signification très politique. En accueillant les vingt-cinq élus démocrates, accompagnés du reste de leurs collègues des formations pro-Pékin, les autorités chinoises ont sans doute voulu signifier qu’elles respectaient « la large autonomie » promise lors de la signature, en 1984, des accords de rétrocession de Hongkong à la Chine avec la Grande-Bretagne. Mais, depuis le retour du territoire sous le drapeau chinois, en 1997, les partis démocrates n’ont de cesse de dénoncer la mauvaise volonté que Pékin manifeste quant au respect de l’autonomie promise. Ils critiquent notamment l’absence de réforme du mode de scrutin pour désigner les députés du Legco et le chef de l’exécutif, le suffrage universel étant repoussé à un horizon très incertain. Lors de la visite de deux jours dans la région du delta de la rivière des Perles – les villes de Canton, Dongguan, Shenzhen et Zhongshan ont été parcourues par les députés –, la tension a été vive lorsque quatre députés démocrates ont soulevé auprès du secrétaire du Parti communiste de Canton la question de la réhabilitation du mouvement pro-démocratique de 1989. Zhang Dejiang, secrétaire du Parti à Canton et l’un des vingt-quatre membres du Bureau politique du Parti à Pékin, a coupé court au débat, en « répétant la ligne officielle du Parti », rapporte Audrey Eu Yuet-mee, députée démocrate au Legco.

Sur le fond, Audrey Eu, qui est catholique, estime que ce voyage de tous les membres du Legco sur le continent ne signifie pas que Pékin a « accepté » les démocrates de Hongkong, pas plus que ces derniers sont considérés comme « des fauteurs de trouble ». Ce qui a changé, poursuit-elle, c’est que le gouvernement chinois ne paraît plus craindre les inconvénients et les incertitudes qu’un contact avec les milieux pro-démocrates peut générer.

(1) Pour Donald Tsang, qui se rend régulièrement sur le continent chinois, aller à la messe dans une église catholique du continent n’est pas chose rare. Ces derniers mois, à l’occasion de différentes visites en Chine, le chef de l’exécutif hongkongais est ainsi allé à la messe à Chengdu, dans le Sichuan, et sur l’île de Shangchuan (Sancian), où se trouve le tombeau de saint François Xavier. Selon un prêtre catholique du Hebei, interrogé par l’agence Ucanews, la manière dont Donald Tsang ne fait pas mystère de sa foi catholique est un facteur qui pourrait aider les laïcs en Chine continentale à assumer leur identité. Aujourd’hui encore, précise le prêtre, de nombreux catholiques ne veulent pas ou craignent de faire connaître leur appartenance religieuse sur leur lieu de travail ou auprès de leurs relations d’affaires.

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ZENIT Staff

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