Bernard et Abélard : les leçons pour aujourd’hui de leur débat théologique

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Catéchèse de Benoît XVI

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ROME, Mercredi 4 novembre 2009 (ZENIT.org) – La « confrontation théologique » entre Bernard et Abélard se conclut par « une pleine réconciliation entre les deux » : un exemple aussi pour notre temps, a fait observer Benoît XVI qui a consacré sa catéchèse du mercredi à expliquer la racine des divergences entre les deux théologiens médiévaux. Il a souligné la nécessité du débat théologique dans l’Eglise et du service « de la vérité » rendu par le Magistère ecclésial.

Humilité et bienveillance

Benoît XVI a en effet tenu l’audience du mercredi place Saint-Pierre, et il a consacré sa catéchèse à « un grand débat » théologique, « représenté symboliquement par la controverse entre saint Bernard et Abélard ». Le pape a inscrit ce débat dans sa catéchèse de la semaine passée sur la théologie monastique et la théologie scolastique (cf. Zenit du 29 octobre 2009).

« La confrontation théologique entre Bernard et Abélard se conclut par une pleine réconciliation entre les deux, grâce à la médiation d’un ami commun, l’abbé de Cluny, Pierre le Vénérable », a souligné le pape en précisant : « Abélard montra de l’humilité en reconnaissant ses erreurs, Bernard fit preuve d’une grande bienveillance ».

Mais surtout, indique le pape, « chez tous les deux prévalut ce qui doit vraiment tenir à cœur lorsque naît une controverse théologique, c’est-à-dire sauvegarder la foi de l’Eglise et faire triompher la vérité dans la charité ».

Le pape a exprimé ce vœu pour aujourd’hui : « Que ce soit aujourd’hui aussi l’attitude avec laquelle on se confronte avec l’Eglise, en ayant toujours comme objectif la recherche de la vérité ».

Deux accents différents

Le pape a rappelé ce qu’est la théologie : « La théologie est la recherche d’une compréhension rationnelle des mystères de la Révélation, auxquels on croit dans la foi. Pour reprendre une définition traditionnelle, c’est la foi qui cherche l’intelligibilité ».

Or, que s’est-il passé entre les deux théologiens ? « Saint Bernard, a expliqué le pape, mettait l’accent sur la première partie de cette définition: la foi, et Abélard sur la seconde: la compréhension au moyen de la raison ».

Et de préciser l’importance pour Bernard, de « promouvoir l’expérience vivante et intime de Dieu » par la théologie. Et c’est pour cela qu’il « contesta la méthode – trop intellectuelle -d’Abélard qui, à ses yeux, réduisait la foi à une simple opinion détachée de la vérité révélée ».

Mais que pouvons-nous en tirer aujourd’hui ? Car tentation est récurrente d’opposer deux façons de faire la théologie. Benoît XVI pose la question : « Que pouvons-nous apprendre, aujourd’hui, de la confrontation, des tons souvent enflammés, entre Bernard et Abélard, et, en général, entre la théologie monastique et la théologie scolastique ? »

Le nécessaire débat

Le pape en tire une première conséquence, à savoir la nécessité du débat théologique: « Cette confrontation montre l’utilité et la nécessité d’une saine discussion théologique dans l’Eglise, surtout lorsque les questions débattues n’ont pas été définies par le Magistère, qui reste, cependant, un point de référence inéluctable ».

Il souligne en effet le respect des théologiens médiévaux pour l’intégrité de la foi sur laquelle veille le magistère : « Saint Bernard, mais également Abélard lui-même, en reconnurent toujours sans hésitation l’autorité ».

Benoît XVI souligne une seconde conséquence qu’on pourrait résumer comme le besoin d’un « équilibre » entre le donné révélé (foi) et ses interprétations (raison) : « Les condamnations qu’Abélard subit nous rappellent que dans le domaine théologique doit exister un équilibre entre ce que nous pouvons appeler les principes architectoniques qui nous sont donnés par la Révélation et qui conservent donc toujours l’importance prioritaire, et les principes interprétatifs suggérés par la philosophie, c’est-à-dire par la raison, et qui ont une fonction importante mais uniquement instrumentale ».

Le souci des « croyants simples et humbles »

Le pape fait observer le rôle indispensable du magistère, car, que lorsque « cet équilibre entre l’architecture et les instruments d’interprétation fait défaut, la réflexion théologique risque d’être entachée d’erreurs, et c’est alors au Magistère que revient l’exercice de ce service à la vérité nécessaire qui lui est propre ».

Enfin, le pape souligne le souci pastoral de saint Bernard dans sa réaction à la théologie d’Abélard : « Parmi les motivations qui poussèrent Bernard à «se ranger» contre Abélard et à solliciter l’intervention du Magistère, il y eut également la préoccupation de sauvegarder les croyants simples et humbles, qui doivent être défendus lorsqu’ils risquent d’être confondus ou pervertis par des opinions trop personnelles et par des argumentations théologiques anticonformistes, qui pourraient mettre leur foi en péril ».

On ne peut pas ne pas faire un rapprochement avec les efforts de dialogue de Benoît XVI, non seulement avec des chrétiens d’autres confessions ou des croyants d’autres religions, mais surtout avec des théologiens comme Hans Küng qu’il avait reçu en 2005, après son élection (cf. Zenit du 26 septembre 2005).

Anita S. Bourdin

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ZENIT Staff

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