Belgique : Le rôle des religions face au pouvoir politique

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CITE DU VATICAN, Mardi 18 novembre 2003 (ZENIT.org) – La Fête du Roi, le 15 novembre, a été marquée par le traditionnel Te Deum solennel célébré en la Cathédrale des Ss Michel et Gudule, indique l’agence catholique belge « Cathobel » (www.cathobel.be). Mais pour la troisième année consécutive, c’est l’Église catholique et non plus le ministère de l’Intérieur qui l’organise. Dans son homélie, le Cardinal Godfried Danneels, archevêque de Malines-Bruxelles, partant du dialogue entre Jésus et Pilate, «Es-tu le roi des juifs?», a traité du rôle des religions, et du christianisme en particulier, face au pouvoir politique.

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Le Te Deum a été célébré ce 15 novembre en la Cathédrale des Ss Michel et Gudule. La cérémonie était présidée par le Cardinal Danneels, entouré de Mgr Jozef De Kesel et du clergé bruxellois, avec la participation de délégués orthodoxes, protestants et anglicans, et en présence de représentants juifs et musulmans. On notait la présence de la Reine Fabiola et des Princes, ainsi que des Présidents de la Chambre des Représentants et du Sénat, des représentants des gouvernements, avec en tête, le Premier Ministre, Guy Verhoofstadt, et le Ministre des Affaires Étrangères, Louis Michel.

Les chants étaient exécutés par le Choeur de la Cathédrale et la chorale de l’Eglise Orthodoxe.

Chemins différents mais complémentaires

Dans son homélie, le Cardinal Danneels, s’appuyant sur le dialogue entre Jésus et Pilate (Es-tu le roi des Juifs ?), a développé le thème du rôle des religions, et du christianisme en particulier, face au pouvoir politique. « Il s’agit, a dit le Cardinal, de deux chemins différents et complémentaires, pour rendre l’homme heureux ». Depuis toujours, les deux voies que l’homme peut prendre pour accéder à sa pleine stature, coexistent dans l’histoire de tous les peuples. Cette histoire humaine a été souvent un lieu de confrontation qui va de la totale opposition à l’identification appelée théocratie.

Mais, depuis la rencontre entre Pilate, (« Es-tu Roi ? ») et le Christ (« Oui, je le suis, mais mon royaume n’est pas de ce monde) il est clair qu’il ne peut y avoir ni identification entre religion et Etat, ni totale opposition entre eux. S’il y a en effet deux royautés et deux pouvoirs, le spirituel et le temporel, les deux pôles partagent un but commun : la réalisation du bonheur de l’homme et de la société humaine.

Les moyens utilisés sont cependant tout autres et ne doivent pas êtres confondus. Le pouvoir civil exige une grande compétence administrative, une grande capacité de communication et un éternel combat pour la démocratie. De plus, il s’agit pour les responsables du pouvoir civil de veiller à placer toujours le bien commun au-dessus des intérêts personnels ou de certaine groupes. On le voit, le bon fonctionnement d’une société civile ne peut se passer de valeurs. Il faut poser continuellement des choix. Et ceux-ci se fondent sur une hiérarchie de valeurs humaines, accessibles à la pensée humaine morale et philosophique. Ces valeurs ne sont donc pas obligatoirement religieuses. D’ailleurs, a encore souligné le Cardinal, les traits les plus marquants de l’Europe, sont bien la distinction entre le politique et le religieux, garantie pour la pleine liberté de croyance et condition indispensable pour l’épanouissement de la personne et pour l’enrichissement de la vie sociale.

Dialogue régulier et structuré entre Religions et Etat

Le Cardinal s’est alors interrogé sur la place des religions, et du christianisme en particulier, dans la société. Les religions sont-elles vouées à une existence dans l’ombre, en marge de la société ? Sont-elles une affaire totalement privée ? Après une longue période d’éloignement entre religions et pouvoir civil, le temps serait venu, suggère le Cardinal, de dépasser une certaine méfiance mutuelle, de s’affranchir des complexes des deux côtés, pour revenir au dialogue structuré et régulier entre le monde des religions et des Eglises et le pouvoir civil. Les Eglises le demandent et le projet de Convention Européenne prévoit aussi un dialogue structuré et régulier entre Eglises et Etat.

Les religions, et le christianisme en particulier, portent en elles une mémoire collective morale multiséculaire. Pendant des siècles, la foi chrétienne, en particulier, a élaboré et offert à l’humanité une définition de l’homme, un affinement, une perfection dont le fleuron est le personnalisme dont vit encore la pensée humaniste. Le christianisme, ainsi que d’autres religions, continuent à dire que l’homme, pour être véritablement humain, doit être plus qu’homme. D’ailleurs, a fait remarquer le Cardinal, des phénomènes aussi divers que la crise dans la transmission entre les générations, les séquelles de la répression anti-religieuse et l’invasion de la culture médiatique et marchande, ont conduit les responsables les plus attachés à la laïcité à reconnaître que l’ignorance à propos des religions est devenue une menace pour la vie et la cohésion de chaque pays, pour le plein développement de la construction européenne. Depuis deux mille ans, la conscience européenne a été formée et affinée à partir de la double tradition chrétienne et humaniste. Ces deux composantes de l’identité européenne ont survécu aux crises et aux drames dans lesquels elles ont failli disparaître ensemble.

Le Christ, lampe de vérité

Dans sa réponse à Pilate, « Oui, je suis Roi », le Christ indique qu’il a beaucoup de choses à offrir à l’humanité pour son bonheur. « L’homme aurait-il jamais raison de refuser d’allumer cette lampe de vérité qu’est le Christ et le trésor de sagesse et de forces morales des religions ? », se demande Mgr Danneels, qui a souligné l’importance de la tradition judéo-chrétienne dans la promotion de nombreuses valeurs, ainsi que l’apport du christianisme et de l’humanisme dans l’histoire de l’Europe. Il a invité les pouvoirs publics à établir une structure de dialogue entre les religions et l’Etat et à trouver une complémentarité auprès des religions.
© CathoBel

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ZENIT Staff

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