Audience générale du 5 janvier 2011

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Texte intégral

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ROME, Mercredi 5 janvier 2010 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte intégral de la catéchèse prononcée par le pape Benoît XVI, ce mercredi, au cours de l’audience générale, dans la salle Paul VI.

* * *

Chers frères et sœurs !

Je suis heureux de vous accueillir pour cette première Audience générale de la nouvelle année et je vous présente de tout cœur, à vous et à vos familles, mes vœux les plus fervents. Que le Seigneur du temps et de l’histoire guide nos pas sur le chemin du bien et concède à chacun une abondance de grâce et de prospérité. Encore enveloppé de la lumière de Noël, qui nous invite à la joie pour la venue du Sauveur, nous sommes aujourd’hui à la veille de l’Epiphanie, au cours de laquelle nous célébrons la manifestation du Seigneur à tous les peuples. La fête de Noël fascine aujourd’hui comme jadis, plus que d’autres fêtes de l’Eglise ; elle fascine parce que tous, d’une certaine manière, ressentent que la naissance de Jésus a quelque chose à voir avec les aspirations et les espérances les plus profondes de l’homme. Le consumérisme peut éloigner de cette nostalgie intérieure, mais si on a dans le cœur le désir d’accueillir cet Enfant qui apporte la nouveauté de Dieu, qui est venu nous donner la vie en plénitude, les lumières des décorations de Noël peuvent devenir en revanche un reflet de la Lumière qui s’est allumée avec l’incarnation de Dieu.

Dans les célébrations liturgiques de ces jours saints nous avons vécu de manière mystérieuse mais réelle l’entrée du Fils de Dieu dans le monde et nous avons été éclairés encore une fois par la lumière de son éclat. Toute célébration est une présence actuelle du mystère du Christ et en elle se prolonge l’histoire du salut. A propos de Noël, le Pape saint Léon le Grand affirmait : « Même si la succession des actions corporelles est à présent passée, comme il a été ordonné par avance dans le dessein éternel…, toutefois nous adorons continuellement le même enfantement de la Vierge qui produit notre salut  » (Sermon sur le Noël du Seigneur 29, 2), et il précise : « parce que ce jour n’est pas passé de façon que serait passée la puissance de l’œuvre qui fut alors révélée  » (Sermon sur l’Epiphanie 36, 1). Célébrer les événements de l’incarnation du Fils de Dieu n’est pas un simple souvenir de faits du passé, mais c’est rendre présents ces mystères porteurs de salut. Dans la liturgie, dans la célébration des Sacrements, ces mystères se font actuels et deviennent efficaces pour nous, aujourd’hui. Saint Léon le Grand affirme encore : « Tout ce que le Fils de Dieu fit et enseigna pour réconcilier le monde, nous ne le connaissons pas seulement dans le récit des actions accomplies dans le passé, mais nous sommes sous l’effet du dynamisme de telles actions présentes » (Sermon 52, 1).

Dans la Constitution sur la sainte liturgie, le Concile Vatican II souligne que l’œuvre de salut réalisée par le Christ continue dans l’Eglise à travers la célébration des saints mystères, grâce à l’action de l’Esprit Saint. Déjà, dans l’Ancien Testament, sur le chemin vers la plénitude de la foi, nous avons le témoignage de la façon dont la présence et l’action de Dieu sont transmises à travers les signes, par exemple, celui du feu (cf. Ex 3, 2 sqq ; 19, 18). Mais à partir de l’Incarnation quelque chose de bouleversant à lieu : le régime de contact salvifique avec Dieu se transforme radicalement et la chair devient l’instrument du salut : « Verbum caro factum est », « le Verbe s’est fait chair », écrit l’Evangéliste Jean et un autre auteur chrétien du IIIème siècle, Tertulien, affirme : « Caro salutis est cardo », « La chair est le fondement du salut » (De carnis resurrectione, 8,3: PL 2,806).

Noël porte déjà les prémices du « sacramentum-mysterium paschale », c’est donc le début du mystère central du salut qui culmine dans la passion, la mort et la résurrection, parce que Jésus commence l’offrande de lui-même par amour dès le premier instant de son existence humaine dans le sein de la Vierge Marie. La nuit de Noël est donc profondément liée à la grande veillée nocturne de la Pâque, lorsque la rédemption s’accomplit dans le sacrifice glorieux du Seigneur mort et ressuscité. La crèche elle-même, en tant qu’image de l’incarnation du Verbe, à la lumière du récit évangélique, évoque déjà la Pâque et il est intéressant de voir que dans certaines icônes de la Nativité dans la tradition orientale, Jésus est représenté enveloppé de langes et déposé dans une mangeoire qui a la forme d’un sépulcre ; une allusion au moment où il sera déposé de la croix, enveloppé d’un linge et mis dans un sépulcre creusé dans la roche (cf. Lc 2, 7 ; 23, 53). L’incarnation et la Pâque ne sont pas l’une à côté de l’autre, mais elles sont les deux points clefs inséparables de l’unique foi en Jésus Christ, le Fils du Dieu incarné et Rédempteur. La Croix et la Résurrection présupposent l’incarnation. C’est uniquement parce que le Fils, et en Lui Dieu lui-même, est véritablement « descendu  » et « s’est fait chair  », que la mort et la résurrection de Jésus sont des événements qui nous apparaissent comme contemporains et qui nous concernent, nous arrachent à la mort et nous ouvrent à un avenir où cette « chair  », l’existence terrestre et transitoire, entrera dans l’éternité de Dieu. Dans cette perspective unitaire du Mystère du Christ, la visite à la crèche conduit à la visite à l’Eucharistie, où nous rencontrons présent de façon réelle le Christ crucifié et ressuscité, le Christ vivant.

La célébration liturgique de Noël n’est alors pas seulement un souvenir, mais elle est surtout un mystère ; elle n’est pas seulement mémoire, mais également présence. Pour saisir le sens de ces deux aspects inséparables, il faut vivre intensément tout le Temps de Noël comme l’Eglise le présente. Si nous le considérons au sens large, celui-ci s’étend sur quarante jours, du 25 décembre au 2 février, de la célébration de la nuit de Noël, à la maternité de Marie, à l’Epiphanie, au Baptême de Jésus, aux noces de Cana, à la présentation au Temple, précisément par analogie avec le temps pascal, qui forme une unité de cinquante jours, jusqu’à la Pentecôte. La manifestation de Dieu dans la chair est l’événement qui a révélé la Vérité dans l’histoire. En effet, la date du 25 décembre, reliée à l’idée de la manifestation solaire – Dieu qui apparaît comme une lumière qui ne se couche jamais sur l’horizon de l’histoire -, nous rappelle qu’il ne s’agit pas seulement d’une idée, celle que Dieu est la plénitude de la lumière, mais d’une réalité pour nous les hommes qui est déjà réalisée et toujours actuelle : aujourd’hui, comme alors, Dieu se révèle dans la chair, c’est-à-dire dans le « corps vivant » de l’Eglise en pèlerinage dans le temps, et dans les sacrements il nous donne aujourd’hui le salut.

Les symboles des célébrations de Noël, rappelés par les lectures et par les prières, donnent à la liturgie de ce Temps un profond sens d’« épiphanie » de Dieu dans son Christ-Verbe incarné, c’est-à-dire de « manifestation » qui possède également une signification eschatologique, c’est-à-dire qui oriente vers les temps ultimes. Déjà dans l’Avent les deux venues, la venue historique et celle à la fin de l’histoire, étaient directement reliées ; mais c’est en particulier dans l’Epiphanie et dans le Baptême de Jésus que la manifestation messianique est célébrée dans la perspective des attentes eschatologiques : la consécration messianique de Jésus, Verbe incarné, à travers l’effusion de l’Esprit Saint sous forme visible, conduit à son accomplissement le temps des promesses et inaugure les temps ultimes.

Il faut racheter ce Temps de Noël d’une apparence trop moraliste et sentimentale. La célébration de Noël
ne nous propose pas seulement des exemples à imiter, tels que l’humilité et la pauvreté du Seigneur, sa bienveillance et son amour envers les hommes ; mais elle est plutôt l’invitation à nous laisser transformer totalement par Celui qui est entré dans notre chair. Saint Léon le Grand s’exclame: « le fils de Dieu… s’est uni à nous et nous a unis à lui de manière à ce que l’abaissement de Dieu jusqu’à la condition humaine devienne une élévation de l’homme jusqu’à la hauteur de Dieu » (Sermon sur le Noël du Seigneur 27, 2). La manifestation de Dieu a pour objectif notre participation à la vie divine, à la réalisation en nous du mystère de son incarnation. Ce mystère est l’accomplissement de la vocation de l’homme. Saint Léon le Grand nous explique encore l’importance concrète et toujours actuelle pour la vie chrétienne du mystère de Noël : « les paroles de l’Evangile et des prophètes… enflamment notre esprit et nous enseignent à comprendre la Nativité du Seigneur, ce mystère du Verbe fait chair, pas tant comme le souvenir d’un événement passé, que comme un fait qui se déroule sous nos yeux… c’est comme si nous était encore proclamé dans la solennité d’aujourd’hui : « Je vous annonce une grande joie, qui sera pour tout le peuple: aujourd’hui, dans la ville de David, est né pour vous un Sauveur qui est le Christ Seigneur » » (Sermon sur le Noël du Seigneur 29, 1). Et il ajoute: « Reconnais, chrétien, ta dignité et, devenu participant de la nature divine, soit attentif à ne pas retomber, par une conduite indigne, de cette grandeur, dans la bassesse primitive » (Sermon sur le Noël du Seigneur, 3).

Chers amis, vivons ce Temps de Noël avec intensité : après avoir adoré le Fils de Dieu fait homme et déposé dans la mangeoire, nous sommes appelés à passer à l’autel du Sacrifice, où le Christ, le Pain vivant descendu du ciel, s’offre à nous comme véritable nourriture pour la vie éternelle. Et ce que nous avons vu avec nos yeux, à la table de la Parole et du Pain de Vie, ce que nous avons contemplé, ce que nos mains ont touché, c’est-à-dire le Verbe fait chair, annonçons-le avec joie au monde et témoignons-le généreusement à travers toute notre vie. Je renouvelle de tout cœur à vous et à vos proches mes vœux sincères pour la nouvelle année et je vous souhaite une bonne fête de l’Epiphanie. 

A l’issue de l’Audience générale le Pape a résumé sa catéchèse en différentes langues et salué les pèlerins. Voici ce qu’il a dit en français :

Chers frères et sœurs,

Je vous accueille avec joie en ce début d’année et vous présente mes vœux fervents pour vous et vos familles. Encore tout environnés de la joie de Noël et fascinés par cette fête, nous sentons tous que la naissance de Jésus a un lien avec les aspirations les plus profondes de l’homme. La manifestation de Dieu dans la chair est l’événement qui a révélé la Vérité dans l’histoire. Au cours des célébrations liturgiques, nous avons vécu de façon mystérieuse mais réelle l’entrée du Fils de Dieu dans le monde. Chaque célébration est présence actuelle du mystère du Christ et en elle se prolonge l’histoire du salut: le mystère célébré devient efficace pour nous, aujourd’hui. Dans l’Ancien Testament, des signes manifestaient la présence et l’action de Dieu. A partir de l’Incarnation, le contact salvifique avec Dieu se transforme radicalement et de façon bouleversante: la chair elle-même devient « pivot  » du salut. Le Verbe s’est fait chair ! Et la crèche annonce déjà Pâques car le Fils de Dieu incarné est le Rédempteur. Dans cette perspective unitaire du Mystère du Christ, la visite à la crèche oriente vers l’Eucharistie où nous rencontrons le Christ vivant, crucifié et ressuscité, présent sous un mode réel. Chers amis, puissions-nous découvrir qu’aujourd’hui comme alors, Dieu se révèle et nous donne le salut dans la chair, c’est-à-dire son « corps vivant  » de l’Eglise pérégrinant dans le temps et dans les sacrements !

Je salue cordialement les pèlerins francophones, en particulier le groupe des étudiants de l’Institut des hautes-études sur les Nations unies de Marseille et le groupe des séminaristes de l’archidiocèse de Paris accompagnés par le cardinal André Vingt-Trois. A la suite des mages vous êtes venus adorer l’Enfant. Que la lumière du Sauveur vous éclaire et vous renouvelle pour porter l’Evangile aux nations. Bonne année à tous !

© Copyright du texte original plurilingue : Libreria Editrice Vaticana

Traduction : Zenit

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ZENIT Staff

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