A Naples, le pape fustige la "puanteur" de la corruption

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Rencontre avec la population au quartier Scampia

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En voyage apostolique à Naples, en Campanie, ce samedi 21 mars 2015, le pape François fustige la « puanteur » de la corruption. La corruption, qui consiste aussi dans le rejet des migrants et le manque de travail, « n’est pas chrétienne », elle est « pourrie », elle « pue », dénonce-t-il.

C’était le premier discours du pape dans la cité située à quelque 250 km de Rome. Après avoir visité le sanctuaire marial de Pompéi à 8h du matin, il a rejoint Naples, à une vingtaine de kilomètres, en hélicoptère.

Il a atterri sur le terrain de sport de Scampia, périphérie nord marquée par la criminalité, le trafic de drogue et les règlements de compte. C’est là que le pape a choisi de rencontrer la population, place Jean-Paul II.

Pour ce premier rendez-vous, il a été accueilli par le cardinal Crescenzio Sepe, archevêque de la ville, par le président de la Région Campanie, M. Stefano Caldoro, par le préfet de Naples, Mme Gerarda Pantalone et le maire, M. Luigi De Magistris, qui a remis symboliquement au pape les clés de la ville durant la rencontre.

Ayant rejoint en voiture ouverte la grande place Jean-Paul II à 9h15, le pape a rencontré les habitants, notamment des représentants des mondes de la culture, du droit, du travail, des personnes marginalisées et des migrants.

Après le témoignage d’une femme immigrée des Philippines, d’un ouvrier italien et du président de la Cour d’Appel de Naples, le pape a prononcé un discours depuis son siège entouré d’enfants joyeux.

Que le mal n’ait jamais le dernier mot

Délaissant largement son texte préparé, le pape a remercié les participants pour leur accueil chaleureux. « Vive Jésus ! Vive le pape ! », avaient-ils scandé à son arrivée. De grandes bannières, entourant la place, saluaient le « Pape de la Miséricorde » et citaient Jean-Paul II : « Ne vous rendez jamais au mal ! ».

« La vie à Naples n’a jamais été facile, mais n’a jamais non plus été triste ! », a souligné le pape François en rendant hommage à cette « grande ressource » des napolitains : la joie. Il les a appelés à « faire en sorte que le mal n’ait jamais le dernier mot » : « C’est un beau défi, ne jamais laisser le mal avoir le dernier mot. »

« Celui qui prend volontairement le chemin du mal gagne des broutilles, mais il perd l’espérance… La voie du mal est une voie qui vole toujours l’espérance, à soi-même et la société, aux nombreuses personnes honnêtes et travailleuses, à la renommée de la ville, à son économie », a-t-il mis en garde.

Nous sommes tous des migrants

Le pape a évoqué les migrants, rappelant qu’ils n’étaient pas « des gens de seconde zone » : « Nous sommes tous migrants, nous sommes tous enfants de Dieu, qui nous a mis tous en chemin. Tous… Ce n’est pas inscrit sur des papiers, mais dans notre chair, dans notre chemin de vie… Tous nous sommes migrants sur le chemin de la vie, personne n’a de domicile fixe ici sur terre, il nous faudra tous aller trouver Dieu un jour, certains avant, d’autres plus tard… »

Il a déploré le manque de travail, particulièrement pour les jeunes : « C’est grave ! Qu’est-ce que fait un jeune sans travail ? Que avenir a-t-il ? Quel choix de vie a-t-il ?… C’est une responsabilité non seulement de la ville, du pays, mais du monde ! »

Et s’il existe « des institutions charitables » pour nourrir les plus pauvres, « le problème n’est pas de manger, c’est de ne pas avoir la possibilité de rapporter son pain à la maison… et cela vole la dignité ! il nous faut défendre notre dignité de citoyens, d’hommes, de femmes, de jeunes. Nous ne devons pas nous taire », a-t-il exhorté.

La puanteur de la corruption

Le pape a aussi dénoncé les abus, l’exploitation au travail : « ce n’est pas chrétien ! ». C’est même « de la corruption », a-t-il affirmé : « si nous fermons la porte aux migrants, si nous ne donnons pas de travail, cela s’appelle la corruption ! ». Et cette « pente glissante » de la corruption n’épargne personne, tous peuvent être tentés, a-t-il insisté.

La corruption est « une parole laide, car une chose ‘corrompue’ est une chose sale… le corps d’un animal mort ‘pourrit’, il ‘pue’. De même la corruption pue », a poursuivi le pape : « un chrétien qui laisse entrer en lui la corruption n’est pas chrétien, il pue ! Une société corrompue pue ! »

Encourageant à prodiguer aux enfants « une vraie éducation » pour l’avenir, il a souhaité aux Napolitains « d’avoir le courage de continuer avec la joie, d’avancer sur la voie du bien, non la voie du mal, d’avancer sur la voie de l’accueil de tous, d’accueillir les migrants comme des citoyens de Naples, de chercher des sources de travail… de continuer de nettoyer [leur] âme et la société, afin qu’il n’y ait plus la puanteur de la corruption ».

Il a encouragé les initiatives citoyennes pour soutenir les communautés dans cette voie. La « bonne politique » est « une des expressions les plus hautes de la charité, du service, de l’amour », a-t-il expliqué : elle est « un service aux personnes, qui s’exerce en premier lieu au niveau local » qui souffre le plus des structures corrompues.

Le pape a conclu en soulignant que « Naples est toujours prête à se relever » car « sa racine réside dans l’âme des Napolitains, dans leur joie et dans leur religiosité, dans leur piété ».

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Anne Kurian-Montabone

Baccalauréat canonique de théologie. Pigiste pour divers journaux de la presse chrétienne et auteur de cinq romans (éd. Quasar et Salvator). Journaliste à Zenit depuis octobre 2011.

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